Il y a trente ans sortait sur les écrans un film de science-fiction et d'épouvante qui faisait pratiquement l'unanimité des critiques contre lui, ceux-là n'y décelant qu'une oeuvre de commande ennuyeuse et sans âme ; nous fûmes alors bien peu à estimer que THE THING de John CARPENTER (LA CHOSE en version française) était un chef-d'œuvre, appelé immanquablement à devenir un futur classique. Trente ans plus tard, la réussite du film n'est plus contestée par personne. Retour sur cette œuvre dorénavant incontournable du cinéma.
Aux origines de la "Chose"
A l'origine se trouve la nouvelle de John CAMPBELL, LA BÊTE D'UN AUTRE MONDE (WHO GOES THERE ?) publiée en 1938 sous le pseudonyme de Don A. STUART, inspiré du nom de sa première épouse. Auteur de romans de space-opéras, ainsi que de nouvelles réputées comme CRÉPUSCULE (TWILIGHT), LE CIEL EST MORT ( NIGHT ) et SUICIDE (DEAD KNOWLEDGE), son nom est cependant principalement mentionné dans les ouvrages de science-fiction français au seul regard de la longue période durant laquelle il dirigea une des principales revues de science-fiction, "Astounding stories", de 1937 jusqu'à sa disparition en 1971, veillant à obtenir toujours la meilleure qualité pour les textes des auteurs publiés, et ayant accompagné les débuts de nombre d'écrivains célèbres du genre.
WHO GOES THERE ? est ainsi l'un de ses derniers textes, écrit à la fin de 1937, un huis-clos terrifiant en Antarctique au sein d'une station de recherches scientifiques dont les membres réalisent, après la découverte d'un engin spatial extraterrestre très ancien enfoui dans la glace et l'exhumation de son occupant, que la créature étrangère revenue à la vie a infiltré leur base et que certains d'entre eux ne sont peut-être que des répliques s'étant substituées aux résidents.
Célèbre restitution de l'extraterrestre de LA BÊTE D'UN AUTRE MONDE par George BARR, une interprétation possible qui suit fidèlement la description de la novella (blog de l'artiste : http://enchanted-thingamajig.blogspot.fr)
Premier essai d'après guerre
Howard HAWKS, qui devait notamment réaliser des westerns réputés - et qui est considéré par John CARPENTER comme son modèle - manifesta un vif intérêt pour l'adaptation de la nouvelle de John CAMPBELL dès sa lecture en 1948. Le projet prit un certain temps à se concrétiser.
Le film LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE (THE THING FROM ANOTHER WORLD) dirigé en 1951 par Christian NIBY et supervisé par Howard HAWKS, est l'un des tous premiers à mettre en scène un extraterrestre et s'est imposé comme un classique de la science-fiction. Introduit par une musique particulièrement inquiétante de Dimitri TIOMKIN, il dépeint sans temps mort la manière par laquelle l'inquiétude s'empare de la base dans laquelle rôde un être venu d'une autre planète, et en tant que tel se regarde avec plaisir.
Il peut cependant s'avérer relativement décevant si on le rapporte à la nouvelle dont il s'est inspiré. D'une part, l'intrigue, dont le cadre a été déplacé de l'Antarctique au Pôle Nord, s'éloigne fortement du récit initial sur lequel il se base officiellement, puisque la créature est dépourvue de la propriété de s'emparer de l'apparence de ses victimes, et des tensions entre militaires et scientifiques aux intérêts divergents se substituent au climat de paranoïa généralisée de la nouvelle dans laquelle chacun suspecte les autres de ne pas être réellement humains.
D'autre part, même si au début des années 1950, tous les extraterrestres du cinéma étaient humanoïdes et la plupart du temps semblables en tous points à des humains, les lecteurs de la nouvelle peuvent trouver frustrant que la créature tentaculaire soit remplacée par un clone du Monstre de Frankenstein, particulièrement lorsqu'on sait qu'initialement, l'apparence de la créature devait retranscrire fidèlement la morphologie esquissée par l'écrivain, conformément au scénario originel de Ben HECHT. Un costume mécanisé avait été construit sous l'égide d'un spécialiste des studios Disney, Harper GOFF (concepteur du Nautilus de l'adaptation de VINGT MILLE LIEUES SOUS LES MERS/TWENTY THOUSAND LEAGUES UNDER THE SEA) à destination d'un manchot, de manière à retrouver l'apparence de l'être semi-humanoïde à trois yeux, pourvu de quatre longs bras tentaculaires, et un essai fut même filmé. Le résultat fut si concluant que les responsables du studio l'estimèrent trop terrifiant pour le public et décidèrent donc paradoxalement de ne pas l'utiliser - crime suprême, la totalité du matériel relatif à ce projet aurait finalement été détruite, causant la perte irrémédiable d'une page de l'histoire du cinéma de science-fiction et de l'histoire des effets spéciaux.
Harper GOFF envisagea alors le concept d'un genre d'araignée géante, mais ce concept alternatif pour l'extraterrestre ne dépassa pas quant à lui le stade du dessin. Ray HARRYAUSEN, le grand créateur de monstres animés image par image, proposa de son côté sa version de Martien tentaculé inspiré de la description d'Herbert George WELLS, qu'il avait élaborée pour son projet d'adaptation du roman LA GUERRE DES MONDES (THE WAR OF THE WORLDS), dont il n'avait pu obtenir le financement, antérieurement à la version finalement produite par George PAL, mais le studio RKO déclina son offre.
A la place du petit monstre tentaculé décrit par John CAMPBELL, les hommes découvrent derrière la porte un colosse humanoïde à l'apparence assez familière pour ceux qui connaissent la célèbre créature imaginée par Mary SHELLEY.
Howard HAWKS décida alors de faire simplement incarner le monstre par un acteur de grande taille, James ARNESS, et confia au maquilleur Lee GREENWAY le soin de lui conférer une apparence patibulaire. GREENWAY proposa de nombreuses versions, gonflant les joues, effaçant les sourcils ou au contraire les hypertrophiant à la manière des futurs Vulcains ou des Klingons de STAR TREK, mais aucune ne satisfît HAWKS et celui-ci lui demanda finalement de concevoir un maquillage proche de celui du Monstre de FRANKENSTEIN. L'étrangeté de la créature provient donc moins de son aspect que de sa nature, l'extraterrestre étant présenté comme une "forme de vie végétale"; le visage de James ARNESS fut d'ailleurs peint en vert, ce qui passa inaperçu aux yeux des spectateurs de l'époque, le film étant en noir et blanc. Ses propriétés ne sont pas de nature si incontestablement végétales, la créature se nourrissant de sang humain au lieu de pratiquer la photosynthèse, et sa capacité de régénération étant en fait assez répandue dans le règne animal lui-même, mais la progéniture débute sous une forme germinative rappelant des crocus. Le seul rapport de l'entité avec celle de la nouvelle d'origine est que l'extraterrestre à la peau bleutée de CAMPBELL est dépeint comme ayant le sang vert, mais cependant sans que jamais cette coloration soit assimilée à de la sève végétale. Le film de NIBY, qui ajoute une romance alors qu'aucun personnage féminin n'était présent dans LA BÊTE D'UN AUTRE MONDE, s'écarte finalement tellement de l'œuvre initiale qu'implicitement aucun protagoniste ne porte le nom d'un personnage de la nouvelle de John CAMPBELL.
A défaut de l'extraterrestre extraordinaire conçu par Harper GOFF, le maquilleur Lee GREENWAY proposa brièvement ce faciès aux traits minimalistes s'écartant fortement de la physionomie humaine, avant d'être amené à se limiter à des variations moins radicales d'un visage.
