lundi 4 janvier 2010

LE SCENARISTE D'ALIEN DISPARAIT



On avait évoqué tout récemment le nom de Dan O'BANNON à l'occasion de l'article de septembre 2009 sur les préquelles annoncées de deux célèbres films mettant en scène de redoutables créatures extraterrestres. Celui-ci vient de disparaître, le 17 décembre 2009.

Beaucoup envient à juste titre ceux qui ont eu la chance de faire de leur passion leur profession; mais il conviendrait aussi de rendre hommage à leur courage. En effet, gagner sa subsistance en remettant constamment en cause sa créativité et en affrontant de multiples aléas, même lorsqu'on est soutenu par ses proches, n'est pas toujours confortable. Le souhait de Benoît LESTANG de mettre entre parenthèses sa compétence reconnue de maquilleur, et la sécurité qu'elle lui assurait, pour se reconvertir totalement dans la mise en scène en dépit des incertitudes, doit probablement être mis en relation avec l'abus médicamenteux qui a entraîné sa disparition prématurée en juillet 2008 (carrière évoquée dans l'article d'août 2008). Mondialement connu des cinéphiles pour avoir conçu l'histoire d'un des films les plus célèbres du cinéma, ALIEN de Ridley SCOTT, le scénariste Dan O'BANNON a sans doute, quant à lui, payé ce succès d'un lourd tribut, même s'il donnait l'impression d'un homme volubile, à qui son nœud papillon conférait une touche supplémentaire d'élégante fantaisie.

En effet, Daniel Thomas O'BANNON, de son vrai nom, né le 30 septembre 1946 à Saint-Louis dans le Missouri, œuvra sur de nombreux projets, mais beaucoup semblent n'avoir pas abouti. Le stress qui le tenaillait lorsqu'il tentait de proposer des idées de scénarios aux producteurs le conduisit à l'hôpital pour des douleurs à l'estomac, lesquelles, de son propre aveu, lui inspirèrent l'histoire d'un organisme qui ronge de l'intérieur son hôte - thème qu'on retrouvera aussi quelques années plus tard avec le scientifique interprété par Robert GLAUDINI dans le film PARASITE de Charles BAND, qui permit au maquilleur Stan WINSTON de créer son premier monstre. Ainsi, l'histoire d'ALIEN naquit-elle dans la douleur. Le scénariste prit pour modèle les Parasitoïdes, des Insectes de l'ordre des Hyménoptères qui paralysent leur proie afin que, lors du développement de leur progéniture, celle-ci dispose d'un réservoir important de protéines, en dévorant vivante la victime anesthésiée - mode de vie horrifiant que mirent en avant certains mouvements satanistes aux États-Unis pour contester la bienveillance du Créateur. En dehors de la mort de Kane (John HURT) victime du parasite, une scène ultérieure dans laquelle le capitaine Dallas interprété par Tom SKERITT est découvert prisonnier de la créature extraterrestre dont il héberge la descendance, suppliant qu'on abrège son agonie, fut coupée lors de la sortie, de manière à ne pas perturber le crescendo final illustrant la traque des survivants par le redoutable prédateur; la séquence, visible sur le supplément du DVD, donna lieu à un succédané dans la suite ALIENS réalisée par James CAMERON. Dan O'BANNON reconnut également avoir subi l'influence de diverses œuvres, comme évoqué dans l'article de septembre, susceptibles d'induire certaines similitudes avec les films IT! THE TERROR FROM BEYOND SPACE et PLANET OF THE VAMPIRES ainsi qu'avec le roman LA FAUNE DE L'ESPACE, dont l'auteur, A.E. VAN VOGT, amorça une procédure en justice, mais le concept d'une créature terrorisant un vaisseau spatial n'était pas il est vrai totalement inédit dans la science-fiction. Il semble que bien des conceptions aient été envisagées quant à l'aspect de l'extraterrestre : une sorte de Dinosaure, un monstre à trois têtes (comme celui de LA CHOSE de Douglas McKEOWN ou plus récemment la créature de l'épisode LES 456 de la série TORCHWOOD) ou bien encore un être pourvus de tentacules à l'instar de la forme infestante, le facehugger ayant été initialement envisagé comme une sorte de Pieuvre. L'illustrateur Ron COBB, recruté par O'BANNON, qui était chargé de concevoir les décors et les vaisseaux spatiaux du film, livra aussi sa version d'un être semi-humanoïde dont l'apparence laissait facilement deviner son appétit pour la chair fraîche, avant que l'artiste suisse Hans Rudi GIGER, qu'avait rencontré O'BANNON à l'occasion d'une tentative avortée d'adaptation de DUNE, ne propose les concepts définitifs, avec le facehugger comparable à une main squelettique* et le monstre adulte d'allure "bio-mécanique". L'approche de GIGER assimilant le vivant au mécanique fait écho à la vision exprimée par l'histoire d'O'BANNON, avec son univers sans chaleur dans lequel la conception de l'être humain réduit à ses fonctionnalités par notre société matérialiste, se confondant toujours plus avec la seule technicité, renvoie à la froideur d'un cosmos apparaissant toujours plus insondable et inintelligible, évocation de la condition anthropologique moderne dépossédée de toute potentialité à la transcendance (cependant, l'idée que le scientifique chargé de la collecte des connaissances s'avère n'être en fait lui-même qu'une machine, un simple instrument au service des intérêts financiers d'une grande compagnie, a été ajoutée au fil des réécritures effectuées par les producteurs Walter HILL et David GILER). Le scénario d'O'BANNON et la mise en scène de SCOTT, additionnés à la musique de Jerry GOLDSMITH envoûtante de mystère, aboutirent à un film parfait qui est devenu une référence incontournable du genre.

Version originelle d'un face-hugger tentaculé par Ron COBB d'après le scénario initial d'ALIEN dû à Dan O'BANNON.

Le chest burster dessiné par O'Bannon.

La scène d'accouchement d'ALIEN, dans laquelle le rejeton tue véritablement "le père".

A l'instar du dessinateur précité Ron COBB, Dan'O BANNON avait fait ses débuts au cinéma auprès du réalisateur John CARPENTER, son collègue d'université, sur DARK STAR, dans lequel il interprétait un membre de l'équipage, et il en avait également réalisé les décors. Le cinéaste reprochera à son collaborateur d'avoir pastiché son premier film de science-fiction à travers ALIEN, en reprenant notamment sa vision désacralisée de la vie dans l'espace au quotidien, même si DARK STAR est une comédie et que l'extraterrestre ressemblant à une citrouille à pattes tient plus du commensal indésirable que du monstre intersidéral meurtrier - il semble en fait que le caractère très ancré dans la réalité la plus immédiate des personnages d'ALIEN ait été plus particulièrement développé par le producteur Walter HILL au fil des réécritures, lesquelles ont d'ailleurs incité O'BANNON a entamer une action en justice afin de se voir confirmer comme l'auteur du scénario original du film de Ridley SCOTT. Fort de son expérience sur DARK STAR, O'BANNON fut ensuite engagé sur LA GUERRE DES ETOILES pour y réaliser certains effets spéciaux informatiques ( il avait été envisagé qu'il supervise ensuite les effets spéciaux visuels de DUNE lorsqu'Alejandro JODOROWSKY devait le porter à l'écran ).

Dan O'BANNON dans DARK STAR et son compagnon qui n'a pas grand chose du prédateur dessiné par GIGER.

Avant ALIEN, O'BANNON avait auparavant proposé un autre scénario pour une invasion par des formes de vie étrangères, THEY BITE, mais il n'était pas parvenu à concrétiser le projet. Au milieu des années 1980, après avoir conçu l'histoire du film d'action TONNERRE DE FEU et imaginé une des séquences du dessin animé METAL HURLANT, le scénariste a travaillé sur les deux films de science-fiction réalisés par le metteur en scène de MASSACRE A LA TRONÇONNEUSE, Tobe HOOPER.


Croquis de Dan O'Bannon pour THEY BITE.

Tiré du roman LES VAMPIRES DE L'ESPACE écrit par Colin WILSON, LIFEFORCE, dans lequel on peut notamment voir le futur nouveau capitaine de STAR TREK Patrick STEWART incarnant un psychiatre interlope, s'avère plus cohérent que le film ne semble l'être à première vue en raison de la profusion des thèmes abordés.

L'exploration d'une épave interstellaire d'allure biomécanique, recelant les corps desséchés d'extraterrestres: le prologue de LIFEFORCE a un petit air de réminiscence d'ALIEN.

