mardi 23 mars 2010

ALLEGRO FORTISSIMO

Un Ours blanc se frayant un passage sur une banquise fragilisée, symbole de la question climatique ( source : National geographic )

Il fut une époque où celui qui fut ministre français de l'Éducation, Claude ALLÈGRE, bien peu soutenu à l'époque par la classe politique, forçait l'admiration par sa volonté affichée de s'en prendre à un des plus grands tabous français, en remettant en cause, au moins partiellement, la sélection abusive par les mathématiques, notamment dans le carcan normatif du système éducatif français. Bien de grands noms de la science partagent cette opinion pourtant si souvent méprisée, comme le paléontologiste Stephen J. GOULD qui contestait l'alignement des sciences naturelles sur le modèle mathématique, ou même le prix Nobel de physique Gilles de GENNES qui jugeait la mathématisation des sciences excessive.

Sans doute échaudé par l' intransigeance avérée de ses collègues à plusieurs occasions, Claude ALLÈGRE a, semble-t-il, totalement abandonné cette cause pour une autre qu'il estime encore plus provocatrice : la contestation du réchauffement climatique, nouvelle croisade dans laquelle, en dépit de la sympathie qu'il inspirait initialement, il est plus difficile de le suivre.

En science, comme dans tout domaine d'ailleurs, il est toujours salutaire de se défier de l'unanimisme, et il est vrai que nombre de travaux essentiels en sciences ont été l'œuvre d'hommes isolés. Si on reconnaît bien volontiers la nécessité de la contestation en sciences dont se prévaut Claude ALLÈGRE - et à laquelle on n'hésitera jamais à recourir en ces pages - l'opposition de principe sur un sujet aussi complexe paraît peu constructive.

Il semble que, ces derniers temps, le regain de considération pour les thèses de Claude ALLÈGRE, auquel les médias accordent souvent une tribune, celui-ci réitérant un numéro parfaitement rôdé, amène à évoquer ici la question, laquelle a des implications évidentes quant au monde vivant qui nous occupe ici pour partie, nous incitant à remettre un peu de raison dans le débat.

Le célèbre géophysicien, s'appuyant sur l'incertitude des prédictions météorologiques, conteste toute validité à des spéculations établies à l'échelle du siècle. Comme souvent avec ce genre de raisonnement, l'argument paraît à priori logique si l'on se place du point de vue d'un grand public dépourvu de culture scientifique. Néanmoins, les projections à court terme ne visent qu'à établir la probabilité la plus forte concernant des éléments fluctuants par essence, comme le sens et la force du vent. Tenter de déceler des tendances climatiques structurelles sur le long terme procède d'une logique différente, à savoir anticiper une évolution fondée à partir de relevés concordants, à la manière de l'étude des cernes du bois dans lesquelles s'inscrivent les fluctuations climatiques passées. Il en va de même pour la discipline dont Claude ALLÈGRE est le spécialiste : la tectonique des plaques est incapable de prédire, par exemple, lorsque surviendra le grand tremblement de terre de Los Angeles, mais a établi avec certitude la survenue de ce séisme majeur dû au mouvement des plaques tectoniques.

A bas la calotte ( glaciaire ) !...

L'irascible contradicteur dénie la fonte des glaciers, pourtant observée dans le monde entier: le Kilimandjaro n'a presque plus de neiges éternelles, quant à la "Mer de glace" du Mont blanc, elle tend à devenir un pauvre "ruisseau", libérant les déchets laissés par les alpinistes depuis un siècle. La désagrégation d'icebergs de plus en plus grands - le dernier de la taille du Luxembourg, détaché d'un glacier antarctique - semble confirmer le processus en cours. ALLÈGRE explique de surcroît que même si les glaces fondaient, le niveau de la mer n'augmenterait pas, l'eau passant simplement de l'état solide à liquide. Cela ne concerne en fait que la banquise, la glace flottant sur l'océan; la fonte des glaces continentales de l'Antarctique, du Groenland et des îles arctiques constituerait bien un apport supplémentaire à l'océan, susceptible de contribuer à l'inondation de nombre de régions situées au niveau de la mer.