Aussi, en dépit de la révérence qui entoure LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE, la tentation de mettre en œuvre un remake qui, tout en lui rendant hommage, reviendrait à davantage de fidélité pour le récit initial, commença à occuper les esprits. Le célèbre producteur et réalisateur de films de science-fiction George PAL, producteur de LA GUERRE DES MONDES et lui-même réalisateur de LA MACHINE A EXPLORER LE TEMPS (THE TIME MACHINE), envisagea un temps d'adapter ce classique de la littérature de science-fiction, en 1970. L'animation image par image fut envisagée pour donner vie à la créature, en lui restituant l'apparence que lui avait conférée l'écrivain, au travers du recrutement d'un disciple de Ray HARRYHAUSEN, l'animateur Jim DANFORTH, mais le projet n'aboutit pas.
La créature extraterrestre revue par le crayon de Jim DANFORTH.
L'animateur se retrouvera une dizaine d'années plus tard engagé sur le remake de John CARPENTER mais alors très occupé par son projet de monter sa propre compagnie, ne contribuera en rien à donner vie au monstre, sa participation se limitant à la peinture sur verre du globe terrestre utilisée pour la séquence d'ouverture du film.
Le jeune producteur de télévision Stuart COHEN avait été marqué par la lecture de la nouvelle de John CAMPBELL à l'âge de douze ans, au point d'en perdre temporairement le sommeil, et, après en avoir discuté en 1975 à la cafétéria universitaire avec John CARPENTER, lequel achevait ses études de cinéma et lui confirma l'intérêt de l'œuvre que le scénariste Dan O'BANNON lui avait faire redécouvrir, entreprit de partir à la recherche des droits d'adaptation. Celle-ci fut assez compliquée à mener, nécessitant de remonter la piste de différents agents successivement détenteurs des droits, le dernier, John PTAK, devenu producteur, avait finalement transmis le projet aux scénaristes Hal BARWOOD et Matthew ROBBINS (lesquels se firent notamment connaître pour le scénario du DRAGON DU LAC DE FEU (DRAGONSLAYER), réalisé en 1981 par le second et produit par le premier) mais leur projet demeura au point mort.
Percevant l'ampleur du projet, Stuart COHEN décida de se mettre également en quête d'associés. En 1976, il fait la connaissance du producteur David FOSTER lors d'une réception chez un ami commun et lui confie son désir de produire un film pour le cinéma. Celui-ci lui propose de revenir le voir pour lui parler de son projet. Stuart COHEN lui présente à leur seconde rencontre un livre sur une histoire qui se passe en Amérique du sud avec des insectes, mais la lecture du livre ne convainc pas le producteur. Incité néanmoins à poursuivre leurs échanges, Stuart COHEN entreprend alors à sa visite suivante de lui faire part de son souhait d'adapter WHO GOES THERE ?, FOSTER, ayant toujours été lui-même un partisan résolu de la nouvelle, lui donne immédiatement son accord, et propose que sa propre société, Turman-Foster Company, sollicite le soutien d'un grand studio, Universal. Son président, Ned TANEN, dont FOSTER avait fait la connaissance à une époque où celui-ci débutait à un poste modeste, soutient le projet des deux hommes.
Les trois hommes sans lesquels THE THING n'aurait pas existé : de gauche à droite, l'initiateur du projet, le producteur de télévision Stuart COHEN; David FOSTER, le producteur indépendant qui l'a soutenu ; Ned TANEN, le dirigeant d'Universal de l'époque, qui a apporté au projet le financement d'une grande compagnie.
Pour mettre en œuvre l'entreprise, Universal rachète les droits d'adaptation de la nouvelle de John CAMPBELL à ROBBINS et BARWOOD. Afin d'éviter tout problème juridique, Stuart COHEN négocie également les droits associés au film original de Christian NIBY auprès de Wilbur STARK, détenteur des droits des films de la R.K.O., bien qu'il ne s'agisse pas réellement d'un remake. Au départ prompt à proposer les droits de d'autres films, car rechignant à se défaire de ceux de LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE dont il estime le potentiel commercial important, Wilbur STARK se laisse finalement convaincre par un arrangement, obtenant le statut de "producteur exécutif".
Le projet peut alors réellement débuter. Se souvenant que John CARPENTER avait manifesté un certain intérêt pour réaliser le film, Stuart COHEN, qui a convaincu ses partenaires Lawrence TURMAN et David FOSTER de la justesse de son choix, propose son nom au dirigeant d'Universal, mais Ned TANEN décline la perspective de confier un film ambitieux à un metteur en scène débutant, n'ayant surtout à son actif qu'une comédie de science-fiction tournée par des étudiants, DARK STAR, et ASSAUT (ASSAULT ON PRECINCT 13), un film d'action, et affiche sa préférence pour Tobe HOOPER, qui a fait frémir les salles avec MASSACRE A LA TRONÇONNEUSE (THE TEXAS CHAINSAW MASSACRE) et a souscrit un partenariat avec le studio. HOOPER et son scénariste Kim HENKEL signent un contrat de 18 mois avec Universal pour développer le projet. Leur enthousiasme initial décroît à la lecture de la nouvelle. Le doute sur l'identité réelle des personnages au cœur de l'intrigue de la nouvelle ne leur paraît pas être un angle véritablement digne d'intérêt, de même que tout ce qui a trait à la manière dont la créature s'empare de ses victimes et se substitue à elles ainsi que les incidences de ce processus sur la construction de l'histoire et le climat du film. Doutant de pouvoir tirer un film efficace de l'histoire, HOOPER et HENKEL se proposent de la modifier notablement, pour en tirer un parti plus spectaculaire, en prévoyant nombre de scènes se passant sur la glace avec des poursuites, comme au moins une partie des producteurs semblaient le souhaiter. Stuart COHEN considère que leur vision s'apparente plutôt à un sorte de MOBY DICK hermétique, imprégnée du langage et de la culture des états du sud des Etats-Unis, confrontant dans un face à face homérique un homme inspiré d'Achab et un monstre de grande taille. La capacité de la créature à modifier son apparence était donc à nouveau abandonnée, comme dans la première "adaptation" de 1951. Stuart COHEN, tout particulièrement, se montre déçu par l'écart d'avec le récit de CAMPBELL et aucun producteur n'étant convaincu par la direction proposée par Tobe HOOPER et Kim HENKEL, tandis que ces deux derniers affichent quant à eux leur intérêt pour d'autres projets, la collaboration n'est pas renouvelée au terme des 18 mois, d'un commun accord. Après une éphémère rencontre avec le réalisateur John LANDIS, restée sans suite, la production s'attache à donner au projet un nouveau point de départ.
Trois scénaristes qui se sont succédés sur le projet THE THING sans remporter l'adhésion des producteurs : Kim HENKEL ( en haut à gauche ), premier engagé en même temps que son partenaire, le réalisateur Tobe HOOPER, puis David WILTSE ( à droite ), et enfin William F. NOLAN ( en bas ).
La tentation d'une créature plus abstraite
La créature extraterrestre est très concrète dans la novella de John W. CAMPBELL en dépit de sa capacité de sublimation (passage à un état gazeux brièvement évoqué) mais les premières tentatives d'adaptations sous l'égide des studios Universal tendirent à s'écarter de cette direction. HOOPER et HENKEL avaient en 1977 opté pour une entité assez immatérielle, une forme composée de fumée, qui infectait ses victimes en secrétant un fluide bleu et les agglomérait en un ensemble gélatineux, laissant penser à John Carpenter que ce scénario avait pu inspirer ultérieurement le film LEVIATHAN.
Un écrivain et scénariste collaborant régulièrement avec le studio, David WILTSE, réécrit l'histoire à la demande de David FOSTER, mais, désireux d'y instiller ses propres idées, demeure encore très loin de la nouvelle originelle. La créature devient une entité abstraite, se présentant comme une forme pyramidale de lumière bleue iridescente flottant au dessus de la glace, entourant sa victime avant de se fondre en elle.