Même s'il reprend certains éléments des versions précédentes écrites par différents scénaristes, c'est notamment à la suite du travail qu'effectua Dan O'BANNON que le scénario du remake des ENVAHISSEURS DE LA PLANÈTE ROUGE, L'INVASION VIENT DE MARS, obtint finalement l'aval des producteurs, permettant ainsi au spectateur de découvrir Louise FLETCHER en institutrice inquiétante ainsi que de remarquables créatures extraterrestres réalisées par l'équipe de Stan WINSTON.
"Mais oui, tu es un affreux monstre; tu n'as pas à être jaloux de cet "Alien" ! " : deux personnages de L'INVASION VIENT DE MARS, dans un nouveau décor extraterrestre biomécanique.

Le duo d'ALIEN se reconstitua en 1990 quand Dan O'BANNON retrouva le scénariste Ronald SHUSETT pour TOTAL RECALL. Les deux auteurs élaborèrent à partir d'une courte nouvelle de Philip K. DICK un récit échevelé autour de l'acteur Arnold SCHWARZENEGGER, et donnèrent l'occasion à Rob BOTTIN de créer d'impressionnants mutants engendrés par la pollution. O'BANNON regrettera cependant la propension du metteur en scène hollandais Paul VERHOEVEN à mettre en valeur la violence alors qu'il inclinait davantage pour des touches d'humour.

Dan O'BANNON et Ronald SHUSETT, le duo initiateur de deux grands succès du cinéma de science-fiction ( ici à l'époque d'ALIEN ).



Trois concrétisations de la première tentative d'adaptation du scénario de TOTAL RECALL, ville martienne, Kuato et l'intérieur du Sphinx renfermant les processeurs d'atmosphère extraterrestres.

Un bâtiment construit pour la version non tournée de TOTAL RECALL que devait réaliser David CRONENBERG pour le producteur Dino de LAURENTIIS.

Le sentiment de paranoïa émanant de nombre de textes de DICK l'inspirera à nouveau, de même que son appréhension que la technologie ne finisse par supplanter totalement l'homme, lorsqu'il écrira le synopsis de PLANETE HURLANTE réalisé par Christian DUGUAY dans lequel des robots en guerre contre les humains produisent de parfaites répliques de leurs ennemis pour les mener à leur perte.

La seule forme de vie indigène de PLANÈTE HURLANTE, une petite créature mi-lézard mi-tatou fugitivement aperçue.

Dan O' BANNON a connu une certaine reconnaissance en tant que metteur en scène avec sa parodie LE RETOUR DES MORTS-VIVANTS. En 1991, Dan O'Bannon réalise THE RESURRECTED, une adaptation du CAS DE CHARLES DEXTER WARD écrit par H. P. Lovecraft, aussi inspirateur de RE-ANIMATOR réalisé par Stuart Gordon en 1985, avec lequel il partage son sujet, la résurrection des morts, et un climat morbide, notamment lors de l'exploration d'une crypte obscure hantée par des restes humains à demi-vivants, même si c'est ici l'occultisme et non la science qui est cause des phénomènes macabres. Un détective privé, John March (John Terry), est engagé par Madame Ward (Jane Sibbett) pour enquêter sur son mari Charles (Chris Sarandon, le voisin terrifiant de VAMPIRE, VOUS AVEZ DIT VAMPIRE ?) devenu soudain très secret, et découvre que celui-ci a été tué et remplacé par son lointain ancêtre le sorcier Joseph Curwen qui est son sosie. Le film au rythme lent n'en est pas moins effrayant, jusqu'au final qui rappelle les scènes de vampirisme de LIFEFORCE, dans lequel l'enquêteur sur le point d'être tué retourne contre le personnage maléfique sa magie noire, l’élixir qu'il a obtenu permettant de faire revenir le parent assassiné qui emporte le sorcier dans l’au-delà. Le choix d'utiliser dans le flashback un corps mécanisé créé par Todd Masters pour représenter un cadavre déchiqueté aboutit à un résultant dérangeant, l'être aux mouvements résiduels paraissant humain sans l'être tout à fait. La musique n'est pas sans évoquer le thème du film ALIEN, l’œuvre à laquelle le nom d' O'BANNON demeure le plus attaché. Il avait aussi signé le scénario du petit film d'horreur HEMOGLOBINE (BLEEDERS) réalisé en 1997 par Peter SVATEK, dans lequel des humains monstrueux sont conduits à tuer et à pratiquer l'inceste, à la manière des hommes-panthères du remake de LA FELINE (CAT PEOPLE) et de LA NUIT DECHIREE (SLEEPWALKERS). 


Une des effrayantes aberrations constituées de morceaux de cadavres que la sorcellerie anime dans RESURRECTED. 

Il avait par ailleurs écrit la bande dessinée THE LONG TOMORROW avec le dessinateur MOEBIUS, rencontré lors du projet d'adaptation du roman DUNE par JODOROWSKY; l'album est tenu pour une importante source d'inspiration du film BLADE RUNNER réalisé par Ridley SCOTT après sa tentative avortée d'adapter à son tour la saga de Frank HERBERT.

Une scène de sexe tourne court dans THE LONG TOMORROW lorsque la partenaire s'avère être un métamorphe.

Un certain nombre de sources indiquent - ce qui ne paraît pas pour l'instant confirmé par son épouse, d'autant qu'il avait exprimé le souhait que la série s'achève** - que Dan O'BANNON aurait travaillé sur la préquelle du film ALIEN qui avait rendu son nom célèbre; si tel était cependant bien le cas, ceci fermerait tristement la parenthèse de sa collaboration au cinéma. La maladie de Crohn qui lui a inspiré l'intrigue du premier film aura en tout cas fini par le terrasser au bout de 30 ans. On ne manquera pas de rendre compte à l'occasion de ce site en devenir si celui-ci s'avérait recéler des informations inédites concernant le domaine des créatures imaginaires qui nous occupent, au travers des divers investissements de ce scénariste emblématique.

Page commémorative :

* après ses quelques ébauches précédentes, une sorte de Dinde glabre à pattes d'Araignée, puis sa version modifiée avec le corps évoquant un gros Ver annelé.

( ** les noms de Dan O'BANNON et Ronald SHUSETT apparaissent dans le générique de tous les films de la série ALIEN, mais en tant que créateurs des personnages originaux ).

mardi 22 décembre 2009

UNE INTERPRETATION EXTRA(TERRESTRE)


William BOYETT, un acteur insuffisamment honoré, qui s'investissait pourtant sans hésiter dans son jeu pour mieux entraîner le spectateur dans l'illusion cinématographique, loin des artifices des avatars virtuels.

Il existe nombre d'histoires de science-fiction dans lesquelles des formes de vie extraterrestres parviennent à infiltrer l'espèce humaine en prenant notre apparence ou en contrôlant notre esprit. Divers acteurs ont eu la responsabilité d'incarner ces usurpateurs à l'écran. Parmi ces manifestations de créatures non terrestres dont l'altérité est dissimulée par une apparence plus ordinaire, l'interprétation la plus pittoresque est très probablement celle de William BOYETT dans le film THE HIDDEN, un acteur disparu il y' a exactement 5 ans, le 29 décembre 2004, des suites d'une pneumonie et de problèmes rénaux.

Né le 3 janvier 1927, la famille de cet acteur s'installe à Los Angeles dans les années 1940. Après une expérience à la radio, et avoir servi lors de la Seconde guerre mondiale, il se produit sur la scène de théâtres, à Los Angeles comme à New-York. Il tourne par la suite à maintes reprises pour la télévision, obtenant le rôle traditionnel du supérieur autoritaire dans des séries policières comme EMERGENCY! et DRAGNET. Il figura aussi dans des épisodes de PERRY MASON et de STAR TREK : THE NEXT GENERATION. On put encore le découvrir à quelques occasions au cinéma, comme pour un petit rôle dans ROCKETEER.

ENQUÊTE SUR UN MYSTÈRE

William BOYETT a tourné en 1956 dans le classique PLANÈTE INTERDITE (FORBIDDEN PLANET) de Fred Leo McWILCOX, mais son nom ne figure pas au générique du film, et il est bien difficile de l'y reconnaître; il est y donc pratiquement aussi invisible que la créature immatérielle du film... 


 William BOYETT dans PLANETE INTERDITE.

Il peut par contre être vu dans le tout dernier épisode de la série originelle THE OUTER LIMITS (AU-DELA DU REEL en version française), tourné en 1965, ENQUÊTE SUR UN MYSTÈRE. Il y apparaît comme le copilote d'un avion qui tombe dans l'océan dans le prologue. Etrangement, il n'est plus jamais vu après l'accident. On suppose donc qu'il a péri, mais aucun des survivants ne fait allusion à sa disparition et il est le seul à être ainsi éclipsé sans explication, se trouvant de la sorte privé de la possibilité de rencontrer l'étrange forme de vie extraterrestre primitive qui se manifeste par la suite.

