dimanche 20 février 2011

DERNIÈRE SÉANCE POUR LA BIODIVERSITÉ ?

Passage fatal d'une Girafe sur une piste d’atterrissage : le développement humain peut-il encore laisser une place à l'animal sauvage ?

Avec les derniers jours de décembre 2010 s'est achevée l'année internationale de la biodiversité, c'est à dire la mise à l'honneur de la variété des espèes vivantes présentes sur notre planète. Il faut espérer que cette initiative ne demeurera pas sans lendemain, à la manière de la "journée de la courtoisie au volant", qui pourrait laisser accroire que, le restant du temps, les chauffards seraient tolérés et leur "inconduite" admise. Cette séquence a débouché sur la création de la Plate-forme intergouvernementale de la biodiversité et des écosystèmes ( IPBES), répondant à une urgence criante : les experts estiment que le taux d'extinction des espèces est de 100 à 1000 fois plus important que celui qui se produit ordinairement dans la nature. On ne peut qu'espérer que cette prise de conscience officielle se traduise par des actions fortes. Cependant, l'absence d'adoption de véritables dispositions coercitives à l'issue de la conférence sur le climat de Cancun susceptibles d'induire une inflexion notable visant à réduire le réchauffement climatique, et ce malgré le désolant précédent de la conférence de Copenhague de l'hiver précédent, laisse sceptique quant à la perspective de mesures concrètes prochaines de protection des espèces.

La diversité biologique n'est en effet guère prise en compte, à de rares exceptions près - un projet d'autoroute a été suspendu dans le sud de la France pour protéger une espèce de Coléoptère menacée - par les décideurs, qui n'envisagent pas le maintien des différentes formes de vie comme une priorité, l'anthropocentrisme et le court terme étant la règle. C'est ce constat qui a conduit l'économiste Nicolas STERN à conclure que les responsables ne pourraient intégrer dans leurs paramètres la complexité des écosystèmes que si l'on chiffrait financièrement les services que ceux-ci rendent gratuitement à l'homme, notamment par la régulation du climat et de l'atmosphère réalisée au travers des océans et des forêts, par le recyclage des matières organiques sans émission de pollution - alors qu'on suspecte de plus en plus les incinérateurs d'être cancérigènes, ou encore par la pollinisation des plantes au travers des Insectes - si ces derniers venaient à disparaître, il n'y aurait plus guère que quelques espèces comme les Pissenlits, lesquels utilisent le truchement du vent pour disperser leurs graines, qui ne risqueraient pas l'extinction. L'évaluation a ainsi, à l'issue de l'expertise, mis en évidence la somme considérable que les sociétés humaines devraient investir pour avoir la moindre chance de compenser les effets délétères d'un développement non maîtrisé.

Une certaine vulgate laisse entendre qu'un discours écologique lassant aurait fini par s'imposer unanimement. Si les préoccupations environnementales ont effectivement davantage de visibilité dans les médias, ce serait beaucoup s'illusionner d'en déduire que celles-ci sont désormais prioritaires. On ne peut d'ailleurs que s'inquiéter de voir aux États-Unis revenir en force dans le camp républicain la tendance dont le ticket de la dernière élection était l'expression, plutôt que des personnalités du parti plus responsables en matière d'environnement, tels qu'Arnold SCHWARZENEGGER et Newt GINGRICH. La prise de conscience des risques induits par un développement non maîtrisé en Chine, promise à devenir la nouvelle puissance mondiale, est également assez lente. Le premier ministre de Russie, Vladimir POUTINE, initie à présent la protection du Tigre; cependant, cet investissement au travers d'une espèce emblématique ne semble pas pour l'instant annoncer pour autant un réel changement d'orientation de la politique, au moment où de nouveaux opposants à la construction d'une autoroute menaçant une forêt ont été passés à tabac et mutilés à la suite de BEKETOV ( évoqué précédemment dans l'article "Nos précieux cousins des profondeurs" ). En France, la proclamation du pouvoir sur la "conversion écologique" à l'issue de l'élection n'a pas réellement débouché sur des arbitrages nécessairement favorables aux objectifs annoncés alors que les résistances institutionnelles sont toujours aussi affirmées ( lors des débats parlementaires sur les organismes génétiquement modifiés, leurs partisans sont ainsi pratiquement les seuls à être reçus par les instances parlementaires dans le cadre des auditions devant fonder les projets de loi, de sorte que les arguments de ceux qui réclament une certaine prudence en la matière sont d'emblée passés sous silence ).
Depuis que, grâce à leurs armes, les premiers hommes ont pu chasser les gros animaux qui n'avaient que peu de prédateurs, et qu'ils ont ainsi pu contribuer, en dépit de leur faible importance numérique, à leur extinction, l'emprise de l'espèce humaine, au fur et à mesure qu'elle transformait les milieux naturels, n'a cessé de s'accroître. A présent, les menaces pesant sur les espèces sauvages sont multiformes, et le taux d'extinction ne cesse ainsi d'augmenter. Les perspectives de réchauffement climatique sont effectivement loin de constituer le seul facteur de perturbation de l'environnement. Dans tous les domaines, des intérêts obèrent une gestion pleinement responsable des ressources.

Nombre de petits Marsupiaux ont disparu dans les derniers siècles, comme ce Wallaby-lièvre dont il ne reste plus que des exemplaires naturalisés.