Le succès de l'AGE DE CRISTAL (LOGAN'S RUN), film de 1976 de Michael ANDERSON, tiré du roman homonyme de William F. NOLAN, incite les producteurs à faire appel aux services de l'écrivain, qui connaît bien la nouvelle de John CAMPBELL, et a sa propre conception du traitement cinématographique qu'il convient de lui appliquer. Dans son synopsis, l'entité extraterrestre s'empare des explorateurs et s'attache à faire disparaître les traces de son vaisseau spatial. MacReady commence à suspecter quelque chose d'anormal alors que divers membres de la station sont portés absents sous des prétextes divers, notamment ceux partis à la base MacMurdo, ce qui s'avère invérifiable, la radio ne fonctionnant plus, et se convainc que la reconnaissance avait bien mis à jour une importante découverte en dépit des dénégations. Se rendant sur le site, il n'y trouve qu'un débris calciné, lequel suffit cependant pour le persuader qu'il s'agit d'un métal inconnu sur terre et que l'objet dont il provient ne peut ainsi être un appareil soviétique. La dépouille totalement ramollie d'un collègue est aussi découverte et mise en isolement, sans que Blair ne puisse indiquer la cause de la mort. Des tunnels creusés sous la station sont finalement repérés. Il apparaît que Blair et d'autres membres de l'expédition, dont les yeux brillent parfois pour laisser transparaître une étrange lueur jaune, ont éliminé certains collègues qui avaient surpris leurs agissements, ayant été investis par des extraterrestres désireux de récupérer un gigantesque engin spatial échoué dans la glace il y a des millions d'années sur le site sur lequel la station de recherches a été édifiée. MacReady détruit le dôme renfermant la cabine de pilotage et, tandis que les extraterrestres meurent, quitte l'engin précipitamment afin d'échapper à son autodestruction. Il a le temps de décoller en hélicoptère avec la dernière survivante de la base avant que le sol ne soit soufflé par l'énorme explosion.
De fines vrilles jaunes extraterrestre investissent les corps d'hommes et de femmes, portant l'altérité au sein même des couples : cette image du remake de l'INVASION DES PROFANATEURS (BODY SNATCHERS) d'Abel FERRARA aurait pu tout autant être portée à l'écran à partir du scénario non retenu écrit pour THE THING par William NOLAN.
Lors de la dernière apparition des créatures extraterrestres, au sein du poste de pilotage, leur vraie forme est révélée. Il s'agit de créatures humanoïdes, quoique différant notablement par leur morphologie de notre espèce sans que davantage de précision soit apportée. Cependant, ces êtres irradient une forte lueur interne et il est manifeste que leur corps est principalement composé d'énergie, ce qui leur permet de changer de forme en investissant un corps humain sous forme de tentacules lumineux dépeints comme des vrilles. Si le script de William NOLAN évoque quelque peu LE MÉTÉORE DE LA NUIT (IT CAME FROM OUTER SPACE) de 1953 avec le vaisseau en perdition et la paranoïa suscitée par les extraterrestres ayant pris apparence humaine, celui-ci évoque aussi incidemment par l'introduction de personnages féminins absents de la nouvelle originelle la difficulté relationnelle de couple du remake de L'INVASION DES PROFANATEURS (INVASION OF THE BODY SBATCHERS) de 1978 par Philip KAUFMAN basé sur le roman de Jack FINNEY. Anecdotiquement, le script comporte aussi des éléments qu'on trouvera dans des films ultérieurs : les vrilles - terme emprunté au végétal - filiformes et très mobiles qui, comme celles des cosses du second remake de L'INVASION DES PROFANATEURS mis en scène par Abel FERRARA, inspiré par le même roman, transforment leur proie en un corps flasque - dans le film de John CARPENTER, les corps sont totalement absorbés par la masse tentaculaire gluante ; les humanoïdes lumineux venus rechercher les leurs se retrouveront dans COCOON, l'épilogue avec l'explosion du gigantesque engin spatial enfoui dans la glace antarctique recouvre celui du film X-FILES.
Malgré l'intérêt de William NOLAN pour le texte de CAMPBELL, sa version, tout en s'y rapportant davantage que les essais précédents, s'en éloigne encore quelque peu, et le résultat ne convainc pas réellement les producteurs, notamment Stuart COHEN, qui sent toujours qu'une partie du classique de John CAMPBELL est laissée de côté. Ce troisième échec contribue à émousser fortement l'intérêt du studio, et le projet commence à prendre le même chemin que beaucoup d'autres qui n'aboutissent jamais. C'est alors que le succès commercial du film ALIEN de Ridley SCOTT démontre qu'un grand film de monstre peut représenter un bon investissement, et le tandem Stuart COHEN et David FOSTER n'a pas de difficulté à convaincre les responsables du studio Universal qu'ils ont déjà à leur disposition un sujet ayant les mêmes potentialités qu'ALIEN.
Le recrutement des maîtres d'œuvre adéquats
Stuart COHEN profite de l'entrain pour son projet pour proposer comme réalisateur le nom de son camarade John CARPENTER, auquel le succès d'HALLOWEEN, film terrifiant sur un tueur masqué (c'est le réalisateur qui avait eu l'idée de situer l'histoire au moment de la fête d'Halloween pour en tirer un climat plus angoissant) confère un crédit certain en matière de films d'épouvante. Cependant, le studio demeure encore réticent. Les critiques étrangères très favorables du film confirment finalement que le jeune cinéaste est capable, comme pour ASSAUT, de susciter l'adhésion hors des États-Unis - à la différence de certaines de leurs comédies qui n'ont pas marché à l'étranger - et les producteurs entrevoient alors la possibilité qu'un long métrage puisse doubler les recettes lors de sa distribution en Europe, approuvant le choix de Stuart COHEN qui achève de les persuader en arguant à l'appui des échecs précédents que seul son ami est capable de mener à bien le projet. Entre-temps, John CARPENTER a contracté un partenariat avec Universal, mais il est déjà requis pour diriger un western, et son contrat prévoit pour sa réalisation une somme supérieure à celle qu'on lui propose pour à la fois écrire le scénario et réaliser la nouvelle mouture de THE THING. De plus, on peut imaginer que le cinéaste est dorénavant sans doute un peu moins empressé de donner suite à la demande de producteurs qui l'ont déjà écarté à plusieurs reprises et il propose de se consacrer au remake de THE THING ultérieurement. Le nom du réalisateur Sam PECKINPAH, spécialiste des films à la violence ultra-réaliste, est un temps cité en remplacement mais, au grand soulagement de Stuart COHEN, l'abandon par le studio du projet de western EL DIABLO conduit à ce que John CARPENTER soit enfin officiellement engagé sur THE THING ; cependant, le réalisateur, très occupé et appréhendant les difficultés d'adaptation confirmées par les essais infructueux successifs, obtient de ne pas écrire le scénario.
John CARPENTER avait déjà mis en scène un tueur implacable dans HALLOWEEN, un groupe de spectres vengeurs dans THE FOG et une horde effroyable de voyous dans ASSAUT (ASSAULT ON PRECINCT 13 ), il était donc particulièrement qualifié pour conférer toute sa force d'épouvante à une nouvelle incarnation du mal, l'extraterrestre qui terrifie une station polaire en montant ses occupants les uns contre les autres.
Le choix d'un scénariste s'avéra quant à lui plus difficile que jamais. Le célèbre écrivain Richard MATHESON refusa sèchement toute discussion au sujet du projet, et son agent assura même qu'il n'accepterait jamais d'être associé à un film intutilé "LA CHOSE"! Le Britannique Nigel KNEALE, à qui ont devait notamment l'idée des extraterrestres monstrueux des classiques LE MONSTRE (QUATERMASS XPERIMENT) et LA MARQUE (ENEMY FROM SPACE/QUATERMASS 2/EARTH AGAINST SATELLITE) fut envisagé, mais l'éloignement amena la production à repousser cette proposition. Nombre de scénaristes pressentis déclinèrent l'offre sans dissimuler, à l'instar de MATHESON, leur manque d'intérêt pour le projet en estimant que le sujet relevait d'un genre de science-fiction totalement dépassé...