Malgré les apparences, il s'agit du même paysage d'Alaska, photographié à quelques décennies d'intervalle: une indication éloquente de la réduction de nombre de glaciers.

M. ALLÈGRE explique que les problèmes d'approvisionnement en eau constituent un défi plus crucial pour les populations. Pourtant, la problématique qu'il conteste est loin d'être sans incidence à ce sujet; la fonte des glaces hivernales de montagne contribue largement à alimenter le réseau hydrographique et permet l'irrigation de nombre de cultures. La menace principale qui pèse sur l'eau concerne en fait la pollution, que ce soit celle des fleuves ou celle des océans, émanant des industries, aussi bien que de la surpopulation comme en témoigne le Gange saturé de déchets. Mais Claude ALLÈGRE qui réclame d'être entendu au nom de la liberté d'expression se fait soudain imprécateur sur ce dernier sujet, vouant aux gémonies les "tenants du malthusianisme"; cependant, même si la science permettait aux ressources vivrières de progresser au niveau de l'accroissement des besoins, il resterait une donnée intangible peu mise en avant par le célèbre économiste MALTHUS: l'espace, qui demeure invariable, et dont la surexploitation, qui met déjà en concurrence l'être humain avec les espèces sauvages ( d'où les destructions opérées par des animaux dépossédés de forêts converties en champs ), devient un des enjeux à l'origine de bien des conflits, comme probablement dans le cas de la guerre du Rwanda.

Le Dauphin d'eau douce chinois disparu en 2006, victime de la pollution et de la construction d'un barrage. Un genre de Cétacé effacé de la surface de la planète dans une indifférence assez générale ( ceux qui veulent en savoir plus peuvent lire cet excellent article: http://www.agoravox.fr/actualites/environnement/article/extinction-du-dauphin-de-chine-20309 ).

Si GALILÉE, dont notre bouillant scientifique se réclame, était en avance sur les idées de son époque, son continuateur auto-proclamé verse plutôt dans l'anachronisme, semblant s'enraciner dans une tradition révolue qui ne se souciait pas des déséquilibres sur les milieux naturels causés par l'homme. Bien des espèces ont disparu par le passé pour cause de chasse irréfléchie, mais beaucoup de contemporains ont la mémoire courte. Tout récemment, la candidate à la présidentielle des États-Unis Sarah PALIN, qui déclare qu' "il y'a une place pour les Mammifères d'Alaska : juste à côté de la purée", incitait à la chasse à la "baleine blanche" ( le Bélouga ) en estimant que l'espèce n'était en rien menacée: la reproduction de ces animaux, empoisonnés par les produits chimiques toxiques, était pourtant devenue si faible à la fin des années 1990 , tout particulièrement pour la population de l'embouchure du Saint-Laurent, qu'on estimait alors que l'extinction de l'espèce était proche. L'ancien ministre français de l'Éducation nationale clame que notre espèce doit avant tout penser à ses propres intérêts, comme si ce n'était pas ce qu'elle avait toujours fait, attitude qui a engendré la catastrophe qui se précise. Dans certaines régions des Etats-Unis, les Abeilles ont déjà disparu victimes notamment des polluants, de sorte qu'une pollinisation artificielle coûteuse a due être mise en œuvre - un économiste nommé STERN a ainsi quantifié les services essentiels que les systèmes naturels rendent gratuitement à l'homme et les sommes considérables qu'il faudrait investir pour compenser leur destruction. Claude ALLÈGRE se montre condescendant envers ceux qui tentent de prôner une conception plus responsable du développement, rappelant que "la nature n'est pas bénéfique à l'homme", en citant les Requins mangeurs d'homme et les séismes : une "révélation" qui, à tout le moins, n'apporte pas grand chose au débat...

Cette mignonne petite fille admirative de cet Ours n'est sûrement pas Sarah PALIN enfant; celle-ci aurait sûrement plutôt demandé à ses parents qu'ils lui apportent immédiatement un fusil...