Le développement technique fait peser ses contraintes sur tous les plans. Le maillage des territoires des pays occidentaux par des autoroutes et des surfaces bitumées coupent les aires naturelles dont les animaux ont besoin de disposer pour trouver leur partenaire; l'imperméabilisation du sol stérilise le substrat et empêche l'absorption des eaux excédentaires, facilitant les inondations. En Australie, l'utilisation non raisonnée de l'irrigation a drainé l'eau de régions exposées à la sécheresse, précipitant la désertification, et finissant finalement par y mener l'agriculture à sa propre perte. Un ver de terre géant spécifique au Lac Pedder en Tasmanie a disparu après l'installation d'une centrale hydroélectrique. En Chine, le gouvernement qui s'efforce de protéger le Grand Panda, symbole du pays, a en revanche laissé s'éteindre une espèce de Dauphin d'eau douce, victime de la pollution des fleuves et des barrages restreignant le nombre de ses proies.

L'envolée démographique des pays en voie de développement conduit quant à elle à un empiétement toujours plus grand sur les réserves naturelles; les projections les plus pessimistes estiment que, tandis que l'Europe peine à renouveler ses générations, l'Afrique pourrait compter près de 9 milliards d'habitants en 2100. En Asie et en Amérique du sud notamment, des zones forestières ne cessent d'être défrichées pour être converties en champs, entraînant des conflits entre les cultivateurs et les animaux dont l'espace vital se réduit. En Afrique, les villageois n'hésitent plus à chasser ouvertement les animaux officiellement protégés qui y vivent, renforçant la prédation imputable aux braconniers chasseurs d'ivoire et de cornes de Rhinocéros. De surcroît, en Amazonie et en Afrique, la viande de brousse ( les animaux sauvages d'espèces souvent menacées, Singes de toutes espèces, Pangolins, Tatous, Fourmiliers, Tapirs, etc... ) fait l'objet d'un véritable engouement qui n'est pas limité aux populations locales, certaines personnes se faisant même clandestinement acheminer par leur famille jusqu'en Occident les cadavres de ces créatures destinées à servir de mets. Et le processus n'en est encore qu'à ses prémisses; nombre de pays comme la Chine et l'Inde achètent d'énormes territoires dans des endroits encore sauvages comme à Madagascar pour y délocaliser la production agricole.
L'effet de destruction imputable à une démographie incontrôlée est encore amplifiée par les déprédations dues aux conflits, comme la guerre au Rwanda qui a failli réduire à néant l'investissement de Dian FOSSEY en faveur de la protection des Gorilles de montagne, ou les affrontements au Nigeria et en Côte d'Ivoire qui précarisent encore davantage l'Hippopotame nain, dernière espèce d'Hippopotame de petite taille encore vivante appartenant à un genre distinct de son parent l'Hippopotame amphibie, de nombreuses autres formes d'Hippopotames de taille réduite ayant disparu dans les temps récents en raison très probablement de l'action de l'homme - rien que dans les sous-bois de l'île de Madagascar, il y'a eu pas moins de trois espèces de petits Hippopotames dans les derniers siècles jusqu'à l'installation des Malgaches.
L'hippopotame nain, discret hôte des forêts d'Afrique de l'Ouest.
Les grandes compagnies ont également leur part dans la déforestation, particulièrement en Asie du sud-est, accaparant le bois précieux ou défrichant pour installer des plantations d'huile de palme ou des carburants verts, éradiquant ainsi l'écosystème naturel; des militants écologistes y ont été assassinés, pour avoir tenté d'alerter l'opinion des déprédations perpétrées. De plus en plus, une sylviculture anthropique ( arbres originaux remplacés par des essences d'espèces exploitées par l'homme ) appauvrissent le milieu. En Alaska, le lobby pétrolier demande à pouvoir effectuer des exploitations dans des réserves naturelles; les évaluations des associations écologiques estiment que les perturbations induites par l'activité auraient un impact plus important que celui allégué par les requérants et seule la catastrophe survenue dans le Golfe du Mexique a conduit le président américain à reconsidérer provisoirement les risques des exploitations d'hydrocarbures - après un rejet initial au temps du gouvernement BUSH grâce à la fronde de quelques élus républicains courageux ayant voté à l'opposé de leur camp. L'Afrique du sud a durant des décennies exercé un rôle de pionnier auprès des institutions zoologiques par sa politique de gestion de la grande faune; le gouvernement actuel ne témoigne apparemment pas du même intérêt en la matière, nombre de protecteurs de la nature dont les efforts ont permis de maintenir en bonne condition les populations de Rhinocéros blancs sont tour à tour expulsés pour laisser la place au projet d'un complexe d'usines et d'une centrale électrique sur une zone étendue de bush, suite à la découverte de la richesse pétrolière du sous-sol. L'exploitation des ressources minières occasionne également bien des pollutions, comme les mines de cobalt d'Amérique du sud ou l'extraction du lithium utilisé notamment pour le téléphone portable. Les orpailleurs clandestins en Guyane française empoisonnent le milieu aquatique, excédant les capacités des forces de l'ordre à y mettre un terme.
Les animaux sont aussi toujours recherchés pour leurs attributs; les Félins sont menacés en raison de leur fourrure, l'ivoire végétal constituant un matériau très proche de celui des défenses d'Eléphants n'a pas mis fin à la tuerie des pachydermes pour ce motif, les cornes de Rhinocéros servent à constituer des manches d'armes blanches très recherchées dans les pays arabes où la superstition leur prête le même pouvoir de virilité que leur utilisation sous forme de poudre par les Asiatiques et notamment par les Chinois, également très demandeurs de griffes de Tigre, ou bien d'autres produits animaux auxquels leurs croyances attribuent également à tort une fonction aphrodisiaque, tandis que d'autres encore comme la bile d'Ours ( prélevée de manière particulièrement cruelle ) et certains Reptiles sont censés avoir des effets bénéfiques pour la santé selon la médecine chinoise traditionnelle. Des mains de Gorille ou des pieds d'Eléphant servent aussi de cendrier ou deviennent d'autres objets utilitaires d'un goût contestable.
Voici un pied de tabouret qui porte bien son nom! On ne sait pas si la trompe a servi à confectionner un tuyau de douche...