John CARPENTER et Stuart COHEN décident alors d'opter pour le choix audacieux d'engager un quasi-novice, Bill LANCASTER, fils du fameux acteur Burt LANCASTER, qui n'avait signé que le scénario d'une comédie sur le base-ball, BAD NEW BEARS, pour lequel lui avait été décerné en 1977 par la profession le prix du scénario le plus original pour une comédie, supputant qu'il puisse porter un regard neuf sur le défi d'adapter la nouvelle. Le jeune homme remporte le pari, en évitant, au contraire de ses prédécesseurs, de consacrer trop de temps à l'exposition de la personnalité des personnages et de leur fonction dans la station, et en ayant l'idée de faire découvrir l'intrigue au travers des Américains qui s'aperçoivent que le péril qui les menace a déjà entraîné la destruction de la base norvégienne située à proximité - procédé similaire à celui d'ALIEN avec l'épave extraterrestre (voir l'article "Retour annoncé de deux grands monstres*"). De surcroît, le caractère répétitif de la situation confère un caractère de tragédie annoncée au film. Bill LANCASTER conserve la scène centrale du test sanguin - qui constituait le point primordial d'intérêt de John CARPENTER - tout en la simplifiant et réduit aussi le nombre de personnages de 37 à douze pour une meilleure compréhension de l'intrigue. De la même manière, le scénariste, s'il conserve à l'entité extraterrestre sa capacité de prendre l'apparence de ses victimes, élimine sa faculté télépathique ainsi que son aptitude à se changer en vapeur par sublimation, à la fois pour clarifier les bases de l'intrigue et pour éviter que la créature n'apparaisse à l'écran invulnérable au point de faire douter le spectateur de la possibilité pour les hommes de pouvoir l'affronter. Les trente pages de scénario, correspondant aux trente premières minutes du film, reçoivent l'assentiment général, à commencer par le réalisateur qui achève le montage de THE FOG. Le scénariste s'attelle alors à l'écriture du scénario complet, long processus que validera régulièrement John CARPENTER, lisant son travail entre deux prises sur le tournage de son film suivant, NEW-YORK 1997 (ESCAPE FROM NEW-YORK).
La conceptualisation de la créature
Si le scénario de Bill LANCASTER parvient à retranscrire l'angoisse qui gagne les membres de la station devant le péril inconnu, il est par contre assez peu précis en ce qui concerne l'aspect de la créature elle-même. Comme dans la nouvelle, les personnages dont la vraie nature est percée à jour perdent leur apparence humaine, se mettent à fondre, des griffes leur poussent, etc... Cependant, Bill LANCASTER ne dépeint jamais réellement la forme de vie extraterrestre elle-même, à la différence de CAMPBELL qui l'esquissait à grands traits sous forme de créature bleutée aux trois yeux rouges, se contentant d'écrire qu'à la fin, cernée par les hommes, elle se lance à l'assaut de la station, dévastant tout sur son passage, en adoptant une forme monstrueuse, la plus puissante qu'elle ait jamais empruntée, énorme masse pourvue de pattes arachnéennes. C'est donc au responsable des effets spéciaux qu'il va incomber de préciser l'apparence du monstre.
Le grand maquilleur Rick BAKER étant déjà retenu par LE LOUP-GAROU DE LONDRES (AMERICAN WEREWOLF IN LONDON), John CARPENTER proposa la candidature du jeune Rob BOTTIN, qu'il avait connu sur THE FOG. Grand admirateur d'HALLOWEEN, celui ci avait pu s'introduire sur la préparation du film d'épouvante grâce au directeur de la photographie Dean CUNDEY avec lequel il avait déjà travaillé sur ROCK' N' ROLL HIGH SCHOOL - film pour lequel il avait conçu en presque une nuit un costume de rat géant - et avait demandé à CARPENTER si THE FOG comportait un personnage terrifiant comme HALLOWEEN, ce à quoi le réalisateur aurait répondu par la négative avant de se raviser en remarquant la grande taille de l'inconnu et de l'engager pour interpréter le rôle de Blake, le chef des spectres. Mais le jeune maquilleur répondit à John CARPENTER qui lui proposait de le rejoindre sur son nouveau projet qu'il se sentait un peu trop intimidé pour travailler avec un aussi grand studio qu'Universal, et que de surcroît la charge de concevoir cinq grandes séquences d'effets spéciaux lui paraissait une tâche d'une trop grande ampleur alors que la transformation d'un homme en loup-garou dans HURLEMENTS (THE HOWLING) avait déjà occupé à temps plein son équipe d'une dizaine de personnes.
Indépendamment des principaux initiateurs du projet, des cadres du studio ont effectué au début de l'année 1981 une consultation de différents illustrateurs réputés comme Tom KIDD - célèbre dessinateur et peintre connu notamment pour avoir illustré une des rééditions de LA GUERRE DES MONDES d'H.G. WELLS - et Pat ORTEGA, une artiste du Muséum d'histoire naturelle de Los Angeles spécialisée dans la représentation scientifique d'animaux et la reconstitution d'espèces disparues, afin d'envisager l'apparence de la créature. La
proposition de cette dernière (en bas) explore le même concept d'être composite qui était à
peine suggéré dans la novella d'origine que celui développé par
Rob Bottin, à savoir la possibilité pour la créature de présenter
simultanément divers emprunts à ses précédentes incarnations,
notamment une patte de chien et une autre de vache ainsi qu'une pince
extraterrestre.
Les artistes ont livré leur interprétation à partir de la description assez sommaire esquissée dans la nouvelle puisque le scénario était alors en cours d'écriture, parmi lesquelles les deux ci- dessus attribués à deux autres artistes dont les noms ne nous sont pas parvenus et qui s'éloignent le plus de la morphologie approximativement humanoïde de l'extraterrestre inventé par John CAMPBELL, mais ces représentations n'ont finalement pas été retenues par les producteurs.
David FOSTER songe alors à Dale KUIPERS, un artiste basé dans l'Etat du Wisconsin, qui avait fait partie de l'équipe des créateurs d'effets spéciaux sur la comédie préhistorique CAVEMAN produite précédemment par la compagnie Turman-Foster, sous la direction du responsable des effets spéciaux mécaniques Roy ARBOGAST.
KUIPERS rencontre ainsi John CARPENTER au début de l'année 1981. Le réalisateur lui exprime son souhait de pouvoir disposer d'une créature d'un genre tout à fait inédit, "qui ne marche, ni ne nage, ni ne vole, ni ne rampe", et le dessinateur est engagé par John CARPENTER dès sa première esquisse. A la manière des scénaristes précédents, Dale KUIPERS développe des idées personnelles quant à la nature de la créature. En avril 1981, l'artiste présente le fruit de ses réflexions, croquis, peintures et sculpture à l'appui.
John CARPENTER ayant souhaité une créature ne se déplaçant par aucun des moyens traditionnels, Dale KUIPERS a imaginé une forme de chair ovoïde capable de générer instantanément des sortes de pseudopodes se projetant sur toute surface de manière à pouvoir se déplacer en faisant fi de la gravité. Le monstre est aussi pourvu de puissantes pattes cuirassées lui permettant d'agripper sa victime, le temps de la dissoudre tout en absorbant son patrimoine génétique et le contenu de son cerveau, avant d'en reconstituer son apparence autour de sa masse.
L'attaque de la Chose de KUIPERS, préliminaire à l'assimilation et à la reproduction de sa victime.
Bien que la créature ait une seule forme, elle est capable de modifier sa densité de telle sorte qu'elle peut agir sur sa taille et finit par devenir gigantesque - ce qui sur ce point est en parfait accord avec le script. Elle est aussi capable de susciter des hallucinations, les hommes la percevant sous forme de chimères composées des animaux les plus terrifiants, tête de lézard sur deux énormes pattes griffues, mélange de scorpion et de pieuvre, etc...
Le monstre se défait de son déguisement canin.
Comme prévu par le scénario de Bill LANCASTER, la créature finit par prendre de grandes dimensions ; elle trouve ici avec ce chasse-neige un adversaire à sa mesure danc cette illustration que réalisera Dale KUIPERS en 1986.
Une des apparences hallucinatoires sous laquelle la Chose apparaît aux hommes, mélange de poulpe, d'araignée, de criquet et de scorpion.