William BOYETT (à gauche) fait une bien fugitive apparition dans le dernier épisode de la série AU-DELA DU REEL, ENQUETE SUR UN MYSTÈRE.

L'acteur apparaît dans un la première partie d'un épisode des ENVAHISSEURS (THE INVADERS), Conférence au sommet (Summit Meeting).

La science-fiction aurait dû lui sourire enfin lorsqu'il fut engagé pour un des principaux rôles du film THE HIDDEN, qui obtint le grand prix du Festival du film fantastique et de science-fiction d'Avoriaz en 1988. Plusieurs acteurs furent remarqués et primés, notamment Michael NOURI qui interprète le policier dépassé par une série de meurtres inexplicables. Les critiques associèrent aussi aux louanges Kyle McLACHLAN, qui joue le partenaire de celui-ci - en fait une entité extraterrestre qui a pris l'apparence d'un agent décédé afin de traquer la créature meurtrière, les commentaires soulignant la subtilité de son jeu. De manière plus inattendue, des seconds rôles furent aussi mis à l'honneur comme Jim KOUF, qui fut proposé aux Saturn Awards par l'Académie des films de science-fiction, fantastique et d'horreur, ou Clu GULAGER, dont le nom était mentionné dans les journaux annonçant les diffusions du film tandis que celui de William BOYETT était systématiquement occulté et que sa prestation a été presque unanimement passée sous silence, alors qu'en réalité, c'est lui qui PORTE littéralement le film. Ce désintérêt pour sa participation au film est un nouveau mystère qui confirme les rapports étranges entre l'acteur et la science-fiction fort peu reconnaissante à son endroit ! La commémoration du cinquième anniversaire de sa disparition est une nouvelle fois l'occasion, après l'évocation du grand créateur de monstres du cinéma Rob BOTTIN conduit à une retraite forcée en raison de l'hégémonie des images de synthèse et l'hommage, cet été, au compositeur Jerry GOLDSMITH pour le cinquième anniversaire de sa disparition, de rendre justice à une personnalité marquante mais trop souvent délaissée du monde de l' imaginaire associé aux créatures qui nous occupent.

Le parasite extraterrestre de THE HIDDEN, qui évoque à la fois l'Escargot et l'Araignée, passe du corps agonisant de De Vries à celui de Jonathan Miller ( William BOYETT ), grâce aux effets spéciaux fort convaincants de Kevin YAGHER; malheureusement, le supplément du DVD sur le tournage des effets spéciaux n'est disponible que dans l'édition américaine.


Sous l'effet du contrôle extraterrestre, le quinquagénaire Miller recouvre soudain une vitalité inattendue.

UN JEU IMPRESSIONNANT

Le réalisateur, Jack SHOLDER, sait bien, lui, le crédit qu'il doit porter à William BOYETT pour le succès de THE HIDDEN. En effet, la crédibilité du film repose sur les agissements de la créature extraterrestre avide d'expérimenter de nouvelles sensations au travers de son corps d'emprunt, responsabilité qui incombe à William BOYETT pendant la majeure partie du film. Succédant à Chris MULKEY, qui fait une apparition courte mais efficace, William BOYETT, dans le rôle de Jonathan Miller, incarne le quinquagénaire qui hérite du parasite extraterrestre. Ayant calqué ses attitudes sur celui du chien qui sert à un moment de réceptacle à l'entité conçue par le maquilleur Kevin YAGHER, William BOYETT a su trouver une approche si convaincante et marquante qu'il a servi de modèle pour les autres acteurs amenés à lui succéder lorsque la créature le délaisse à son tour en quête d'un nouvel hôte.



La puissance d'expression de son jeu facial confère à son interprétation une démesure particulièrement réjouissante sans amoindrir pour autant sa capacité à terrifier. Lorsqu'il s'extirpe de son coma, on comprend à la simple intensité de son regard qu'il est possédé. On ne peut non plus oublier la scène dans laquelle l'organisme étranger pâtissant des graves affections stomacales du corps de son hôte, un tentacule tente instinctivement de s'extraire de son bras : les rictus de l'acteur se contorsionnant douloureusement sur le sol dans un spasme évocateur donnent toute son ampleur à cette séquence fort impressionnante. Par le ressort très physique de son interprétation, il apparaît comme un véritable "Louis de FUNES de l'épouvante", poussant au paroxysme son jeu sans pour autant, on l'a déjà remarqué, nuire à la crédibilité du personnage. Chacune des scènes dans lesquelles il apparaît est époustouflante et réjouissante par le décalage saugrenu entre son apparence de quinquagénaire respectable à costume cravate et l'exagération de son comportement, typique d'un jeune délinquant. On pourrait encore citer son incroyable course dans la rue, alors qu'une pulsion le conduit à convoiter une voiture de marque Ferrari; il faut le voir épuiser les capacités de l'organisme à bout de souffle de son personnage, finissant par courir les pieds en dedans comme une mécanique qui tomberait en panne : une prestation parfaitement étudiée, digne de celles très chronométrées des grands interprètes du cinéma muet comme Harold LLOYD ou Buster KEATON, qui ne disposaient que de leur corps pour composer leur personnage et conférer un dynamisme précis aux scènes.

L'organisme affaibli de Jonathan Miller révèle ses limites face aux sollicitations du parasite. Attention, sortie inopinée de tentacule imminente !

Une fois le relais passé par William BOYETT aux acteurs chargés d'incarner les hôtes suivants du parasite, et bien que ceux-ci ne déméritent pas particulièrement, notamment au travers du politicien ( John McCANN ) qui opte pour un registre plus retenu en rapport avec sa fonction, l'attrait du film faiblit un peu par contraste, ce qui a vraisemblablement conduit le metteur en scène à opter pour un rythme très soutenu, avec force échanges de coups de feu meurtriers - notons d'ailleurs que la suite, qui n'est pas réalisée par Jack SHOLDER, est moins marquante, l'absence d'un acteur aussi charismatique que William BOYETT se faisant notablement sentir. On ne peut que regretter que le cinéma fantastique n'ait pas davantage fait appel à William BOYETT; son incarnation dans THE HIDDEN n'en est que plus singulière et mémorable.


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UN SOSIE D'UN PRÉSENTATEUR FRANÇAIS.
Pour l'anecdote, on mentionnera la plaisante ressemblance entre l'acteur qui interprète dans THE HIDDEN le vendeur de voitures, incarné avec un cynisme réjouissant par James LUISI (ci-dessous à droite) et l'animateur d'une célèbre émission française, "Les dossiers de l'écran", Alain JEROME (à gauche), qui joue son propre rôle à la fin de la comédie PAPY FAIT DE LA RESISTANCE, comme illustré par les photos ci-jointes.

mardi 24 novembre 2009

UN HOMMAGE PUREMENT "VIRTUEL"

La gorgone Méduse mise à mal à la fin du CHOC DES TITANS par les soins de Ray HARRYHAUSEN. Les promoteurs du remake avec images de synthèse risquent de lui porter un coup encore plus fatal....

Ce blog a rendu récemment hommage, à l'occasion de sa disparition, (article "Un producteur mythique" de mars 2009) à Charles SCHNEER, fils de joaillier qui s'était très jeune tourné vers la production, et qui avait surtout produit les films utilisant les techniques d'animation de Ray HARRYHAUSEN, le plus grand créateur de son domaine - ce dernier sait d'ailleurs bien l'admiration qu'il continue de susciter chez les fantasticophiles exigeants, sans l'affectation un peu condescendante des nouveaux maîtres du cinéma.

Or voici que la sinistre perspective d'un remake de sa plus importante production, LE CHOC DES TITANS, annoncé de longue date, est en train de se concrétiser. Aussi incroyable que cela puisse paraître, mais en accord avec le conformisme actuel qui sévit à Hollywood, les différentes créatures fantastiques sont créées sous forme d' "images de synthèse", élaborées informatiquement, comme le confirme le réalisateur, le Français Louis LETERRIER, déjà responsable du film HULK. Il y'a quelques années, l'autre grand film qui avait été inspiré à Ray HARRYHAUSEN par la mythologie gréco-romaine, JASON ET LES ARGONAUTES, avait déjà fait l'objet d'une nouvelle adaptation avec la même approche irrévérencieuse. Il suffit pourtant de songer à la manière saisissante avec laquelle ce dernier a orchestré la mort de Méduse, conférant un caractère organique au point d'en être presque dérangeant à la scène durant laquelle la queue du monstre décapité continue de s'agiter frénétiquement avant qu'un liquide épais s'écoule de la tête tranchée, pour se persuader du caractère absurde d'un remake y substituant des monstres dessinés par des informaticiens! 