Encore plus significatif du peu d'estime qu'il porte à ses contradicteurs, Claude ALLÈGRE n'hésite pas à convoquer l'insulte, traitant l'animateur de télévision, et créateur d'une fondation, Nicolas HULOT d' "imbécile". Ce dernier ne peut se réclamer d'un cursus universitaire scientifique comme celui dont il peut lui-même se prévaloir, mais il a par contre pu constater à l'occasion de ses multiples reportages, à l'instar de Yann ARTHUS-BERTRAND, autre cible désignée à l'opprobre, les altérations concrètes des sites naturels sur une dizaine d'années seulement, et a vérifié son diagnostic au travers de ses rencontres avec de multiples spécialistes. Les téléspectateurs familiers des reportages de l'animateur ont pu par ailleurs apprécier la qualité poétique et le lyrisme très inspiré de Nicolas HULOT, qui correspond difficilement à la représentation qu'on peut avoir d'un prétendu quasi-demeuré. Délaissant définitivement le terrain de la dialectique scientifique pour celui de l'invective, Claude ALLÈGRE suspecte tous ses adversaires d'être essentiellement motivés par l'argent. Le procès a été couramment fait à Nicolas HULOT au sujet de la marque Ushuaïa - faisant référence à sa célèbre émission - qui commercialise des produits de beauté; celle-la appartient à la chaîne de télévision française TF1, et l'animateur ainsi que sa fondation (http://www.fondation-nicolas-hulot.org/) ne sont donc qu'impliqués indirectement dans l'utilisation qui en est faite. L'Américain Al GORE est accusé d'avoir amassé une fortune avec son documentaire pédagogique sur l'écologie, mais c'est recourir au procès d'intention que d'affirmer que l'argent soit sa motivation essentielle, même s'il n'est pas interdit d'espérer davantage d'abnégation de la part d'un homme qui n'aurait apparemment pas renoncé à une vie luxueuse. Nicolas HULOT a quant à lui pris des risques avec son documentaire LE SYNDROME DU TITANIC, sa vision bien sombre ayant éloigné des salles un public plus familial habitué à son approche davantage "consensuelle" autour de la célébration de la beauté de la nature, ce qui a a engendré un échec financier; le pessimisme dont il s'est fait le héros n'était pourtant que le triste constat des effets de l'ignorance de l'avertissement du naturaliste Jean DORST ( aussi connu comme ancien directeur du muséum national d'histoire naturelle de Paris ) qui, dans son essai AVANT QUE NATURE MEURT, prévenait qu'en l'absence d'une vraie prise de conscience suivie d'effets avant l'an 2000, le monde vivant serait altéré d'une manière dramatique et irréversible.

Un Bélouga ( "Baleine blanche" ) échoué; un nombre croissant de Cétacés périssent, rongés par des cancers imputables à la pollution, notamment aux métaux lourds.

Ces diatribes n'empêche pas Claude ALLÈGRE de s'offusquer si l'on vient à le suspecter à son tour d'être soutenu financièrement par la Compagnie Total, comme quelques-uns l'ont prétendu. Cependant, la proximité d'un camp avec les intérêts financiers les plus évidents est bien à rechercher du côté de ceux qui souhaitent le statu quo comme les sociétés pétrolières, rétives à toute réglementation ( les "dégazages" clandestins sont bien connus ). L'administration BUSH a influé sur la recherche de manière à nier le réchauffement climatique, afin de ne pas compromettre les intérêts industriels - alors même que l'innovation ( en l'occurrence relative à l'application de nouvelles normes écologiques ) est susceptible, comme nombre d'économistes l'ont démontré, d'impulser un nouveau dynamisme économique.

Querelles de chiffres ou de chiffonniers ?