Enfin, Dale KUIPERS ajouta qu'il considérait le monstre comme une arme biologique conçue par des extraterrestres pour anéantir la population de planètes à coloniser.
John CARPENTER est conquis par la vision de l'artiste. Dale KUIPERS perçoit par contre davantage de circonspection parmi les producteurs ; Stuart COHEN, en particulier, se sent embarrassé car il perçoit que ce monstre qui, un peu à la manière d'ALIEN, surgit des imitations lorsque celles-ci sont démasquées, éloigne assez notablement le projet de la nouvelle originelle. Un évènement tout à fait inattendu va soudain mettre un terme à l'indécision du studio. Alors que Dale KUIPERS est retourné dans le Wisconsin pour débuter son travail, dans l'espoir de voir validés plus ouvertement ses concepts, un motocycliste saoul renverse l'artiste, le projetant dans une vitrine. Ses blessures sont suffisamment importantes pour que les soins entraînent un arrêt de travail de deux mois.
Le tournant décisif d'avril 1981
Craignant de voir le projet prendre du retard, John CARPENTER entreprend de contacter de nouveau Rob BOTTIN, sa vision des transformations d'HURLEMENT l'ayant entre-temps définitivement convaincu que le jeune maquilleur de 23 ans est capable de débuter le travail sur les effets spéciaux du film, en attendant que Dale KUIPERS puisse le seconder. Les deux hommes ont d'ailleurs déjà œuvré ensemble sur HURLEMENT (THE HOWLING). La description du projet éveille l'intérêt de Rob BOTTIN ; cependant, il paraît enclin à refuser la proposition. Il explique que la vision de Dale KUIPERS ne correspond pas à l'idée qu'il se fait de ce que devrait être la créature. Il estime que celle-ci, tout en étant très réussie, "bien meilleure que le face hugger d'ALIEN", demeure avant tout une "grosse bestiole", "une sorte de cafard", et que selon son idée, le monstre, défini comme "la Chose", devrait être quelque chose d'indéfinissable. Par ailleurs, le jeune maquilleur, en pleine ascension professionnelle (son assistant principal sur HURLEMENTS, Greg CANNOM, se plaindra d'ailleurs d'avoir été laissé dans l'ombre), est peut-être hésitant à s'engager sur le projet d'un autre (il en allait de même pour Stan WINSTON, comme évoqué dans l'article sur E.T. L'EXTRATERRESTRE). John CARPENTER, vraiment désireux de s'attacher ses services, et intrigué de connaître sa conception de la "Chose", s'enquiert de savoir à quoi elle pourrait ressembler. Rob BOTTIN précise alors qu'il la voit comme une créature dépourvue de forme, capable de changer en permanence d'apparence, et lui montre un test effectué avec une simple boule de Noël lumineuse et un gant. CARPENTER est séduit par l'idée. Stuart COHEN est également satisfait, car la version de Rob BOTTIN est plus conforme à l'esprit de la nouvelle, et coïncidence davantage avec le scénario. La Chose telle que l'esquisse Bill LANCASTER est assez insaisissable, sans forme définie, et est plutôt dépeinte comme une structure organique mais non cellulaire, une sorte de virus - comme dans la novellisation d'Alan Dean FOSTER réalisée d'après le scénario de l'époque, la seconde mouture du 4 mars 1981, avant l'arrivée de Rob BOTTIN - qui s'empare des corps, se les approprie et se propage d'un individu à l'autre ; cela pourrait d'ailleurs expliquer pourquoi les acteurs du film avaient tendance à se représenter la Chose davantage comme une maladie contagieuse que comme un monstre en tant que tel. Rob BOTTIN pour sa part la voit comme une forme de vie extraterrestre assez primordiale, sans forme définie, comme on peut l'entrevoir à la fin de la scène du chenil, investissant ses victimes pour s'emparer d'elle - la simulation à l'ordinateur montre d'ailleurs clairement qu'elle est bien constituée de cellules ; l'innovation à porter au crédit du maquilleur réside dans la possibilité qu'il lui octroie d'adopter une forme empruntant simultanément des caractéristiques diverses à ses victimes successives, dans des manifestations composites rappelant lointainement les monstres de l'Enfer peints par Hieronymus BOSCH.
Le perdant et le gagnant : au-dessus, Dale KUIPERS avec en arrière-plan le modèle de sa Chose vue de face, montrant son apparence principale; au-dessous, Rob BOTTIN avec la tête de la première manifestation monstrueuse aperçue dans le film, le "cadavre norvégien", une incarnation de son monstre multiforme s'affranchissant de son imitation d'un être humain.
Les vues de Dale KUIPERS sont ainsi complètement abandonnées - même si le monstre du chenil deviendra une masse de chair globulaire pourvue de pattes d'araignée et de tentacules filamenteux, laquelle n'est pas si loin de l'aspect général de l'extraterrestre conçu par l'artiste du Wisconsin. Se sentant dépassé par le nouveau concept, et amer que John CARPENTER soit revenu sur le soutien qu'il avait accordé à son travail, Dale KUIPERS décline l'offre de rallier l'équipe constituée par Rob BOTTIN.
Créativité presque sans limites
Le jeune maquilleur Rob BOTTIN s'attelle à partir d'avril 1981 à définir les différentes incarnations de la Chose, avec un auteur de bandes dessinées qu'il admire depuis l'enfance, Mike PLOOG, un personnage exubérant qui, après CAVEMAN, avait effectué des storyboards pour THE DARK CRYSTAL. Arrivé un mois plus tôt sur la production, ce dernier avait commencé par exécuter le storyboard pour des séquences d'action, tout en développant le concept du monstre de Dale KUIPERS, dans un style réminiscent de son travail sur le film de Jim HENSON. Rob BOTTIN lui exposa donc ses idées, lui montrant des esquisses de tête grimaçante au-dessus d'un entrelacs de chair fibreuse, et réfléchissant au moyen de réviser les cinq scènes d'effets spéciaux dépeintes par le scénario de LANCASTER à la lumière de ses conceptions. Le maquilleur était désireux de chercher les concepts les plus extravagants, inspiré à la fois par les bandes dessinées d'épouvante E.C.Comics comme "Les Contes de la Crypte", et à l'instar d'autres maquilleurs, par l'univers des dessins animés et notamment par ceux de Disney (qu'on se rappelle des séquences étonnantes comme les cauchemars de DUMBO et la séquence de fuite dans la forêt de BLANCHE NEIGE ET LES SEPT NAINS (SNOW WHITE AND THE SEVEN DWARFS) avec ses arbres animés effrayants).
La tête de Norris s'émancipant pour devenir autonome sur le storyboard, une manifestation grotesque des propriétés de la Chose, issue des bandes dessinées d'épouvante.
Rob BOTTIN s'était aussi muni d'un livre comportant des photos d'enfants morts-nés, et, particulièrement fasciné par les fusions partielles de jumeaux, s'attacha à élaborer avec Mike PLOOG des manifestations au visage distordu qui en étaient directement issues. Ces essais se révéleront finalement trop outrancièrement grotesques et seront pour l'essentiel abandonnés; une version ancienne du monstre final était en effet représenté sous une telle apparence, cependant, le cadavre monstrueux découvert dans le camp norvégien conserve la trace de cette influence, avec son visage en voie de dédoublement et ses quatre bras.
Une incarnation grotesque directement inspirée par les malformations tératologiques.
En raison de leurs horaires de travail très différents, le dessinateur et le créateur d'effets spéciaux, réalisant des maquettes de son côté, étaient amenés à n'œuvrer de concert que quelques heures par jour, confrontant alors leurs dernières recherches. Un des concepts favoris du duo était celui d'une masse arrondie à la gueule béante, portée sur des membres assez grêles. Après avoir laissé leur imagination s'enflammer, le duo étant parfois renforcé par Bill LANCASTER, Rob BOTTIN estima finalement un peu trop difficile techniquement de donner la vie à cette incarnation, prévue pour s'extirper du corps du chien lors de la séquence du chenil, et qui devait surgir à nouveau à la fin du film lorsqu'elle part à l'assaut des derniers survivants - dans la dernière mouture du scénario, la troisième, ce dénouement sera d'ailleurs modifié, les auteurs estimant avec pertinence que, si la créature était puissante au point de détruire la station, sa capacité à dissimuler sa vraie nature pourrait paraître moins nécessaire.