L'océan n'est plus depuis longtemps hors d'atteinte de l'homme et son emprise sur ce milieu a été croissante. Il est pour le moins surprenant, pour dire le moins, d'entendre encore certains responsables proclamer en 2010 que la mer peut tout absorber, alors que l'équipe du commandant Jacques-Yves COUSTEAU ( qui s'indignait qu'on "prenne la mer pour une poubelle" ) avait mis en évidence il y' a déjà des années la désertification de certaines zones de la mer Méditerranée, engorgées par les produits toxiques rejetés par les fleuves; on sait depuis que l'embouchure du Saint-Laurent ou les côtes de la Mer baltique ne se portent pas tellement mieux..Une étude récente a révélé que la taille des poissons d'eau douce n'avait cessé de décroître au XIX ème siècle pour cause de prélèvements excessifs, de sorte que la mer est apparue comme une alternative pour l'approvisionnement. A l'heure actuelle, les espèces marines les plus consommées sont en péril, et même celles des profondeurs, qui devaient s'y substituer, commencent elles-mêmes à montrer des signes d'épuisement des populations, de sorte qu'une estimation prévoit la disparition totale des Poissons d'ici trente ans - voir la prédiction de Jules VERNE évoquée dans l'article "La revanche des plus humbles" d'août 2010. De surcroît, l'espèce humaine s'ingénie à dégrader ce milieu dont elle attend tant pour sa subsistance. Les filets dérivants raclant le sol marin arasent tout sur leur passage, détruisant les animaux qui y vivent ainsi que les pontes, et étranglent aussi les espèces nageuses. Une quantité considérable de déchets, notamment drainés par les fleuves, s'y déversent, une accumulation de déchets plastiques apportés par les courants constitue même à présent dans l'Atlantique un véritable continent artificiel, triste réalisation célébrant la modernité. Les particules plus petites s'insinuent dans les organismes et les micropolluants, aux effets toxiques voire mutagènes, se concentrent au fil de la chaîne alimentaire, se retrouvant ensuite avec une forte teneur dans les espèces consommées par l'homme. Nitrates et phosphates, et plus généralement une surabondance de matières organiques, provoquent l'eutrophisation, une prolifération exagérée d'algues qui intoxique l'environnement, entraînant l'extinction de la faune. Les hormones anti-contraceptives se retrouvent aussi dans l'eau, perturbant l'équilibre physiologique de certains animaux, notamment des Poissons qui se féminisent, compromettant leur reproduction. Quant au processus de réchauffement climatique, la modélisation laisse craindre une acidification des mers qui pourrait être fatale à de nombreuses formes de vie; au cours de son histoire, notre planète a connu bien des climats différents ayant eu des influences majeures sur celles-ci, mais l'addition des atteintes porte à croire que la diversité aura davantage de difficultés à surmonter la crise présente.
Le défunt sculpteur CÉSAR n'est pour rien dans cette accumulation formant presque une nouvelle terre qu'aucun conquérant n'a pour l'instant revendiquée...
La contamination des espèces pêchées par l'homme illustre la manière avec laquelle la courte vue finit par être également préjudiciable à notre propre espèce. La pollution génère allergies, asthmes et cancers. La disparition de prédateurs ainsi que l'appauvrissement de la faune au profit d'espèces plus courantes qui sont souvent des "réservoirs" naturels hébergeant des organismes pathogènes pour l'homme, augmente le risque de transmission de maladies. Les organismes génétiquement modifiés, généralement conçus par l'intégration dans l'ADN de virus utilisés pour transférer les gènes, peuvent faire redouter des mutations inattendues, tant les interactions sont par nature complexes, et la résistance qui finit par apparaître chez les parasites combattus par les végétaux modifiés renforce finalement la population d'espèces nuisibles devenus invincibles, comme si toute interférence dans les écosystèmes s'avérait néfaste ( qu'on se souvienne de l'introduction désastreuse des Lapins en Australie, puis de l'horrible myxomatose incontrôlée répandue ensuite pour limiter leur propagation ). On peut encore rappeler que la variété presque infinie de combinaisons chimiques et de caractéristiques cellulaires rencontrée chez les espèces vivantes, dont on ne cesse de réduire dramatiquement le nombre, laisse pourtant augurer des voies prometteuses à la recherche, revêtant notamment dans le domaine médical une importance cruciale; en matière de lutte contre le cancer, notamment, on renverra le lecteur à l'article "Nos précieux cousins des profondeurs" de novembre 2008.
Et pourtant, l'homme est bien loin de ménager la nature alors que son propre intérêt le commanderait. Il n'est pas jusqu'aux scientifiques qui rechignent à donner l'exemple, collectant souvent systématiquement tout organisme découvert lors d'une étude au lieu de se limiter à un ou deux individus par espèce. Des entomologistes sont ainsi parvenus en 1968 à décimer toute une population d'Insectes aptères à Rovinj en Croatie, pour avoir sans ménagement remué toute la zone. Plus récemment, deux espèces de plantes africaines contemporaines des Dinosaures sont considérées comme pratiquement éteintes, suite à un prélèvement intensif.
Sa petite taille n'a pas mis l'Embie, Insecte dont les ailes ont régressé secondairement qui vit sous terre dans des galeries de soie, à l'abri de toutes les convoitises...
Les Cycades ont survécu aux Dinosaures durant 65 millions d'années, mais pourraient ne pas réchapper de la frénésie de certains amateurs de botanique.
Par le passé, bien des populations, dont le mode de vie était plus proche de la nature, ont chassé des espèces jusqu'à l'anéantissement total, en particulier dans les îles, avec l'arrivée des Malgaches, Maoris, Arborigènes, Canaques et autres Mélanésiens, puis finalement des Européens. Des mesures de protection ont été adoptées dans les derniers siècles, mais le statut d'espèce protégée est arrivé trop tardivement pour empêcher l'extinction de l'Aurochs, des dernières Rythines de Steller ( lointain parent du Lamantin adapté au climat polaire ) et du Loup marsupial ( évoqué brièvement dans l'article "L'étrange fin des Marsupiaux?" ). Ce dernier avait notamment pâti de la mauvaise réputation excessive que les éleveurs de moutons australiens leur avait faite, stigmatisation qu'on retrouve de nos jours en France à l'encontre des Loups et des Ours, auxquels on impute d'emblée tout trépas survenu dans le cheptel, entraînant une vindicte frénétique à leur encontre - alors même qu'existent des dispositions pour indemniser le propriétaire lésé. Du Loup marsupial au Renard, sans oublier le Hanneton, qui a pratiquement disparu, différents animaux ont eu l'infortune d'être proposés à la détestation générale, leur destruction étant encouragée par l'octroi de primes. La bêtise consternante des hommes est de constamment surévaluer la capacité de reconstitution des populations : les ornithologues connaissent bien la triste répétition de cette erreur qui a vu l'extermination du Dodo de l'Ile Maurice, du Grand Pingouin de l'Arctique ( seul de son groupe a avoir perdu la capacité de voler, à l'instar des Manchots de l'hémisphère austral ), ou encore plus près de nous du Pigeon migrateur, animaux qu'on disait surabondants jusqu'à ce que le dernier individu soit tué. L'amnésie fait aussi partie des caractéristiques de notre espèce : très présent dans la littérature maritime à l'époque, le Grand Pingouin, à la différence du Dodo mis en scène par le récit de Lewis CAROLL dans ALICE AU PAYS DES MERVEILLES, a totalement disparu de notre culture contemporaine. Les hommes de l'avenir sauront-ils que le Rhinocéros et l'Eléphant ont existé dans les temps historiques ?
Hannetons annonciateurs de la Pentecôte présentés sous un jour sympathique sur cette carte postale de 1905.
Les enfants des écoles étaient recrutés pour anéantir les Hannetons, recevant dix centimes par kilo, avant de les entasser et d'y mettre le feu.
Hanneton vu de face, avec ses antennes en éventail : un indésirable pourchassé jusqu'à sa quasi-disparition.