L'iconoclaste géophysicien pousse loin la provocation en estimant que, quoi qu'il advienne, "les générations futures n'auront qu'à se débrouiller" : l'anthropocentrisme n'est pas nécessairement un humanisme. Le prix Nobel de physique CHARPAK s'est montré de son côté tout aussi cynique, estimant à propos des enfants allergiques décédant à Paris pour cause de pollution atmosphérique, qu'il ne fallait pas le déplorer car les descendants de ceux qui survivraient développeraient une physiologie plus adaptée à la pollution - il n'y a pas loin qu'il nous explique qu'il ne faut pas craindre la montée des eaux, car grâce à l'ingénierie génétique, on pourra doter nos descendants de pieds palmés... Tirant parti de l'inculture généralisée, le même CHARPAK ne craignait pas davantage d'affirmer avec aplomb que dormir à côté d'une femme ou arpenter la Bretagne au sol granitique était plus risqué, en raison de la radioactivité naturelle, qu'habiter près d'une centrale nucléaire, en confondant délibérément les types de substances radioactives, la durée de vie des rayonnements, etc...

On peut certes aisément reconnaître que la climatologie traite de phénomènes complexes qui doivent conduire à une certaine prudence, car elle englobe bien des paramètres; par ailleurs, le système subit de constantes modifications depuis l'origine, liées aux mouvements de la Terre, aux variations solaires, à l'activité magmatique, etc... D'ailleurs, Claude ALLÈGRE achève de brouiller les cartes, en opposant le phénomène d'effet de serre cause de réchauffement climatique qui se manifeste sur une durée de quelques décennies, avec la phase de glaciation annoncée, procédant d'un cycle long induit par les phénomènes astrologiques, laquelle devrait intervenir sur une longue période de temps géologique : rien ne permet de croire que les deux évènements puissent survenir simultanément, ni même d'assurer que, dans cette perspective hypothétique, les deux processus se neutraliseraient pour préserver l'équilibre global. Une part d'incertitude est donc inévitable - sans oublier que la fonte des glaces libère en certains endroits du méthane, un autre gaz favorisant "l'effet de serre". Ainsi, on ne peut exclure que, paradoxalement, le réchauffement climatique et la fonte d'eau douce importante ne se traduisent par un refroidissement de l'Europe si le courant chaud du Gulf stream venait à être dévié par un effet de seuil, qui reste à préciser, comme l'imaginait déjà dans les années 1930 le grand auteur de science-fiction Stanley WEINBAUM ( écrivain évoqué dans l'article "Un auteur des années 1930 mis à l'honneur" en mai 2009 ). Par ailleurs, les variations de l'atmosphère ont déjà pu avoir pour effet de modifier le coefficient d'acidité de l'océan, et la vie marine s'est adaptée à ces fluctuations. Néanmoins, il faut en général des millions d'années pour que la richesse biologique puisse se reconstituer, temps nécessaire à l'émergence de nouvelles espèces susceptibles de repeupler les différentes niches écologiques, et, par ailleurs, la diversité du vivant est déjà bien compromise par la surexploitation, la réduction des milieux naturels, ou encore la pollution, ce qui obère ses capacités d'adaptation; cette addition de facteurs laisse effectivement entrevoir les perspectives apocalyptiques augurées dans une projection comme celle du SYNDROME DU TITANIC.

Ce compteur effectue l'effrayant calcul du nombre d'espèces disparaissant chaque jour, une richesse perdue à jamais.