La "gueule géante sur pattes" quittant son camouflage de chien, puis l'ultime incarnation de la Chose retrouvant cette morphologie lors de sa tentative de détruire la station à la fin de la première version finalisée du scénario de Bill LANCASTER, scène au cours de laquelle l'opérateur radio Windows (encore dénommé Sanchez) et le directeur de la station Garry périssent.
Un très long processus conceptuel
Le processus de création des monstres se poursuivit durant des mois, si bien que Mike PLOOG dut quitter la production pour aller dessiner les storyboards de SUPERMAN 3. Un autre artiste renommé, Mentor HUEBNER, qui avait collaboré à un classique comme PLANÈTE INTERDITE ( FORBIDDEN PLANET ) en 1956, réussit le défi de succéder à Mike PLOOG afin de poursuivre le travail d'élaboration, notamment pour la scène du chenil et pour la créature finale, qui n'avait été définie qu'assez sommairement. Pour la transformation principale du chenil, PLOOG avait imaginé que le chien se dote d'une paire d'yeux supplémentaire et que des pattes d'araignée lui sortent du corps.
Mike PLOOG a aussi élaboré une gueule démultipliée pour la séquence dans laquelle la Chose du chenil percluse de tentacules tente de s'échapper par le faux plafond en se tractant grâce à deux bras humanoïdes, comme dans le film définitif, même si celle-là n'apparaît alors dans le film plus que comme une masse informe. On notera sur cette version ayant conservé une morphologie globalement canine la dissymétrie entre les deux pattes antérieures du pseudo-chien, celle de gauche, visible au-dessus de la tête, étant minuscule, à la manière d'un des deux bras surnuméraires du cadavre norvégien monstrueux ramené par MacReady et le Docteur Copper à la station.
Storyboard de la scène par PLOOG avec cette fois les deux pattes antérieures de chien de taille normale et les deux bras plus humanoïdes supplémentaires par lesquels il s'agrippe au plafond - dans cette version du scénario, les deux bras étaient apparus plus tôt, lorsque MacReady survint, ceux-là servant d'abord à se saisir chacun d'un malheureux chien.
Le concept du monstre à la mâchoire béante et aux membres grêles terminés par des griffes se retrouve en partie dans la scène du chenil dessinée par Mentor HUEBNER (bas) qui succéda à Mike PLOOG.
La version retenue pour le film reprend l'idée du storyboard de PLOOG montrant le chien se pourvoyant de pattes d'araignée; la tête est quant à elle remplacée par une masse de chair pourvue d'un orifice béant, directement réminiscente d'un croquis de PLOOG très proche du résultat final. Le côté de la Chose glaireux et percé d'yeux est quant à lui une retranscription fidèle d'une image du storyboard d'HUEBNER. La séquence telle que PLOOG l'avait dessinée s'achevait avec une protubérance pourvue de dents effilées comme des lames menaçant les hommes, quelque peu analogue à une lamproie, mais on lui substitua pour viser à plus d'originalité une forme composite issue de la morphologie canine, émergeant parmi les autres mâchoires aux crocs acérés parsemant la masse informe.
Parmi les pistes explorées à partir de la conception de Rob Bottin puis abandonnées, Mike PLOOG a aussi développé des concepts combinant chien et humain, lointains homologues des loups-garous.
Rob BOTTIN a eu l'idée de faire de la métamorphose de Norris, simulacre qui a copié jusqu'à la faiblesse cardiaque de son modèle, un véritable festival d'effets spéciaux. S'écartant de la transformation assez sommaire de LANCASTER, qui était proche de celle esquissée par John CAMPBELL, il initie la séquence par la transformation de la poitrine en une mâchoire avide lorsque le Docteur Copper tente de ramener à la vie celui qu'il croit être un compagnon. Le monstre qui s'extrait du corps de Norris ( Charles HALLAHAN ) avait été représenté sur le storyboard initial comme une énorme gueule s'élevant au dessus d'un entrelacs de chair fibreuse pourvu de membres griffus filiformes. Le concept fut révisé dans un sens plus organique, une tête difforme surmontant un corps atrophié constitué principalement de viscères. Cette tête dédoublée échut finalement au cadavre norvégien, la langue démesurée au monstre de Palmer, et la chair en pleine évolution du monstre final évite une restitution plus anatomique des intestins, bien qu'un organe notamment semble représenter le cœur extrait de son habitacle. L'idée que la tête originale se détache de son côté pour profiter de la diversion constituée par la monstruosité principale est venue très vite à Rob BOTTIN, directement surgie d'une scène vue dans un E.C. Comics. Dans sa transformation finale, la tête de Norris s'est vue gratifiée de quatre, puis six pattes d'araignée, en vue de trouver l'équilibre délicat entre le grotesque et l'horrible.
Une première version du monstre qui s'extrait de l'abdomen du pseudo-Norris dans une rageuse frénésie.
La transformation de Palmer lors du test sanguin a été par contre un peu réduite. Dans le scénario de Bill LANCASTER conçu avant l'arrivée de Rob BOTTIN, une série de mâchoires apparaissait sur son torse. Dans la séquence représentée au travers des storyboards, sa victime - rôle alors dévolu à Copper au lieu de Windows dans la version finale, le docteur ne périssant pas dans la scène impliquant le faux Norris qui était beaucoup moins spectaculaire dans la version antérieure du scénario - est immédiatement contaminée par la Chose devenue Palmer qui l'a saisie par la tête, et développe un jaillissement de tentacules. Dans le film, la mutation du simulacre de Palmer se cantonne principalement à la tête et sa victime, Windows, est seulement couverte de matière visqueuse lorsque MacReady l'incendie à son tour.
Sitôt projeté dans les airs, le Docteur Copper est déjà investi par les tentacules...
La mort de Bennings telle qu'écrite dans le scénario a elle été complètement abandonnée. Partant avec MacReady et Childs à la poursuite de chiens dont l'un était une Chose, Bennings était entraîné sous la glace par le faux chien ayant dévoré son camarade, saisi par une énorme mâchoire, et réapparaissait à la surface en cours d'assimilation par la créature extraterrestre, tandis qu'un chien se métamorphosait en bondissant sur MacReady et qu'un tentacule se saisissait d'un véhicule et le projetait au loin. Un décor de glace de grande ampleur devait être construit sur pilotis dans un studio réfrigéré, et s'étendre jusqu'au mur pour constituer un cul-de-sac. Il fut ensuite décidé que la séquence aurait lieu de nuit, pour la rendre encore plus terrifiante et faciliter la réalisation des trucages, la scène étant éclairée de manière fragmentaire par les phares des chasse-neiges. En dépit des efforts de simplification, il apparut inévitable, alors que la mise en œuvre du film suivait son cours, que la scène aurait nécessité un mois de préparation et de tournage ainsi que 2 millions de dollars et impliqué des effets spéciaux coûteux et complexes par grand froid, impliquant de nombreux techniciens au-dessus et en-dessous du plateau, et requérant des machines à vent, des chasse-neiges, des chiens dressés et leurs répliques factices, des lance-flammes, des explosifs, une tonne de caoutchouc et de gélatine, ainsi que des dispositifs hydrauliques sophistiqués pour le plan requérant le tentacule géant. Aussi le scénario fut-il révisé pour en retrancher ce moment qui promettait d'être épique et particulièrement terrifiant au travers de ces jeux d'ombres dans le paysage glacé.
Une version mécanique extrêmement réaliste d'un husky devant un mur de neige, sans doute la seule photo se rapportant à la scène avortée de la mort de Bennings prévue par le scénario originel de Bill LANCASTER.