On peut considérer que, sans des mesures exceptionnelles, une espèce, pour avoir une chance raisonnable de survie, doit bénéficier d'un vaste territoire et être représentée par plusieurs milliers d' individus au minimum, 10 000 dans l'idéal. Lorsque son territoire est morcelé et que ce nombre est inférieur, elle n'est pas assurée de pouvoir surmonter les aléas divers, comme des épidémies ( la maladie de Carré a ainsi décimé près de 90% de la population de lions d'une réserve africaine ). Le braconnage, quant à lui, élimine de préférence les mâles reproducteurs les plus vigoureux, d'ordinaire plus épargnés par les prédateurs. La sous-espèce du Nord de Rhinocéros blanc est ainsi considérée comme pratiquement éteinte, faute que les autorités des pays africains concernés aient pu avoir les moyens suffisants d'endiguer la chasse illicite.
A ce terrible constat des agissements d'une espèce qui a tôt fait d'en désigner nombre d'autres sous le terme de nuisibles, mais qui est incontestablement celle qui aura le plus malmené l'environnement, il convient cependant d'ajouter quelques contre-exemples démontrant la possibilité d'une alternative. En Islande, la population locale qui utilise le duvet de l'Eider remplace le prélèvement effectué dans le nid par un substitut, de manière à ce que la couvaison de ce genre indigène de Canard n'en souffre pas, démontrant que l'homme peut tirer profit d'une espèce sans nécessairement compromettre sa survie. Des chasseurs européens organisateurs de safaris, notamment en Inde, ont pris conscience au début du XXème siècle des menaces que la chasse aux trophées faisait peser sur nombre d'animaux, et sont devenus les promoteurs de réserves naturelles. Le célèbre BUFFALO BILL tient son surnom de la gloire qu'il se faisait des larges massacres de Bisons d'Amérique qu'il perpétrait; il a néanmoins fini par prendre quelque part à sa protection et la population de ces grands ongulés s'est partiellement reconstituée. Le Bison d'Europe est sans doute passé encore plus près de l'extinction, mais cette fois, à la différence du pauvre Aurochs, la Pologne a su préserver les derniers individus vivants en liberté, de sorte qu' il n'est à présent plus immédiatement menacé. Le Lynx pardelle ( grand chat sauvage vivant dans le sud de l'Europe ) a pu se maintenir grâce à un investissement soutenu pour garantir sa reproduction. Néanmoins, sa survie a long terme est incertaine, car le réchauffement climatique devrait selon toute vraisemblance désertifier la réserve naturelle vouée à sa protection. De la même manière, en Afrique, les variations climatiques potentielles dues au réchauffement global pourraient déplacer les zones fertiles, compromettant la perpétuation de la riche faune encore préservée dans les réserves naturelles, l'extension des zones occupées par l'homme ne laissant plus guère de solution de repli.
Si les raisons d'être pessimiste l'emportent largement sur de trop rares bonnes nouvelles, il n'est pas interdit de participer au niveau le plus modeste à une meilleure prise en compte des formes de vie avec lesquelles nous avons reçu la planète en héritage. Le contribuable peut évidemment apporter une participation financière sous la forme de dons déductibles des impôts aux organisations qui tentent de préserver la faune, ce qui ne dispense pas d'un investissement plus personnel. La généralisation de petits gestes quotidiens peut aussi amoindrir l'œuvre de destruction de la nature en cours. Rouler plus lentement, notamment l'été, peut permettre de limiter l'hécatombe routière des Hérissons, dont la stratégie de défense les conduit à se rouler en boule plutôt qu'à prendre la fuite, ce qui leur est fatal. Proscrire les pesticides dans le jardin, alors que la plupart du temps, les mécanismes de défense des plantes et l'action des prédateurs limitent les proliférations indésirables à un niveau tolérable, permet de maintenir une population d'Insectes diversifiée et évite de contaminer les animaux qui s'en nourrissent, tels qu'Hérisons, Musaraignes, Chauve-souris et Oiseaux. Ne pas abandonner de sacs plastiques, particulièrement à proximité de plages, ne répond pas qu'à un civisme soucieux d'esthétique, ceux-ci étouffant nombre d'animaux marins comme les Tortues de mer qui les prennent pour les Méduses dont ils se nourrissent. Concernant ceux d'entre nous estimant indispensable d'avoir un téléphone ou un ordinateur portable, on ne saurait trop leur conseiller de ne pas en acheter un nouveau tous les six mois dès que le dernier modèle à la mode est mis sur le marché comme la publicité intensive y incite, pour le motif évoqué plus haut. Et évidemment, il convient pour ceux qui collectent des plantes ou collectionnent des spécimens d'Insectes ou d'autres animaux, de ne prélever que des espèces non protégées, en préférant toujours comme représentant du groupe recherché celles qui sont les plus courantes à celles qui sont plus rares, ceux qui s'intéressent à la nature se devant de donner l'exemple.
Cette pauvre Tortue a poursuivi sa croissance en dépit de l'anneau qui l'enserre incoerciblement; beaucoup de souffrance provoquée par une petite négligence.
( NOTA : cet article qui devait paraître au début de l'année a été différé pour évoquer les disparitions de personnalités de janvier 2011 )
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Quelques sites ont célébré l'année de la diversité biologique :
Le muséum national d'histoire naturelle de Londres a mis en valeur une espèce chaque jour:
Un blog américain a proposé durant un an de faire découvrir un parasite différent chaque jour :
( on s'était d'ailleurs permis de proposer quelques photos rares, mais faute, probablement, de la caution d'une institution prestigieuse, ces propositions n'ont pas eu l'honneur d'être retenues )
Auparavant, un internaute avait proposé une galerie des espèces découvertes ces dernières années : http://www.flickr.com/photos/26042632@N03