TRUCAGES PAR ORDINATEUR JUSQU'A LA LIE 

 Charles SCHNEER avait été le défenseur inconditionnel des techniques de Ray HARRYHAUSEN, dont il fut le meilleur soutien. Baptisée "Dynamation" par son créateur, cette animation "image par image" de figurines, combinées ultérieurement aux plans tournés avec les acteurs, s'inspirait de l'expérience de son mentor Willis O'BRIEN, créateur du premier KING KONG, qui avait eu l'idée de cette technique dès les années 1920 après s'être amusé avec une petite sculpture représentant un boxeur. Si les personnages fantastiques ne mesuraient qu'une vingtaine de centimètres au maximum, au moins ceux-là présentaient-ils un caractère tangible, avec une armature interne analogue à un squelette, ainsi qu'un épiderme pourvu d'une texture réaliste, et prenaient-ils vie, à l'occasion, dans des décors miniatures soigneusement reconstitués. Certes, même dans LE CHOC DES TITANS, le film pour lequel Ray HARRYHAUSEN disposa du budget le plus important, certains plans, comme le combat de Persée avec deux Scorpions devenus gigantesques, laissent deviner la nature composite de l'image ; l'animateur le reconnut lui-même, estimant qu'un délai d'une ou deux semaines supplémentaires, si les ressources financières l'eussent permis, lui auraient donné la possibilité d'amoindrir considérablement la différence de ton entre acteurs et êtres imaginaires. Mais si vraiment cet aspect devait justifier à lui seul ce remake, les techniques actuelles de "remastérisation" suffiraient à aplanir les contrastes et à rendre aux scènes la qualité visuelle envisagée par le créateur - d'ailleurs, les contempteurs font preuve d'une vigilance bien moindre à l'endroit des défauts des films actuels. Aussi, on peut légitimement mettre en cause l'intérêt d'un remake qui se contente de refaire par des moyens d'une pertinence discutable ce classique. Les vrais "Titans" sont ceux qui seraient capables de monter à nouveau des projets cinématographiques avec de vrais effets spéciaux en dépit de la mode et de la tentation de la facilité; ces "Titans" là ne sont visiblement pas prévus au programme....

On pourrait se dire que, finalement, personne n'est obligé d'aller voir ce remake, et que les plus curieux pourront éventuellement se contenter de regarder ultérieurement ce film sur un écran d'ordinateur, plus appropriés pour des trucages hérités des jeux vidéo. Mais comment ne pas céder à l'indignation en songeant que, plutôt que réaliser des remakes des grands films de Ray HARRYHAUSEN, les studios auraient été bien plus inspirés de s'assurer la collaboration de l'animateur en finançant son projet non concrétisé de troisième grand film mythologique, d'après L'ILLIADE et L'ODYSSEE, THE FORCE OF THE TROJANS ? De vrais admirateurs de Ray HARRYHAUSEN aspireraient à lui donner les moyens de réaliser ses projets inaboutis, plutôt que recréer ses œuvres*, en laissant entendre que les créations originales ont "mal vieilli" et qu'il convient à présent de les "déringardiser". Ce genre de remake tient plus de la profanation que de l'hommage. Ne craignez rien, Monsieur HARRYHAUSEN, bien des amateurs, au risque d'être taxés de "puristes", ne sont pas prêts à brûler ce qu'ils ont adoré au nom de l'air du temps.

Le budget modique qui n'a pas permis à Ray HARRYHAUSEN d'attribuer le nombre exact de tentacules au Poulpe géant de IT CAME FROM BENEATH THE SEA ne l'a pas empêché de lui donner vie avec un grand souci de détail et de réalisme à sa créature, restituant les détails perceptibles à l'échelle prêtée à son protagoniste invertébré.

Avec cette mouture nouvelle manière du CHOC DES TITANS, les images infographiques finissent-elles de se substituer totalement aux différents univers fantastiques, de KING KONG revu par Peter JACKSON au projet de suite de THE DARK CRYSTAL, sous oublier les ALIEN - la Reine virtuelle d'ALIENS VERSUS PREDATORS ), en espérant que THE THING y échappera - article évoquant la préquelle en septembre 2009, "Retour annoncé de deux grands monstres" . Quant à James CAMERON, qui devait tant à Stan WINSTON, concepteur des impressionnants effets spéciaux des TERMINATOR, il ne jure plus à présent que par le virtuel, ce qui est un désaveu des techniques de son ami disparu, dont, pour le moins qu'on puisse dire, il n'a pas à coeur de faire prospérer l'héritage. Rappelons aussi le sacrilège que Steven SPIELBERG, marchant dans les pas de Georges LUCAS, a commis à l'encontre de son propre film E.T. L'EXTATERRESTRE : en ajoutant un certain nombre de plans recréant l'extraterrestre au travers d'images générées par ordinateur, il a fait perdre à son personnage son caractère charnel, l'émotion cédant le pas au grotesque... 


UNE ÉVOLUTION A REBOURS DU DESIR CROISSANT DE REALISME

On peut se demander si ceux qui recourent systématiquement aux trucages numériques sont véritablement des passionnés de fantastique. On a déjà évoqué, tant il marque une rupture historique, le cas de Stephen SOMMERS, stakhanoviste des tournages, qui avait congédié d'UN CRI DANS L'OCEAN l'immense maquilleur Rob BOTTIN, trop perfectionniste à ses yeux, au profit des infographistes, précipitant ainsi sa disgrâce à Hollywood de laquelle les amateurs de monstres qui se respectent demeurent inconsolables - il est vrai que Rob BOTTIN professait habituellement que, lorsqu'on pensait à un moyen évident de réaliser un trucage, il fallait toujours chercher à l'obtenir par un autre procédé : cette incitation à constamment se dépasser, en recherchant l'inventivité, est évidemment à l'opposé de la facilité que représente le recours systématique aux images créées par l'ordinateur. Comment concevoir qu'un réalisateur, qu'une personne se disant passionnée par le fantastique, à laquelle on accorde la possibilité de créer un monde extraordinaire, de donner vie à des êtres féeriques, à des monstres incroyables ou à d'étranges extraterrestres, se contente de les transposer à l'écran sous forme de dessins informatisés, sans chercher à les concrétiser par de vrais décors, des costumes réalistes ou des créatures mécaniques sophistiquées imitant la vie à la perfection ? Il est incompréhensible qu'un cinéaste digne de ce nom boude son plaisir d'avoir sur le plateau de tournage, quelles que soient les difficultés techniques éventuelles, une merveilleuse création telle qu'un Dinosaure animatronique de Stan WINSTON.


Dans un premier temps, les producteurs avaient continué à faire appel aux créateurs confirmés d'effets spéciaux traditionnels - outre Rob BOTTIN et UN CRI DANS L'OCEAN, on peut mentionner Stan WINSTON sur LA FIN DES TEMPS, Patrick TATOPOULOS sur PITCHBLACK, le studio KNB pour THE FACULTY, ou Jim HENSON pour LE PACTE DES LOUPS, alors que le montage éliminait toujours le fruit de leur travail au profit exclusif des simulacres numériques. Les promoteurs de l'infographie s'ingénient obstinément à refaire autrement ce que leurs prédécesseurs réalisaient à la perfection, et ils ont toujours gain de cause. Pourtant, à côté des métamorphoses de THE THING et du LOUP-GAROU DE LONDRES, les morphings (fusions numériques d’une image dans une autre) ne paraissent être que de médiocres parodies uniquement destinées à l'esthétique publicitaire. Les effets numériques, qui peuvent être appropriés à certains divertissements, comme la comédie FLUBBER et son fluide verdâtre facétieux, ont tendance à être inadaptés en ce qui concerne les créatures destinées à être davantage réalistes. Ainsi, celles de DARK CITY (la forme véritable des Etrangers) , les Insectes agressifs de STARSHIP TROOPERS, nombre de ceux de MIMIC, certaines des incarnations de LA MUTANTE (notamment le rejeton de Sil), le monstre tentaculaire d'UN CRI DANS L'OCÉAN, le cafard géant de MEN IN BLACK ou le Ver géant de MEN IN BLACK 2 sont très décevants, pauvres avatars de synthèse, et tranchent avec les monstres contemporains conçus suivant les techniques habituelles (les extraterrestres d'INDEPENDANCE DAY, ceux vus dans la base secrète de MEN IN BLACK, les monstres d'ALIEN IV, les abominations de NECRONOMICON, celles, fugitives, de L’ANTRE DE LA FOLIE, ainsi que du FESTIN NU, les mutations de BODY SNATCHERS ou encore les parasites des MAITRES DU MONDE). Dans les dernières années, Hollywood a fini par adopter d'emblée les effets de synthèse systématiquement (et il n'y a pas "d'exception culturelle française" en la matière, les Français, loin de se distinguer par le refus des modes n'étant pas, loin s'en faut, les derniers à suivre le mouvement avec plusieurs sociétés nationales spécialisées en la matière). De grands noms des effets spéciaux comme Rick BAKER et Patrick TATOPOULOS pensaient que l'engouement pour le virtuel serait passager; contre toute attente, ce pronostic ne s'est pour l'instant pas confirmé, au point de conduire le second a mettre un terme à ses activités ( comme évoqué dans l'article de mars 2009 "Les derniers grands créateurs déclarent forfait" ). 