Poursuivant les chiens fugitifs, MacReady et ses compagnons sont attaqués par deux tentacules pourvus de mâchoires surgissant de dessous la glace (document rarissime exhumé par l'excellent site Outpost31 ( http://www.outpost31.com).
L'apparition de six pattes arthropodiennes surgissant des flancs signent indubitablement l'étrangeté du chien prêt à fondre sur MacReady dans la scène non tournée. Ce ne sont que quelques pattes.. des pattes, oui, mais des pattes d'araignée...
Un des deux prototypes conçus par Rob BOTTIN sur le film sans rapport semble-t-il avec une scène du film. Ce mannequin aurait peut-être cependant ressemblé à ce que le météorologue Bennings devait devenir pour une scène jamais tournée durant laquelle il était absorbé sous la glace par un faux chien échappé du chenil. Le personnage sera bien assimilé par la Chose dans la version finale, et un double mécanique réalisé par l'équipe de Roy ARBOGAST, mais sans transformation faciale.
Le second prototype sculpté par Rob BOTTIN, également indépendamment du travail concret effectué sur le
film selon le sculpteur Brian WADE, un faciès grimaçant, un peu comme celui qu'aurait pu présenter le
"monstre-Blair" lorsque, surgi d'une caisse, il attaquait Nauls à la
fin du film, avant sa réapparition pour l'ultime confrontation avec MacReady. Cette séquence a bien été réalisée, mais a été finalement coupée comme peu
satisfaisante et il n'en subsiste pas d'autre image que le
storyboard (voir la fin du second volet de l'hommage ).
Le monstre qui a remplacé Blair, surgissant à la fin, est longtemps resté incertain. Outre la version inspirée de la tératologie humaine évoquée plus haut, un homme se déplaçant sur les doigts des mains devenus comme des pattes avait été proposé, ainsi qu'un Blair au corps englobant la tête de ses victimes ( Nauls et Garry ), avant de se doter de pattes d'araignée. Mentor HUEBNER quant à lui envisagea alors de le pourvoir d'un corps plus ou moins informe surmontant un long tentacule, puis l'abdomen fut finalement simplement placé directement au dessus du prolongement vermiforme. D'autres modifications secondaires intervinrent : la tête de Blair se vit attribuer sur le côté gauche une gueule pourvue de quatre crocs, puis d'un grand nombre de dents acérées, deux pattes d'insectes placées sur le même côté furent remplacées par deux pattes de chiens pourvues d'une articulation supplémentaire, les tentacules supérieurs s'achevant par des ventouses dentées disparurent, de même que le tentacule lisse surgissant d'une veine, terminé par une gueule aux dents pointues comme des aiguilles et, finalement, un demi chien hargneux relié par un long cordon visqueux s'extrait du torse du monstre pour attaquer MacReady.
Une première tentative de Michael PLOOG de représenter la mutation du personnage de Blair contrefait par la Chose.
PLOOG fit un certain nombre d'esquisses tournant autour du monstre de Blair réduit à un buste informe dégoulinant de viscères, comportant les corps à demi dissous de ses deux victimes, Nauls et Garry.
Un bras monstrueux retrouve l'apparence de la monstruosité initiale de la scène du chenil.
La masse cauchemardesque devait ensuite pour Mike PLOOG se doter de pattes d'araignée ; dans l'image du bas surgit une tête monstrueuse insectoïde qui pourrait évoquer LA MOUCHE.
En dépit du travail de qualité effectué par Mentor HUEBNER, beaucoup des incarnations de la Chose sont fortement inspirées des concepts de Mike PLOOG, comme ce dessin du "monstre Blair", en haut (document rare porté à notre connaissance par David SPADA, créateur du site monsterlegacy.wordpress.com); la morphologie générale rappelle celle dessinée par Mentor HUEBNER, à ceci près que les intestins y sont remplacés par des tentacules (en bas).
Initialement, le personnage de Nauls devait réapparaître devant MacReady lors de l'ultime confrontation avec la Chose, s'avérant être relié au monstre dans sa forme finale, le storyboard de Mentor HUEBNER montrant l'entité assimilant son infortunée victime réduite à l'état de pantin squelettique dérisoire.
Les choses se concrétisent
Les producteurs envisagèrent brièvement la possibilité de tourner réellement le film en Antarctique, mais la rigueur extrême du climat et l'absence de structure permettant de loger et nourrir une équipe de tournage au complet conduisit rapidement à écarter cette perspective.
En juin 1981, une équipe réduite se rend une semaine au glacier de Juneau, au sud de l'Alaska, afin de filmer notamment la poursuite d'ouverture avec le chien, conseillée par le glaciologue Maynard MILLER, qui leur indique les endroits ressemblant le plus aux montagnes de l'Antarctique. De l'autre côté de la frontière canadienne, à Stewart, en Colombie britannique, une équipe entreprend durant l'été de construire, sous la supervision du chef décorateur John Lloyd, qui a lui-même contacté CARPENTER, la construction de la charpente de la station de recherche, destinée au tournage pour les scènes d'extérieur. La proximité d'une ancienne mine permet l'acheminement des camions sur le site. Le chef décorateur place la station de manière à pouvoir occulter les sapins situés sur le proche versant.
Avec tous ces sapins, on pourrait croire qu'il s'agit des bâtiments d'une entreprise installée près de Font Romeu, dans les Pyrénées... Après les chutes de neige hivernales, et avec un cadrage judicieux, la construction devient quelque mois plus tard une station de recherches antarctique très acceptable.
Pendant ce temps, le tournage des scènes d'intérieur débute à Los Angeles dans les studios Universal, certains réfrigérés**, comme l'intérieur dévasté du camp norvégien, afin d'obtenir notamment la buée s'échappant de la bouche des acteurs. L'été étant particulièrement chaud, beaucoup de membres de l'équipe tombent malades en raison du contraste des températures.
Le directeur de la photo Dean Cundey sur le tournage de la scène de la découverte d'un mystérieux bloc de glace dans le décor reconstitué en studio de l'intérieur du camp norvégien dévasté.
Beaucoup d'acteurs, venus de la télévision, sont relativement peu connus du grand public. Joel POLIS, un des scientifiques (Fuchs), a d'abord été athlète puis clown avant de devenir acteur. Donald PLEASEANCE, qui avait fréquemment tourné avec John CARPENTER (HALLOWEEN, NEW-YORK 1997) était pressenti pour le rôle du scientifique en chef, Blair, mais en raison d'un emploi du temps chargé, et probablement aussi d'exigences financières élevées incompatibles avec la part du budget réservée aux effets spéciaux, c'est Wilford BRIMLEY (LE SYNDROME CHINOIS, puis plus tard COCOON ) qui est engagé. Le rôle principal est celui qui pose le plus de problème, le réalisateur souhaitant un acteur assez âgé, incarnant un vétéran du Vietnam, et il pense à Clint EASTWOOD, avant finalement de se résoudre à abaisser son âge et à reprendre la vedette de son film précédent ( NEW-YORK 1997 ), Kurt RUSSELL. Sur son blog***, le coproducteur Stuart COHEN a révélé que Rob BOTTIN escomptait pouvoir interpréter lui-même Palmer, mais il est vite devenu évident que le jeune prodige de 22 ans aurait déjà fort à faire avec la charge considérable des effets spéciaux de maquillage.
Certains acteurs sont ensuite présents à l'automne pour le tournage de scènes d'effets spéciaux pour lesquelles leur présence est nécessaire, pour d'autres, des doublures suffisent. Le directeur de la photographie Dean CUNDEY conserve sa fonction au sein de cette seconde équipe, de manière à veiller à ce que la luminosité corresponde avec les scènes déjà tournées et que les plans d'effets spéciaux s'intègrent ainsi harmonieusement dans la continuité filmique.