mercredi 19 janvier 2011

UNE PASSION IBÉRIQUE POUR LE FANTASTIQUE




Metteur en scène espagnol, Juan PIQUER SIMON s'est éteint le 7 janvier 2011 à 76 ans. Il était notamment connu des amateurs de films d'horreur pour avoir adapté au cinéma en 1988 sous le titre de MUTATIONS (MUERTE VISCOSA, en anglais, SLUGS) le roman gore LA MORT VISQUEUSE, dans lequel des limaces manifestent une appétence soudaine pour la chair humaine, et avait signé d'autres films gore, LE SADIQUE A LA TRONÇONNEUSE et PIÈCES, ainsi qu'une parodie des super-héros, SUPERSONIC MAN.

Il avait livré en 1976 une adaptation de VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE de Jules VERNE intitulée LE CONTINENT FANTASTIQUE (VIAJE AL CENTRO DE LA TIERRA), distribuée sous le titre JOURNEY TO THE CENTER OF THE EARTH. Le film comporte la transcription la plus fidèle de la scène se déroulant sur l'océan intérieur, à ceci-près que celle-ci met aux prises deux monstres marins de la même espèce, en l'occurrence deux Tylosaures rescapés du Crétacé - le roman voyait s'affronter un Plésiosaure et un Ichtyosaure. A L'homme préhistorique géant veillant sur un troupeau de Mammouths, le réalisateur a substitué un Gorille géant, le décor expressionniste constitué d'arbres morts et une utilisation adroite des effets de perspective, conférant à l'interprète une taille colossale, contribuant à donner quelque force à la séquence. Des Tortues géantes ancestrales (encore pourvues de dents) ainsi que des Reptiles préhistoriques parmi lesquels des Dimétrodons (espèce disparue à voilure dorsale déjà vue dans la version d'Henri LEVIN de 1959) complètent ce monde fantastique orné de champignons géants.


Un monde souterrain empli de périls.

L'impressionnant occupant des lieux

Un des maîtres de l'océan souterrain.