L'obsession moderniste devient si omniprésente, au point de s'apparenter à une véritable dogme, que la fille de René GOSCINY, l'un des deux créateurs du personnage d'ASTERIX, vient de déclarer que les images par ordinateur avaient donné la possibilité de réaliser un dessin animé tiré de la série humoristique du "Petit Nicolas"; comme si le grand Walt DISNEY avait dû attendre l'imagerie virtuelle pour donner naissance à ses classiques tels que BAMBI, BLANCHE-NEIGE ou encore MERLIN L'ENCHANTEUR !... On entend le même genre de contre-vérité au sujet de bien des effets spéciaux de la part de gens qui semble ignorer - délibérément ? - les extraordinaires talents manifestés dans tant de films du passé récent. Les effets de synthèse procèdent d'une sorte de snobisme voulant mettre en exergue la haute technicité des trucages générés par des ordinateurs surpuissants, engendrant l'obscène tripatouillage effectué par Georges LUCAS sur sa trilogie de LA GUERRE DES ETOILES (voir notamment Jabba the Hutt qui est passé de délibérément grotesque à ostensiblement ridicule). Comment ne pas déplorer l'autosatisfecit si habituel des créateurs qui se pâment de superlatifs, comme si ceux qu'ils remplaçaient n'avaient aucun talent. Tant de grands noms ont été malmenés, laissés de côté comme Rob BOTTIN et Chris WALAS (dont on réclamait le retour en décembre 2008), ou contraints à la reconversion numérique comme Phil TIPPETT qui avait même un temps envisagé de s'exiler en République tchèque pour cause de suprématie des images par ordinateur, alors que ses séquences-test d'animation image par image pour JURASSIC PARK étaient souvent bien plus concluantes que le rendu virtuel final (quelques voix commencent à trouver que celui-ci ne paraît plus très convaincant des années après la sortie du film). Tout un savoir-faire se perd, un pan entier de la culture contemporaine des arts et techniques disparaît. L'informatique se substitue toujours plus à l'artiste et à l'animateur; c'est un peu comme si AVI 3000 remplaçait Léonard de VINCI ! 


UN PROBLÈME DE FOND TOUCHANT A L'IDÉE MÊME QU'ON SE FAIT DU CINÉMA 

Les spécialistes des effets spéciaux copient le modèle du vivant alors que les informaticiens se contentent de le contrefaire. Tout à leur surenchère technologique - laquelle a provoqué le dépôt de bilan de la compagnie du spécialiste d'effets spéciaux Richard EDLUND qui croyait judicieux d'être à la page des dernières innovations en la matière en faisant l'acquisition d'ordinateurs toujours plus modernes - les infographistes oublient que les trucages les plus simples sont parfois aussi les plus performants.Il est de bon ton de se gausser de la pieuvre d'un film d'Ed Wood qui dut être manipulée manuellement alors que son système mécanique était tombé en panne; il conviendrait de rappeler que le face-hugger de ALIEN qui saute sur John HURT n'est qu'une créature en caoutchouc retirée de son visage avant que la séquence soit montée à l’envers, que le chien glabre au long cou de THE THING n’est qu’une marionnette manuelle de Stan Winston, que le parasite de THE HIDDEN est manipulé par de simples ficelles invisibles et que l’apparition de la gueule féroce dans la transformation lycanthropique du Loup-garou de Londres est obtenue en poussant une mâchoire au bout d’une tige sous un masque en caoutchouc. Une sacrée leçon d’humilité pour les technocrates... Comme pour les jeux de rôle guidés par les propos du maître de séance, le spectateur est dorénavant sommé d'accepter pour tel ce qu'on lui demande de croire, alors qu'auparavant les merveilleux illusionnistes du cinéma s'ingéniaient à leurrer ses sens, s'efforçant, non de simplement contrefaire, mais bien de recréer la réalité. Ce qui faisait l'attrait du cinéma fantastique et de science-fiction, c'était que par le talent de ses créateurs, il permettait la suspension provisoire de l'incrédulité, l'irruption sur l'écran d'une rupture avec le quotidien n'en étant ainsi que plus frappante. A partir du moment où le spectateur est sommé d'accepter simplement tout ce qu'on lui fait voir, en délaissant son sens critique et ignorant les paramètres du réalisme, le caractère ontologique du fantastique devient sans objet. Le cinéma n'est plus l'essence d'une réalité extraordinaire, même totalement imaginaire comme dans THE DARK CRYSTAL, il devient une simple session de simulation, dont le caractère vain est explicite.

Quoi ! Un remake de TOTAL RECALL avec des images de synthèse ?...


PREJUGES TECHNOPHILES ET MANIPULATION MEDIATIQUE

Alors que les médias entonnent presque à l'unisson l'apologie des images de synthèse, confinant à l'idéologie de par l'idolâtrie des nouvelles technologies promues vecteur de la bienfaisante modernité et de la totipotence de la technique, comment ne pas se demander ce que sont devenus les nombreux contempteurs un peu pincés qui déploraient au nom d'une conception intégriste de la cinéphilie le moindre plan d'effet spécial comme dénaturant par un vulgaire artifice puéril l'art noble de la mise en scène, au point que des chefs d'œuvre du cinéma comme BLADE RUNNER et THE THING ont été descendus en flammes pour cette raison par nombre de critiques à l'époque de leur sortie, et qui s'extasient à présent devant des longs métrages dont presque chaque image reflète un caractère artificiel flagrant? Conformisme toujours... Unanimisme encore qui confine au pavolvisme dès que sort un film ou une animation générée par ordinateur (pourtant, le gore reste quant à lui "de la vieille école" comme dans UN CRI DANS L'OCEAN avec ses victimes déchiquetées qui jonchent le sol), et qui comme pour JURASSIC PARK, passe sous silence les plans réalisés selon d'autres procédés par l'équipe de Stan WINSTON - comme l'époustouflant Tricératops malade du premier film et le bébé Tyrannosaure irréprochable du second, que les médias attribuent à ceux qui cherchent à s'accaparer le travail de tels spécialistes en visant à réduire à la portion congrue la part qui revient à leur art !.. Pas étonnant que certains spectateurs jugent convaincantes ces images de synthèse : ce n'en sont pas !... Snobisme incroyable enfin de ceux qui ironisent sur les "monstres caoutchouteux", méconnaissant le rendu qu'un bon éclairage peut donner à une peau en latex, sans parler des matériaux plus modernes, et feignant par ailleurs d'ignorer que bien des animaux tout à fait réels, ne leur en déplaise, présentent une telle peau, de l'hippopotame au morse. Les trucages numériques ne peuvent qu’imparfaitement rivaliser avec la réalité des volumes et des formes,la qualité charnelle de la texture de la peau, des créatures tridimensionnelles des Rob BOTTIN, Stan WINSTON, Rick BAKER et autres Kevin YAGHER. Jusqu'au début des années 1990, les spécialistes d'effets spéciaux, qu'ils aient recouru à l'animation de modèles réduits image par image devant un écran bleu, de marionnettes à fil, à des modèles mécaniques ou à des maquillages, s'efforçaient de recréer la vie, ce à quoi ils parvenaient souvent à la perfection. Les gorilles créés par le maquilleur Rick BAKER pour GORILLES DANS LA BRUME atteignent une telle perfection qu'on ne peut les distinguer des véritables animaux également employés sur le tournage. Les modèles animatroniques sous-marins de Walt CONTI, comme l'orque de SAUVEZ WILLY ou les Baleines à bosse de STAR TREK IV, sont d'incroyables prodiges hérités d'années de perfectionnement, et il faut une sacré dose de mauvaise fois et d'attirance pour la facilité pour affirmer à présent que tout trucage au cinéma serait impossible sans le "numérique". 