L'ensemble de l'équipe se retrouve à Stewart en Colombie britannique au début de décembre 1981 pour tourner les scènes en extérieur, le décor de la station construite sous la supervision de John LLOYD étant alors recouvert de neige, donnant une parfaite impression de base scientifique de l'Antarctique. John CARPENTER, malgré le plaisir qu'il a eu à apprendre à piloter un hélicoptère, n'est pas très désireux de faire un long périple dans des conditions climatiques déplaisantes à partir du motel où l'équipe est basée, en devant prendre à nouveau une autoneige, afin de descendre jusqu'au second site prévu au bas d'un vallonnement pour installer la base norvégienne détruite. Il fut alors décidé qu'il était possible de se contenter en remplacement de filmer avec un angle judicieusement choisi l'arrière des décombres de la station américaine destinée à être détruite à la fin du tournage pour l'explosion finale, économisant par la même occasion une somme de 250 000 dollars, sauvegardée pour les effets spéciaux.
L'équipe des acteurs en Colombie britannique au complet, à l'exception de Wilford BRIMLEY (Blair) - déjà enfermé dans son cabanon? (en fait, il n'était pas présent pour le tournage des scènes en extérieur, l'acteur diabétique ayant été dispensé pour raisons de santé).
Certaines scènes furent retournées. L'acteur Peter MALONEY incarnant Bennings, dont la scène complexe prévue avec le chien mutant évoquée plus haut avait été annulée, fut simplement filmé marchant dans le corridor menant au chenil avant d'être poignardé par un tourne-vis, vraisemblablement par Blair animé de rage paranoïaque ( il a été brièvement en contact avec le faux chien, mais sans doute Blair attendait-il Clark à sa place pour lui faire subir le même sort ). Il est finalement estimé qu'il convient de montrer une fois au public, à côté des imitations perdant leur forme humaine, un échantillon du processus d'assimilation par la Chose d'un des membres de l'équipe, et une seconde scène est donc tournée au cours de laquelle l'équipe brûle un Bennings plus tout à fait humain, portant les mêmes gants que David CLENNON lors du test sanguin, contaminé par les restes entreposés dans la remise des différents monstres en voie de liquéfaction. Plus anecdotiquement, le scientifique Fuchs (Joel POLIS), apparemment le seul capable de démasquer les imposteurs par un test scientifique après la mise hors service de Blair et du Docteur Copper, est d'abord montré empalé par une pelle, puis John CARPENTER filme une nouvelle séquence au cours de laquelle ses restes brûlés sont retrouvés dans la glace. Une vision rapprochée du corps factice semble révéler une légère déformation au niveau des épaules, comme s'il avait très légèrement commencé à se transformer, donnant crédit à l'hypothèse de MacReady : "Il s'est peut-être fait flamber lui-même pour essayer d'échapper à la Chose.."
Première version filmée de la mort du météorologiste Bennings tué à proximité du chenil (en haut à gauche), éliminée du film. Dans un autre plan coupé, le corps gelé du biologiste Fuchs est retrouvé empalé par une hache (en haut à droite) sur une porte de la serre dont l'entrée a été forcée, dans laquelle Childs cultive les plantes qu'il fume - végétaux que Palmer décide alors de brûler par principe de précaution au cas où la Chose pourrait aussi investir les cellules végétales. Dans une autre version de la scène, Palmer et Windows découvrent le corps de Fuchs à la fois empalé par la hache et carbonisé (en bas). La scène de la serre disparaît du montage final et le cadavre de Fuchs est retrouvé à découvert sur le sol glacé de la station. Dans une première version de cette séquence, le corps brûlé gît simplement par terre, ne laissant rien ignorer de son sort tragique. Dans la quatrième et dernière mouture de la scène, le plan occulte les détails les plus macabres, les restes du scientifiques assombris par la combustion étant presque entièrement recouverts par la neige.
à suivre...
(* : http://creatures-imagination.blogspot.fr/2009/09/retour-annonce-de-deux-grands-monstres.html
** : voir d'autres photos proposées précédemment en ces pages, http://creatures-imagination.blogspot.fr/2008/12/les-monstres-investissent-les-planches.html
*** : http://theoriginalfan.blogspot.fr/
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Un autre Capitaine Nemo nous a quittés...
Et voici que LOM paraît...
James MASON restera probablement l'incarnation par excellence de l'ombrageux capitaine du Nautilus inventé par Jules VERNE dans le film de Richard FLEISCHER de 1954, VINGT MILLE LIEUES SOUS LES MERS (20.000 LEAGUES UNDER THE SEA). Le personnage réapparaissait dans le roman L’ÎLE MYSTÉRIEUSE. C'est l'acteur Herbert LOM, décédé le 27 septembre 2012, qui incarna le Nemo esseulé, vieillissant et toujours plus désabusé dans la célèbre adaptation réalisée par Cy ENFIELD, dans laquelle, innovation par rapport à l'oeuvre du romancier, celui-ci ne se contentait pas de secourir les naufragés, mais avait mis au point un procédé permettant de faire croître les animaux pour résoudre la famine, comme dans le roman THE FOOD OF GODS AND HOW IT CAME TO EARTH de H.G. WELLS, prétexte permettant à Ray HARRYHAUSEN d'animer quelques créatures surdimensionnées. Acteur d'origine tchèque, Herbert LOM, né à Prague le 11 septembre 1917 sous le nom d'Herbert Karel Angelo KUCHACEVIC ZE SCHLUDERPACHERU, avait pris le nom d'emprunt le plus court parmi les patronymes, "Lom", qui veut dire "carré" en tchèque et correspondait d'ailleurs bien à son visage massif au contour anguleux. Il a notamment interprété l'inspecteur dont la contenance est mise à mal dans la saga comique LA PANTHÈRE ROSE de Blake EDWARDS, et quelques personnages des films d'épouvante anglais de la Hammer, notamment une incarnation du rôle-titre du FANTÔME DE L’OPÉRA. Il avait aussi été le thérapeute de THE DEAD ZONE de David CRONENBERG, le Dr. Weizak, qui accompagnait un convalescent se découvrant d’embarrassants pouvoirs médiumniques - film évoqué sur le site dans l'article sur le producteur Dino de LAURENTIIS.
Il avait donné ses couleurs à l'Au-delà
Le 26 octobre 2012 s'est aussi éteint à l'âge de 82 ans le directeur de la photographie d'origine suédoise Mac AHLBERG. Son succès en tant que directeur de la photographie et réalisateur de productions érotiques l'incite à s'installer aux Etats-Unis à la fin des années 1970. Il sera notamment employé par le producteur de séries B Charles BAND, contribuant ainsi à la création de l'atmosphère de films comme PARASITE, RE-ANIMATOR, HOUSE, LES POUPÉES (DOLLS), HOUSE LA DEUXIÈME HISTOIRE ( HOUSE II: THE SECOND STORY ), M.A.L. MUTANT AQUATIQUE EN LIBERTÉ (DEEP STAR SIX) et AUX PORTES DE L'AU-DELÀ (FROM BEYOND).
FROM BEYOND, film inspiré d'une brève nouvelle d'Howard Philip LOVECRAFT, dans lequel Mac AHLBERG donne ses couleurs étranges à une autre dimension peuplée d'effrayants habitants.
Le site de la maison de production de Charles BAND a publié un hommage suite à sa disparition.
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Pour certains enfants, l'enfer sur terre, ce n'est pas dans les camps nazis du passé ou dans les derniers camps de concentration communistes, ça se passe ici, presque sous nos yeux...
Ne détournons plus le regard ! Ne les abandonnons pas à une prétendue fatalité qui pourtant est bien souvent évitable, à condition de quelques aménagements de bon sens.
Que ceux qui aiment le fantastique s'attachent à démontrer que cet intérêt n'est pas incompatible, bien au contraire, avec la compassion, à l'image du maquilleur Stan Winston. N'y a-t-il que pour les émissions de télé-réalité que les gens se mobilisent par millions en envoyant des appels surtaxés? N'hésitez pas à signer et faire signer en ligne la pétition pour une commission sur la maltraitance:
http://www.petitionpublique.fr/PeticaoVer.aspx?pi=P2012N26257
POUR QUE DE TELLES TRAGÉDIES S’ARRÊTENT ENFIN.
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