On n'a pas ici vocation à s'ingérer dans le conflit entre institutions s'affrontant au travers d'échanges de plus en plus vifs entre chercheurs convaincus par le modèle du réchauffement climatique global et partisans de Claude ALLÈGRE, moins nombreux - même s'ils comportent quelques personnalités notables, comme le brillant écrivain Michael CRICHTON récemment disparu ( auquel on a rendu hommage en novembre 2008 ), qui était lui aussi persuadé de l'existence d'un "complot écologiste" - cependant, si l'on s' attache à démasquer des forces uniquement motivées par la quête du profit, il apparaît peu contestable, toute considération idéologique mise à part, que les lobbys économiques représentent aujourd'hui la puissance dominante, désireuse d'influer sur l'opinion pour préserver ses intérêts comme on l'a évoqué plus haut au sujet du président BUSH ( on se souvient aussi, dans l'affaire dite de la "vache folle" qui n'a pratiquement donné lieu à aucune inculpation, que les institutions nationales et européennes ont systématiquement nié les informations inquiétantes jusqu'au moment où la vérité n'a pu être étouffée, ayant entraîné plusieurs scandales révélateurs de la complète prééminence des objectifs financiers sur les impératifs publics de santé ). On se contentera simplement d'ajouter, sans d'ailleurs nier en rien le conformisme qui peut, il est vrai, régner dans les milieux scientifiques et qui rend toujours inconfortable de défendre des positions minoritaires, que nombre des chercheurs auxquels se réfère le géophysicien pour étayer ses thèses ont, semble-t-il, pris des distances avec leur médiatique porte-parole, dont la démonstration est jugée réductrice, et que l'intéressé vient lui même de reconnaître que certaines des courbes de température de son dernier livre à succès, émanant prétendument de collègues, avaient été contrefaites et ne reposaient en fait sur rien, ajoutant qu'il les supprimerait des rééditions mais qu'elles n'avaient aucune importance, sa motivation étant essentiellement, de son propre aveu, de discréditer l'intéressement financier supposé des promoteurs de l'écologie...

Claude ALLÈGRE paraît ainsi se complaire dans une attitude de provocateur de plus en plus caricaturale qui le dessert, même si elle assure sa promotion médiatique. On ne peut que regretter qu'il préfère à présent adopter cette posture, plutôt que de participer au débat par un apport critique plus pertinent. Celui-ci affirmait pourtant tantôt la nécessité de se projeter dans l'ère de l'après-pétrole, et s'intéresse à la possibilité de piéger une part du gaz carbonique présent dans l'atmosphère. La complexité des défis suppose la mobilisation de toutes les énergies disponibles. Par ailleurs, il n'a peut-être pas tort d'imaginer que l'homme puisse parvenir à améliorer la situation par son inventivité, mais cela suppose, comme le dit Nicolas HULOT, que notre espèce agisse avant que les écosystèmes soient dégradés d'une manière irrémédiable.

Un faisceau de présomption supplémentaire

On l'a vu, Claude ALLÈGRE est partisan d'une vision scientiste plaçant sans partage l'homme au-dessus de la nature. S'il s'intéressait au monde vivant dans son ensemble, il pourrait alors réaliser que celui-ci semble également plaider pour la thèse du réchauffement global du climat. Il y'a quelques années, des Cigales aux stridulations caractéristiques ont été pour la première fois signalées dans les souterrains du métro parisien. Des espèces pathogènes, comme le petit Moustique vecteur du "chikungunya", du genre Aedes, plus difficile à repérer que l'Anophèle commun, commencent à être recensées dans les zones tempérées de l'Europe. N'en déplaise à Claude ALLÈGRE, le sort de l'homme est lié à celui des autres créatures vivantes, pour le meilleur comme pour le pire.

Ce petit Moustique piqueur, l'Aedes albopictus, vecteur de graves maladies, commence à se répandre en Europe à la faveur de la hausse des températures.

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Disparition de l'acteur Peter GRAVES. De son vrai nom James AURNESS, l'acteur, disparu le 14 mars 2010 peu avant son quatre-vingt quatrième anniversaire, est surtout connu comme le chef d'équipe de contre-espionnage de la série MISSION IMPOSSIBLE. Il avait aussi participé à la comédie Y'A T-IL UN PILOTE DANS L'AVION et sa suite. Il avait par ailleurs tourné dans des films de science-fiction dans les années 1950, notamment, l'année suivant sa prestation dans le classique LA NUIT DU CHASSEUR, dans un des tous premiers films de Roger CORMAN, IT CONQUERED THE WORLD (1956), dans lequel il lutte contre l'influence d'un envahisseur vénusien auquel le créateur d'effets spéciaux Paul BLAISDELL a conféré un aspect trapu à la demande du réalisateur qui pensait que sa planète d'origine avait une forte gravité - elle est en fait légèrement inférieure à celle de la Terre. Peter GRAVES était par ailleurs le frère de l'acteur James ARNESS, lequel a tourné dans nombre de westerns et a interprété la créature de LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE de Christian NIBY, un des tous premiers extraterrestres du cinéma.