Les nouveaux spectateurs sevrés de jeux vidéo paraissent avoir perdu tout repère quant à la notion de réalisme. Lors de mes rares passages à la radio, j'exhortais les auditeurs à aller voir les films en salle, convaincu que cela seul pouvait permettre à des producteurs de pouvoir monter de nouveaux projets. A présent, il n'y a plus de films qui nécessitent réellement d'être vus ailleurs que sur un petit écran, et puisque les producteurs n'investissent pratiquement plus d'argent dans des décors et de vrais effets spéciaux, l'appel au sens de la responsabilité du cinéphile me paraît devoir se justifier de moins en moins ; ce qui se conçoit sur un écran d'ordinateur peut être visionné sur un ordinateur. Les effets spéciaux ne sont d'ailleurs que le symptôme le plus explicite de la disparition d'une conception exigeante du cinéma, lorsque tous les composantes, de la mise en scène à la photographie soigneusement étudiée, des trucages à la musique de film constituée en genre autonome, aboutissaient à une véritable osmose, engendrant des œuvres marquantes, souvent uniques, alors que de nos jours, ils deviennent un assemblage hétérogène, avec des prises de vue au caractère artificiel calquées sur des films d'art martiaux, des chansons à la mode se substituant à la musique de film, genre spécifique qui participait de l'atmosphère de l'œuvre en transportant le spectateur - voir l'hommage à Jerry GOLDSMITH de juillet 2009, si bien nommé puisqu'il était un orfèvre ("goldsmith" en anglais) en la matière, etc..., autant d'éléments qui en font à présent des films interchangeables et non plus des plongées inoubliables dans des univers qui survivaient dans l'esprit du spectateur bien après la projection.

Venu du futur, il a été envoyé vers la fin des années 1980 pour éliminer le principal promoteur des images de synthèse avant que celles-ci ne contaminent tous les films...


DES AVIS DIVERGENTS IGNORES 

Bien que minoritaire, le présent point de vue est partagé par un certain nombre de cinéphiles anglo-saxons s'exprimant sur divers forums. Voici la retranscription aussi exacte que possible des propos de ceux qui ne souscrivent pas à la pensée unique en matière d'effets spéciaux, auxquels on cède bien volontiers la place : 

" Suis-je le seul à m'insurger chaque fois que je vois une scène avec des images de synthèse de nos jours ? L'industrie entière semble dépendante de cette technologie, qui s'est répandue comme un virus dans pratiquement tous les "blockbusters". J'ai toujours été un admirateur des effets spéciaux, mais l'image de synthèse est aussi excitante que regarder quelqu'un d'autre jouer sur un jeu vidéo. Je crois que la mauvaise pente a commencé vers 1993 avec JURASSIC PARK (ce qui est exact, bien que le film comportait néanmoins des créatures en taille réelle animées par Stan WINSTON comme dit plus haut - ndr), maintenant tous les autres films comportent une ou plusieurs scènes IRREALISTES qui ruinent tout le film. En fait, certaines bandes annonces de nos jours contiennent assez d'absurdes images de synthèse pour me dissuader d'aller voir le film. Consternant Hollywood. C-O-N-S-T-E-R-N-A-N-T." 

" Il n' y a rien de pire que l'image générée par ordinateur lorsque c'est mal fait. C'est le cas quand les créatures ou quoi que ce soit ne paraissent pas reposer réellement sur le sol et ne donnent pas l'illusion de poids, ou que leurs mouvements apparaissent faux." 

" L'image de synthèse est mal faite - SPIDERMAN 3, les loups-garous dans VAN HELSING, CAT WOMAN, et le pire de tout - les hyènes dans L'EXORCISTE 4. Si la chose ne ressemble pas à ce qu'elle est réellement, alors tu pourrais aussi bien être en train de regarder un jeu vidéo - toute la magie est perdue." 

" Pour le pire cas d'image générée par ordinateur, voir la scène de surf dans la série des James Bond, DIE ANOTHER DAY. Le cinéma a été parcouru d'une marée de rires lorsque celle-ci est apparue, et a ruiné toute la crédibilité et le réalisme élaboré jusque là. En résumé, pratiquement toute réalité conçue par ordinateur insérée dans un film de nos jours (procédé à bas coût) est un pas dans la mauvaise  direction !" 

" Si vous m'interrogez, j'aimerais témoigner que le génie, l'imagination et l'inventivité pure de maîtres des effets spéciaux comme Tom SAVINI sur LE JOUR DES MORTS-VIVANTS, ou Rob BOTTIN sur THE THING, ou les étonnantes séquences d'animation de Phil TIPPETT et de ses collaborateurs de "la poursuite sur l'Etoile noire " ou "la bataille pour Hoth" ( scènes de la première trilogie de LA GUERRE DES ETOILES -ndr ), ou bien les réalisations de première classe ( des maquillages -ndr ) de Dick SMITH dans le style du PARRAIN et de L'EXORCISTE, ceux de Rick BAKER pour LE LOUP-GAROU DE LONDRES et HURLEMENTS (c'est en fait Rob BOTTIN qui fut le créateur des effets spéciaux de ce dernier - ndr), ou encore l'enchantement de la tête mécanisée de E.T. par Carlo RAMBALDI, ou même les cascades réelles d'un Vic ARMSTRONG sur LES AVENTURIERS DE L'ARCHE PERDUE et SUPERMAN, ainsi que les cascades défiant la mort de Jackie CHAN..., à l'idée qu'ils soient supplantés par les images générées par ordinateur ?... Remplacer tout cela (et bien d'autres tours de force accomplis par d'autres spécialistes de la vieille école) avec les morphings de l'image de synthèse est un crime caractérisé !"

"Il était une fois, il y a très longtemps, dans une lointaine galaxie"... bien avant que George LUCAS ne bascule du côté obscur... Une époque que les plus jeunes ne peuvent pas connaître, quand il y' avait encore de VRAIS films, alors qu'aujourd'hui, il n'y a plus que des avatars de dessins animés. 

 " Le problème vient de la trop grande utilisation des images de synthèse. Je dois dire que la nouvelle série de LA GUERRE DES ETOILES ne m'apparaît comme rien d'autre que des dessins animés. Il n'y a plus aucun sens du merveilleux - comment ils rendaient possible tel trucage, etc... et le savoir-faire des cascadeurs périclite à présent - les images de synthèse ont rendu les réalisateurs stupides." 

" La raison pour laquelle personnellement j'aime des films comme la série des INDIANA JONES et TERMINATOR 2 est que les cascadeurs sont étonnants et qu'on peut y apprécier leur talent. Or de nos jours, TOUT est possible et quand on regarde quelque chose comme les combats dans SPIDERMAN, on sait que pratiquement tout est fait par ordinateur (et on peut TOUJOURS se dire qu'il ne s'agit pas d'une vraie personne). Cela est incontournable. Maintenant et encore, certains films utilisent de vrais cascadeurs (il y'en a un peu dans DIE HARD 4) et cela me paraît loin quand les images de synthèse étaient utilisées parcimonieusement (THE ABYSS, WILLOW, des portions de TERMINATOR 2). Je suis un fan absolu de LA GUERRE DES ETOILES, mais je dois dire que je pense que l'image de synthèse fut la mort du label. George LUCAS a été trop accaparé par la technologie au détriment de l'histoire." 

" Je vois ce que tu veux dire. Mon idole David CRONENBERG a presque toujours refusé d'utiliser l'image de synthèse dans ses films, et ce sont des beaux trucages traditionnels - particulièrement dans les premiers. Il aime que ses acteurs aient quelque chose de réel avec quoi interagir. Je pense que la seule fois où il a utilisé l'image de synthèse était pour le petit lézard d'EXISTENZ, et bien qu'il ait été bien fait, cela paraît comme une anomalie dans le film." 

" Les images par ordinateur ont selon moi ruiné une génération, ou peut-être des générations, de spectateurs. Plus précisément, la perception de générations quant à ce que doit être un film ." 

" J'ai seulement 20 ans, je me souviens d'avoir regardé des films antérieurs aux images de synthèse (..). J'ai récemment été extrêmement irrité par des amis du même âge et des plus jeunes frères qui refusaient catégoriquement de regarder des films des années 1960 parce qu'ils ne comportaient pas d'images de synthèse. C'était exactement comme s'il s'était agi de films en noir et blanc, c'est honteux."