Le metteur en scène s'inspire à nouveau de Jules VERNE en 1981, adaptant L'ÉCOLE DES ROBINSONS (en anglais GODFREY MORGAN: A CALIFORNIAN MYSTÈRE), qui, comme L'ILE MYSTÉRIEUSE, est une histoire édifiante de survie sur une île dans la lignée de ROBINSON CRUSOE, devenue à l'écran LE MYSTÈRE DE L'ÎLE AUX MONSTRES (MISTERIO EN LA ISLA DE LO MONSTRUOS) - en anglais JULES VERNE'S MYSTERY ON MONSTER ISLAND. A l'instar de Ray HARRYHAUSEN qui avait transformé à sa manière L'ÎLE MYSTÉRIEUSE pour y inclure divers êtres extraordinaires, Juan PIQUER SIMON modifie l'intrigue en y rajoutant plusieurs monstres (gigantesque mille-pattes, bête bipède d'allure féroce, reptile géant, hommes-poissons...). Il s'avère en fait que les êtres menaçants sont des créations factices destinées à éloigner les indésirables qui pourraient convoiter le trésor amassé par un pirate, dénouement qui rappelle celui d'un autre roman de Jules VERNE, LE MYSTÈRE DU CHÂTEAU DES CARPATES, dans lequel les éléments fantastiques procédaient également d'une supercherie.

Bête géante, qui s'avérera factice.

Avec L'ÉCLOSION DES MONSTRES ( LOS NUEVOS EXTRATERRESTRES ) - en anglais THE POD PEOPLE - Juan PIQUER SIMON aborde la science-fiction contemporaine, avec ses visiteurs extraterrestres hostiles, des humanoïdes velus pourvus d'une courte trompe, ayant quelque ressemblance avec ALF, qui naissent dans des œufs (d'où le titre anglais faisant faussement référence à L'INVASION DES PROFANTATEURS). Le scénario orchestre une relation entre un jeune garçon et un de ces êtres fraîchement éclos qu'il recueille et baptise plaisamment "Trompette"; réalisant qu'il ne pourra indéfiniment le protéger de l'hostilité des adultes s'appliquant à traquer ses congénères, l'enfant décide finalement, au cours d'un épilogue assez déroutant et non dénué d'émotion, de l'abandonner dans la forêt en espérant qu'il parviendra à leur échapper.

Un petit invité à la maison.

L'ABÎME (LA GRIETA), de 1990, distribué sous les titres THE RIFT et ENDLESS DESCENT, participe de la vogue des films de science-fiction sous-marins initiée par ABYSS de James CAMERON. Une expédition y découvre le fruit d'expériences génétiques menées dans un laboratoire dissimulé dans les profondeurs. Le propos du film de Juan PIQUER SIMON n'est guère explicite. On ne sait d'ailleurs pas si la première créature apparue menaçant le submersible, un être informe évoquant un gigantesque Nudibranche ("Limace de mer"), n'est qu'un monstre marin de passage non encore inventorié, ou un fruit échappé des expériences interdites, pas plus qu'on ne sera renseigné sur le rôle de la curieuse créature en forme de gigantesque Etoile de mer du Pacifique aux nombreux bras rayonnants qui trône dans la salle principale du complexe secret et qui paraît revêtir une grande importance dans le dispositif d'ingénierie. Peu importe en fait, le film ne cherchant pas tant à coller à la logique d'une science-fiction adulte qu'à proposer à ceux qui ont gardé de leurs jeunes années le goût pour l'étrange et les êtres fantastiques une immersion dans une sorte de séance de train-fantôme n'ayant d'autre but que de divertir et de procurer quelques frissons.
Rencontre avec une aberration génétique qui a tout du dragon médiéval.

Si Juan PIQUER SIMON ne laissera sans doute guère de chefs-d'œuvre incontestables dans l'histoire du cinéma fantastique, il était un véritable passionné, réalisant lui-même en partie les effets spéciaux de ses films. Il se tournait vers les grands auteurs du genre, Jules VERNE, dont il prévoyait de tourner une nouvelle version de VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE, H.P. LOVECRAFT qui lui avait inspiré MAGIE NOIRE (LA MANSION DE LOS CTHULHU - en anglais CTHULHU MANSION) ou encore William H. HODGSON dont il avait projeté d'adapter LA MAISON AU BORD DU MONDE, roman qui devrait finalement être portée à l'écran par Stuart GORDON (lequel a lui aussi précédemment adapté LOVECRAFT, avec notamment FROM BEYOND). Il était parvenu au cours de sa carrière à obtenir le concours d'acteurs anglo-saxons célèbres, comme Peter CUSHING et Terence STAMP sur LE MYSTÈRE DE L'ÎLE AUX MONSTRES, ou Jack SCALIA, Ray WISE (ROBOCOP, TWIN PEAKS) et R.Lee ERMEY (FULL METAL JACKET, BODY SNATCHERS) pour l'ABIME. Il laissera le souvenir d'un artisan appliqué à la mise en valeur du fantastique, qu'on pourra goûter sous réserve d'avoir su garder une certaine fraîcheur d'esprit.