Peter GRAVES dans IT CONQUERED THE WORLD approche de la caverne dans laquelle gîte un extraterrestre hostile.

Peter GRAVES fait une apparition dans MEN IN BLACK II.


lundi 8 mars 2010

CONTRE AVATAR !

Le déferlement de commentaires dithyrambiques concernant le long-métrage de James CAMERON ne paraît pas prêt de prendre fin. Il règne à présent dans tous les domaines un unanimisme impérieux à la gloire de tout ce qui est considéré comme "moderne", largement alimenté par les médias - que l' on se souvienne, dans un genre différent, de l'adulation générale suscitée par la rénovation du Muséum d'histoire naturelle de Paris qu'on évoquait par le biais de la satire dans le dernier article, le silence assourdissant des passionnés à ce sujet n'étant guère pondéré que par la nostalgie de quelques artistes comme le dessinateur TARDI regrettant le foisonnement des espèces présentées jadis. S'il n'y avait qu'une raison à l'existence de ce blog, elle serait de présenter une alternative à la logomachie dominante, pour tout ce qui relève de notre champ d'investigation au croisement de l'histoire naturelle et de la fiction.

Une pièce vide sans décor, avec des acteurs recouverts d'un tissu noir pourvu de "capteurs de mouvement"; le tournage bien triste d'AVATAR.

( illustration originale - cliquer pour agrandir )

Aussi, on cherche pratiquement en vain quelque manifestation d'esprit critique relative aux effets spéciaux d'AVATAR, les spectateurs oubliant qu'il existe des techniques éprouvées permettant d'incarner des créatures imaginaires de manière bien plus satisfaisante. On a exposé les raisons pour lesquelles les images générées par ordinateur constituaient un bien piètre succédané aux autres techniques, à travers l'article "Un hommage purement virtuel" de novembre 2009 qui prenait pour point de départ le remake du classique agencé par Ray HARRYHAUSEN, LE CHOC DES TITANS, avec des monstres de synthèse; l'argumentaire vaut tout autant pour les extraterrestres virtuels d'AVATAR. Cette hégémonie totalitaire de l'idéologie du virtuel a conduit bien des grands noms des effets spéciaux à une retraite forcée, loin des plateaux de cinéma ( voir l'article "Les grands créateurs déclarent forfait" de mars 2009 ) - on peut d'ailleurs noter que ce film qui fustige un capitalisme destructeur participe lui-même de l'anéantissement de toute une culture, celle d'un imaginaire basé sur des trucages à vocation "réaliste" et des créateurs qui les ont perfectionnés. Il subsiste cependant encore des artisans talentueux, peu connus du public, réalisant notamment pour des publicités des animaux hyperréalistes selon les procédés classiques. C'est le cas des artistes du studio Nomansland, composé de Denis PASTOU, Pascal MOLINA et Jean-Christophe SPADACCINI, qui a notamment conçu les créatures extraterrestres de certains plans du film ATOMIK CIRCUS, et qui a à son actif un monstre impressionnant construit pour une publicité consacrée à une marque de voiture il y'a quelques années, apparaissant dans la vidéo ci-jointe. Quel plaisir de voir enfin un extraterrestre existant en trois dimensions, mû de manière naturelle par les mécanismes appropriés et recouvert d'une peau réaliste. Cette séquence, réalisée avec des moyens financiers sans rapport avec ceux d'AVATAR, est à elle seule une démonstration magistrale à l'encontre du film de CAMERON, et il nous est donné de visionner son élaboration à cette adresse : http://www.nomansland.fr/videoretro/videoretro.htm.

Deux photos mettant en valeur la créature, trouvée sur le blog de Pierre Paul JAYNE, qui a œuvré avec le studio Nomansland sur la publicité pour la marque Citroën ( http://ppjayne-fx.over-blog.com).