" Malheureusement, il y'a des gens qui veulent regarder seulement des films avec trucages par ordinateur et ne se soucient aucunement que ces films plus anciens soient des classiques, aient de grands sujets/distributions/bande musicale/suspense, etc... et aient gagné d'innombrables récompenses ou autres..."

" Mes plus jeunes frères ont refusé de regarder LES AVENTURIERS DE L'ARCHE PERDUE avec le reste de la famille à Noël parce que le film était sans images de synthèse. Sacrilège à la maison." 

 " Trucages sur la trilogie originale de LA GUERRE DES ETOILES = merveilleux. Trucages sur la nouvelle trilogie = consternants. Pourquoi ? Des modèles miniatures réels contre des images de synthèse qui semblent juste artificielles. C'est ce qui me vient immédiatement à l'esprit. ( .. ) Je suis d'accord qu'il y'a trop de tentation avec les images de synthèse. Aussi, on obtient des scènes qui tendent à être trop longues comme si quelqu'un criait "regarde... regarde nos images de synthèse, regarde comme nous sommes intelligent"."

Phil TIPPETT animant les machines de guerre de L'EMPIRE CONTRE-ATTAQUE ( 1981 ) pour la séquence de la bataille sur la planète gelée Hoth, avec une technique dérivée de celle employée par Ray HARRYHAUSEN. En dépit de la petite taille des maquettes, TIPPETT était parvenu à conférer à ces mécaniques titanesques une impression de lourdeur et de puissance qui les rendaient totalement convaincantes. 

"Les costumes en caoutchouc" ne sont pas un problème. Le travail de maquillage peut être très réussi. Comme toute chose, cela dépend de la manière dans on s'applique ou l'exécute. l' "Alien" original était aussi '" un costume en caoutchouc", mais il est généralement considéré comme un des concepts les plus époustouflants du cinéma de tous les temps. Je pense que certaines personnes s'autorisent à penser que tous les films faits avant TERMINATOR 2 doivent être moins que rien parce qu'ils n'ont pas d'effets par ordinateur en 3 dimensions. Alors qu'en réalité la plupart des meilleurs films ont été faits avant 1991. Cela m'incite à penser que les images par ordinateur marchent mieux quand elles sont utilisées par nécessité ou pour améliorer un rendu, mais que de toute manière, l'attention devrait se porter principalement sur la qualité du film envisagé dans son ensemble." 

" Ils ont refait beaucoup de films plus anciens en utilisant des images de synthèse mais dans pratiquement tous les cas, le film original était meilleur sans les images de synthèse en 3D." 

" Je pense que les images générées par ordinateur montrent leurs limites quand elles s'appliquent aux humains ou aux animaux. Nous avons des millions d'années d'évolution qui nous permettent de réaliser ce qui est réel ou faux dans le domaine des mouvements et expressions des humains et des animaux, etc..." 

 " Je pense que les pires exemples sont lorsqu'ils utilisent sans nécessité les images de synthèse - voir les mutants de JE SUIS UNE LEGENDE. Ils ont complètement anéanti le film pour moi, ils ne paraissent pas concrets, ils ne ressemblent pas à des acteurs qu'on pourrait rejoindre et toucher." 

" Même avec les dernières avancées des images de synthèse, c'est rarement complètement convaincant. Lorsque c'est utilisé, il apparaît trop manifestement que les personnes ou les objets ne se déplacent pas comme ils le devraient, aussi cela vous fait sortir du film. C'est aussi mauvais qu' essayer de regarder des films des années 1980 dans lesquels l'utilisation de doublures pour les cascades est trop évidente et gênante." 

 " UN COUP DE TONNERRE est un summum des images faites par ordinateur les moins chères et les pires pour une grosse production. Louez le DVD, vous serez stupéfiés de voir à quel point c'est ridicule, ruinant ce qui aurait pu être un bon film." 

 " Le Spiderman en image de synthèse fait vraiment trop dessin animé, c'est une des raison principale pour lesquelles je n'aime pas les films." 

"Les images de synthèse de LA GUERRE DES ETOILES sont un mélange hétérogène. Les batailles spatiales sont assez belles mais certains des personnages en images de synthèse sont juste désolants." 

 "Les images de synthèse ont tué JE SUIS UNE LEGENDE davantage que les écarts d'avec la véritable structure narrative du roman - l'œuvre de Richard MATHESON dont le film est tiré (ndr). Je veux dire que les mauvais font très faux). Leur apparition rend le film totalement faux et déplorable. Ils ne peuvent pas être pris au sérieux, il n'y a PAS LE MOINDRE sentiment de danger qui émane d'eux en raison de leur création par des images de synthèse. Si par contre ils avaient été conçus de la même façon que celle employée par George ROMERO - LE JOUR DES MORTS VIVANTS et les suites (ndr) - (maquillage de la vieille école) et Danny BOYLE dans 28 JOURS PLUS TARD, alors JE SUIS UNE LEGENDE aurait été un thriller plus ou moins acceptable ( indépendamment de la fidelité au roman d'origine) parce que les ennemis auraient paru réels."

"- Quelque soit la somme que tu investis dans la création d'images conçues par ordinateur, les monstres ressemblent toujours à des monstres virtuels. Avec des effets spéciaux physiques, je peux obtenir un monstre qui s'intègre mieux à la photographie mais aussi avec les acteurs."
Robert PRATTEN, réalisateur de films d'épouvante. 

Le créateur d'effets spéciaux Chris WALAS et le directeur de la photographie Mark IRWIN travaillant de concert pour mettre en valeur la créature transgénique de LA MOUCHE dirigée par David CRONENBERG; un monstre qui, n'en déplaise à James CAMERON, n'a rien, lui, d'un vulgaire "avatar" de synthèse... Ce dernier, avec son nouveau film bien nommé, encensé unanimement par les critiques officiels, s'est simplement offert le jeu de simulation le plus cher du monde; lorsqu'on songe aux extraordinaires décors et aux vrais spéciaux que la somme dépensée aurait permis de réaliser...

Concernant plus spécifiquement LA GUERRE DES ETOILES et les fans de la première heure : 

" Il y a beaucoup de choses que Lucas aimerait refaire dans la Guerre des Etoiles, mais je trouve dommage qu'il n'accepte pas les films tels qu'ils sont, avec leurs "défauts" (du moins à ses yeux). Je pense même qu'il doit faire ce qu'il faut pour que chaque nouvelle version remplace définitivement les anciennes. Elles n'existent sans doute déjà plus."(crainte tout à fait légitime, mais en fait elles viennent de sortir en DVD avec la nouvelle version alternative) 

 " C'est bien ça le problème : à chaque nouvelle "amélioration", il dénature un peu plus le film d'origine, et si ça continue à ce rythme, dans 20 ans, quand il nous servira la version def-de-def-c'est-promis-j'y-touche-plus, il nous restera quoi de la magie ? Déjà, vouloir à tout prix remplacer l'animatronique par de l'imagerie générée par ordinateur, ça me saoule, mais si en plus, il réécrit le scénario pour mieux intégrer sa "nouvelle" trilogie, où va-t-on ? Je me demande d'ailleurs ce que les héritiers de SHAW doivent penser d'une telle pratique. Parce que bon, on l'éjecte quand même gentiment d'un film mythique auquel il devait être particulièrement fier d'avoir participé. Et vu qu'il est un peu mort depuis 94, il ne peut plus y trouver grand chose à redire. Par pitié, que Lucas arrête de revisiter son œuvre, à force, il n'en restera plus rien."

" Ben heureusement qu'il n'avait pas assez de sous et que la technologie de l'époque n'était pas prête. Dans la vieille trilogie les acteurs jouent en partie devant des décors en carton pâtes réelles, avec des effets spéciaux à l'ancienne qui fonctionnent très bien. Ce qui a permis cette immersion c'est que les acteurs ne jouent pas devant un écran bleu, que les effets spéciaux sont "sales" donc réalistes sans parler des monstres pas mal du tout. Tandis que dans la nouvelle trilogie tout sonne faux, même les costumes et surtout les créatures non humaines....sans parler des acteurs (nuls mais c'est une autre histoire) qui ne sont pas aidés par l'absence de décor apparent avec les fond bleus."

" Mon pauvre vieux, que t'es t-il arrivé ? - J'ai été chez Dennis MURREN qui m'avait proposé une "remise en forme"; il m' a traité avec des produits de synthèse. A présent, je ne me reconnais plus.. - C'est vrai qu'il t'a salement arrangé !...