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Peter YATES disparu le 9 janvier 2011 à l'âge de 81 ans était un réalisateur britannique spécialisé dans les films policiers, comme DÉLIT D’INNOCENCE ( AN INNOCENT MAN ) de 1989, dans lequel Tom SELLECK incarne avec justesse un homme qui découvre un monde de violence alors qu'il a été indûment jeté en prison pour couvrir la faute de deux policiers corrompus - dont l'un est interprété par David RASCHE, parfaitement odieux, qui avait déjà livré une forte prestation dans son rôle d'activiste écologique au côté de David CLENNON (THE THING, MATINÉE) dans BULLETIN SPECIAL (SPECIAL BULLETIN ) d'Edward ZWICK de 1983. On devait aussi à Peter YATES un film d'heroïc-fantasy, KRULL, en 1983, qui narre l'épopée de Colwyn, prince héritier d'un royaume médiéval pour libérer son monde de l'emprise d'un être maléfique désigné sous le nom de "la Bête", au cours de laquelle les forces magiques s'affrontent. L'action était portée par la composition grandiloquente de James HORNER à son apogée. KRULL devait originellement s'ancrer davantage encore dans l'imagerie du Moyen-Age à l'époque à laquelle il devait s'intituler DRAGONS OF KRULL, mais la sortie du DRAGON DU LAC DE FEU décida les producteurs à éviter la redite - ce qui n'empêcha pas le film de connaître une piètre réussite commerciale, tout comme d'ailleurs son illustre devancier qui ne parvint à trouver son public. Le film comporte quelques créatures fantastiques, telles qu'un cyclope mélancolique ayant troqué son deuxième œil contre la possibilité de connaître l'avenir ( réduit en fait à l'heure de sa mort ), dont le maquillage fut créé par Nick MALEY après une première version rejetée conçue par Christopher TUCKER, les guerriers de la Bête qui semblent faits d'une cuirasse osseuse et qui, à leur trépas, libèrent une masse visqueuse et tentaculée disparaissant furtivement dans le sable ( scène ajoutée lors de la post-production ), comme si leur existence ne résultait que d'un sortilège leur ayant donné consistance à partir d'une forme de vie rudimentaire, et la Bête elle-même, enfermée dans sa forteresse volante. Celle-ci, un monstre humanoïde, n'apparaît que pauvrement, étant filmée dans un réservoir et en contre-plongée de manière à la rendre plus mystérieuse, procédé qui finit par paraître un peu artificiel. Les motivations de la créature demeurent également mystérieuses, le personnage, comme le Fantômas de l'adaptation comico-policière interprété par Jean MARAIS ( qui avait précédemment incarné une autre "Bête" célèbre sous la direction de jean COCTEAU ) semblant se complaire dans la destruction mais s'affirmant résolu à cesser de commettre le mal si une jeune fille accepte de l'épouser ( en l'occurrence la princesse destinée au héros ), le spectateur demeurant en vain dans l'attente d'une révélation qui aurait donné davantage de force à l'allégorie, la raison d'être du monstre semblant principalement de fournir au héros le prétexte pour prouver sa bravoure au travers des épreuves tel un nouveau Persée, tâche dévolue à Ken MARSHALL qui avait eu auparavant l'occasion de s'illustrer de manière plus nuancée dans le rôle-titre de la série MARCO POLO, aux côtés notamment de James HONG et David WARNER. L'être fabuleux sans doute le plus notable de KRULL est probablement une araignée géante translucide désignée pour cette raison comme l'Araignée de cristal, animée image par image par Stephen ARCHER, lequel avait précédemment participé aux effets d'animation du CHOC DES TITANS de 1982, Ray HARRYHAUSEN ayant exceptionnellement pour cette superproduction fait officiellement appel à des collaborateurs ( le jeune talent a malheureusement depuis effectué sa conversion dans le virtuel, comme Phil TIPPETT, étant employé jusque sur le contestable remake de ce classique ). La scène, qui bénéficie aussi de la collaboration de Derek MEDINGS, technicien britannique ayant notamment apporté son concours aux trucages de JAMES BOND, survient à l'occasion d'un passage particulièrement marquant voyant Ynir, le mentor du prince Colwyn qu'interprète Freddie JONES ( extraordinaire forain malsain de THE ELEPHANT MAN, entre autres ) retrouver un autre interprète shakespearien, Francesca ANNIS ( Reine-mère de DUNE ) dans le rôle d'une très vieille femme, son ancien amour délaissé conduit à l'infanticide. La résurrection éphémère d'un amour qui paraissait révolu est assez touchante, tout, comme dans une certaine mesure, la mort du cyclope Krell, contribuant à faire de ce film, qui a offert un de ses premiers rôles à Liam NEESON composant un des bandits ralliés au prince, une œuvre qui n'est pas aussi mauvaise qu'on l'écrit souvent.

L'araignée de cristal

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Après l'auteur Michael CRICHTON et le créateur d'effets spéciaux Stan WINSTON, la saga JURASSIC PARK est encore une fois endeuillée par le décès de l'un des acteurs principaux du second volet LE MONDE PERDU ( THE LOST WORLD ) de Steven SPIELBERG, Pete POSTLETHWAITE, qui s'est éteint le 2 janvier 2011 à l'âge de 65 ans des suites d'un cancer. Prêtant ses traits sévères au personnage de Roland Tembo, chasseur expérimenté commandant l'équipe envoyée par le neveu d'Hammond traquer des Dinosaures sur le "site B" pour fournir une attraction à San Diego, il était un peu l'équivalent du chef des gardes Robert Muldoon ( Bob PECK ) du premier film, soit un homme aguerri plutôt téméraire, mais dont le contact prolongé avec les Dinosaures carnivores finissait par entamer l'assurance.