Le truculent Jabba tel que les spectateurs l'ont découvert initialement dans LE RETOUR DU JEDI. Les responsables de son animation n'avaient pas ménagé leur peine pour lui donner vie. Si les metteurs en scène contemporains estiment trop contraignant de tourner des séquences avec des effets spéciaux dont la mise en œuvre est complexe, qu'ils en laissent le soin, comme cela se pratiquait souvent, au réalisateur de la seconde équipe. Ou bien alors qu'ils aillent effectuer des tâches administratives dans un bureau, il y' aurait sûrement bien des amateurs de fantastique qui seraient prêts à prendre leur place sans regimber, même si le tournage avec certains effets spéciaux s'avère parfois fastidieux !...

" Je trouve la phrase de mon prédécesseur excellente "Finalement chaque nouvelle version est comme un lifting: c'est plus lisse et ça perd en charme." S'il veut casser l'ancienne trilogie pour la rendre aussi insipide que l'actuelle, c'est très dommage car l'ancienne était vraiment réussie. Ce n'est d'ailleurs pas ma mémoire qui l'embellit. Au moment de la sortie du premier film de la nouvelle trilogie j'avais revu l'ancienne trilogie. Sinon à propos de "Lucas"; rien ne dit qu'il voulait à l'époque faire comme il dit maintenant. Je pense qu'il a mal tourné comme VAN HAMME pour la BD. La différence c'est qu'il n'a quasiment fait qu'un type de film. A ce propos quand on regarde "THX 1138" on est à des années lumière du clean, gnangan et politiquement correct actuel de sa nouvelle trilogie." (source: http://www.geekzone.fr/ipb/index.php?showtopic=15998&st=30 )


" Bien qu'il ne s'agisse pas véritablement d'un chef-d'œuvre, notamment à cause des séquences décevantes du dénouement - plus particulièrement avec une fin survenant de manière trop abrupte, LE LOUP-GAROU DE LONDRES est certainement un des meilleurs films de loups-garous de tous les temps. Il possède une histoire prenante avec une vraie atmosphère, interprétée par des acteurs appréciables, employant de superbes trucages d'avant le virtuel qui n'ont pas vieilli. La scène de transformation reste la meilleure scène de transformation d'homme en loup pour la majeure partie des amateurs - voire sa hideuse suite de 1997 AN AMERICAN WEREWOLF IN PARIS."

Le Loup-Garou de Londres a du mordant; c'est quand même autre chose que du virtuel...

" Quel est l'un des films les plus effrayants que les gens disent avoir jamais vu? LES DENTS DE LA MER (1975) et seulement parce que l'énorme requin mécanique était si réaliste, j'ai été horrifié de voit ce gars étant entièrement dévoré par lui. Le requin mécanique « pas très avancé sur le plan technologique » était si bien conçu que j'avais complètement oublié qu'il était, en réalité, un robot."

( source : http://www.lovehatemedia.com/is-cgi-ruining-film )

"- Bien sûr, ils peuvent, comme annoncé, refaire THE THING en utilisant des images de synthèse pour créer ce qui était presque arrivé à bout des forces de l'artisan, mais ce ne serait pas la même chose. Aucun monstre soigné ne pourra se mesurer avec ce que Bottin fit avec du sang, de la sueur et beaucoup d'ingéniosité. C'est pourquoi même en son absence, Rob Bottin demeure inégalé. Il est le modèle que rien ne peut imiter - ou remplacer." —Bill GIBRON 

 " Je me souviens d'avoir été époustouflé au regard du travail exécuté par Bottin sur HURLEMENT. J'avais treize ans à l'époque et tout ce que je pouvais dire était à quel point les loups-garous étaient remarquables et quant aux transformations!! Je n'avais jamais vu quelque chose comme cela. Ces effets de la vieille école étaient vraiment comme un tour de magie à l'époque. De nos jours avec les effets conçus par ordinateur, nous ne sommes jamais impressionnés parce que c'est devenu banalement courant. Je peux aller sur n'importe quelle chaîne et je vois toujours la même daube virtuelle surexploitée dans chaque publicité. Ah.. BOTTIN et BAKER sont toujours mes héros." 

 " L'industrie du cinéma s'est appauvrie en n'ayant plus quelqu'un comme Rob BOTTIN. Ah, nous connaissons tous les fanfaronnades sur les merveilles des trucages virtuels qui peuvent réaliser "tout ce que l'imagination conçoit". Maintenant, nous avons toujours ce même genre de Dinosaures, de Robots et de trucages pauvrement conçus année après année. Auparavant, nous avions de l'imagination avec des trucages basés sur des moyens limités et maintenant nous avons tristement l'inverse, avec des moyens illimités et pas d'imagination. On ne nous a pas donné à voir de loup-garou virtuel se rapprochant du travail de BOTTIN sur HURLEMENT et assurément nous n'avons rien vu d'aussi inventif avec les effets par ordinateur que son travail sur THE THING. Compte tenu de son âge d'alors et des budgets réduits, je suis toujours impressionné par la qualité de ses premières réalisations comme ses costumes pour LES MONSTRES DE LA MER. J'ai toujours souhaité qu'ils aient engagé Rob pour créer les costumes de LA CREATURE DU MARAIS de Wes CRAVEN de triste mémoire, parce que je sais qu'il aurait pu rendre justice aux créations et aux personnages inventés par Bernie WRIGHTSON." 

 " Peut-être que Rob (BOTTIN - ndr) est une autre victime des effets numériques. La dernière fois que j'ai vu Steve JOHNSON - il y' a quelques années à la première de SCI-FI BOYS - il a dit qu'il quittait le domaine parce que, si je me souviens bien, son genre de création était remplacé par l'ordinateur. Le très talentueux Lyle CONWAY (il a été congédié d'UN CRI DANS L'OCEAN en même temps que Rob BOTTIN - ndr) n'a plus rien fait dans sa discipline depuis quelques années. Par ailleurs, tous ces gens prennent de l'âge. Il y a une polarisation sur l'âge dans l'industrie du cinéma et la volonté générale de promouvoir les images par ordinateur renforce le problème."

( source : http://www.popmatters.com/pm/post/rob-bottin-rocks/#comments ) "- Si jamais il font le remake, j'espère réellement qu'ils utiliseront de vrais effets spéciaux au lieu des trucages virtuels. Les effets par ordinateurs me paraissent toujours si faux."

( source : http://www.monstershack.net/sp/index.php/the-thing-1982/ )

Le réalisateur John CARPENTER : "Laissez-moi sortir, je veux réaliser des films sans trucages virtuels !.."

Un autre internaute rétorque (forum www.gamefaqs.com) à un commentateur bien-pensant qui démontre son manque de considération pour ceux qui osent contredire le credo (J'espère que (sa détestation du virtuel) est un sarcasme, étant donné qu'un tel niveau d'ignorance est ridicule. Les images de synthèse libèrent la créativité du monde réel) :

" Si je me réfère aux films d'horreur, je déteste réellement l'imagerie virtuelle. Je ne discute pas de combien de temps et d'efforts sont nécessaires pour faire une scène virtuelle, mais passons. Le style d'effets spéciaux de la vieille école et le vrai « gore » ( trucages sanglants - ndr ) était bien meilleur. Personnellement, les images numériques me paraissent toujours si factices et irréalistes. Cela ne me semble pas réel avec son côté policé et clinquant. C'est une honte que les films oublient les vrais trucages, l'animation image par image, et toute la méthode traditionnelle de faire les choses. Je pense absolument que THE THING de John CARPENTER est toujours convaincant aujourd'hui et que ce sont les effets spéciaux qui rendent convaincant le film. Je suis désolé, mais s'il avait été fait avec l'imagerie virtuelle, il n'aurait pas été le même.

Et je ne crois réellement pas que ce qu'on fait par ordinateur n'aurait pu être réalisé avec de vrais effets spéciaux et de l'animation image par image. Si nous n'avions pas les images numériques, je ne peux que songer au niveau des effets spéciaux physiques et de l'animation image par image auquel nous serions parvenus à présent."

* Même si Ray HARRYHAUSEN a tiré un trait sur sa carrière, il serait peut-être, même encore aujourd'hui, ravi de superviser une équipe d'animateurs s'inspirant de son travail; mais l'industrie du cinéma ne paraît pas décidée à lui offrir le plaisir de pouvoir voir à l'écran un de ses projets non financés réalisé avec ses techniques.

PS : n'hésitez pas à laisser des commentaires pour démontrer que les Anglo-saxons ne sont pas les seuls à cultiver la liberté d'esprit contre les conformismes...