Auparavant, il avait fait partie de la galerie de personnages patibulaires peuplant le pénitencier en déshérence d'ALIEN 3 de David FINCHER, aux côtés notamment de Charles DANCE ( LAST ACTION HERO, le téléfilm L'HUMANOÏDE ) et Brian GLOVER - l'effrayant joueur d'échecs du LOUP-GAROU DE LONDRES. Débutant sa carrière au cinéma en 1977 dans le premier film de Ridley SCOTT, LES DUELLISTES (THE DUELLISTS ), l'acteur de théâtre avait peu tourné pour l'écran jusqu'au début des années 1990. Le rôle qui lui avait valu la consécration fut son interprétation d'un père emprisonné abusivement par la justice anglaise dans le cadre de la répression des activistes de l'IRA, dans AU NOM DU PÈRE, pour lequel il obtint en 1993 l'Oscar du meilleur second rôle. L'autobiographie de cet acteur défenseur de l'écologie devrait être publiée au cours de l'année 2011.

Visage du pénitencier d'ALIEN 3, un monde dont tout espoir a été banni.

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Dernière minute : disparition du compositeur des musiques des films de James BOND, John BARRY, décédé d'une crise cardiaque à 77 ans, plusieurs fois cité ici pour sa partition notable et novatrice du remake de KING KONG de 1976 et à qui on devait aussi l'envoûtante partition de QUELQUE PART DANS LE TEMPS (SOMEWHERE IN TIME) en 1980, voyage romantique dans le temps.



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Si ce petit site est fréquenté par des Français, y compris jusqu'en Terre-Neuve, par des Belges, des Québécois et des Suisses comme on pouvait raisonnablement l'espérer, il semble à présent être aussi visité par des non-francophones, alors même que sa version anglophone, aboutallcreatures.blogspot.com a été arrêtée, par manque de temps, pour ne pas alourdir le volume du site ( par le doublement des images présentées dans les deux langues ), mais aussi parce que, la première année, le nombre de connectés restait bloqué sur le zéro! Depuis quelques mois, non seulement les articles en anglais commencent à être régulièrement parcourus, mais le site principal lui-même est vu par des internautes d'horizons divers. Sans doute parce qu'il se rattache à une tradition plus prospère dans le monde anglo-saxon notamment en matière d'imaginaire, les visiteurs dont le français n'est pas la langue principale, si on se réfère à leur contrée de résidence, proviennent principalement d'Amérique du Nord et de l'Europe du Nord; on note même, suivant les semaines, un certain nombre de visiteurs de langue germanique, en particulier des Allemands et des Néerlandais ( 50 connections d'Hollandais ont été enregistrées pour la dernière semaine de janvier 2011 ). Depuis peu, des internautes du Maghreb manifestent aussi dans une certaine mesure quelque intérêt. C'est la raison pour laquelle un traducteur automatique été intégré à ce site. Il suffit de cliquer sur l'icône puis, dans la barre qui apparaît en haut de la page, de sélectionner le français dans la colonne de gauche et la langue désirée dans celle de droite et de valider. Le résultat est plutôt satisfaisant, même si, évidemment, certaines expressions sont intraduisibles d'une langue à l'autre, mais au moins le sens général de l'article devrait être accessible à tous ceux qui le souhaitent et qui ne pouvaient lire directement les articles jusqu'à présent. C'est également par souci des lecteurs non francophones que l'on s'efforcera à présent de donner le titre original des œuvres évoquées, alors que jusqu'à maintenant, on se contentait souvent, pour ne pas surcharger, de ne mentionner que le titre par lequel celles-ci pouvaient être connues des lecteurs de langue française - il est vrai que parfois, il existe plusieurs titres pour un roman ou un film dans la même langue... Les sujets les plus populaires sont depuis un mois et demi toujours les quatre mêmes : l'article sur les créateurs de monstres évincés par les images de synthèse ( rendez-nous le goût authentique des produits naturels! ) évoquant notamment le découragement conjoint de Patrick TATOPOULOS, Rob BOTTIN et Steve JOHNSON, est très populaire, suivi de l'hommage consacré à Jim HENSON, créateur des Muppets et initiateur de bien des créatures fantastiques, pour le vingtième anniversaire de sa disparition. Mais l'éclectisme du site semble porter ses fruits avec deux articles de vulgarisation très souvent vus, celui passant en revue, à l'occasion de l'anniversaire de Charles DARWIN, les argumentaires s'opposant à la théorie de l'évolution, et celui qui arrive pratiquement toujours en tête des consultations, "La peoplisation du monde vivant", consacré aux tendances contemporaines en matière de dénomination des espèces ( ce qui ferait presque regretter d'avoir cédé à quelques traits d'humour en mentionnant des personnalités qui ne sont pas toutes nécessairement connues en dehors de l'hexagone ).


mercredi 8 décembre 2010

LES TALENTS MULTIPLES DE JAMES CUMMINS



Alors que le tournage de la préquelle de THE THING s'achève, on vient d'apprendre la disparition d'un maquilleur qui avait contribué aux effets spéciaux du film initial.

Si les noms de quelques maquilleurs comme Dick SMITH, Rick BAKER, Stan WINSTON et Rob BOTTIN ( voir les articles que ce site thématique a consacré à la carrière des deux derniers en juin 2008 et mars 2009 ) sont connus de ceux qui se passionnent pour le cinéma fantastique, bien d'autres parmi ceux qui œuvrent à leur côté n'ont pas acquis le même niveau de notoriété. James CUMMINS est ainsi probablement un peu moins connu des amateurs de fantastique, mais il a participé à des films importants.

Né dans le Missouri, James CUMMINS suit des études artistiques en Californie, et découvre qu'elles ont pour finalité de le recruter comme animateur par le studio Disney. Estimant que la reproduction de dessins presque identiques à la suite, destinés à recréer un mouvement, est une tâche plutôt fastidieuse, le jeune homme préfère réaliser des masques et se constitue ainsi un portfolio avant d'aller le présenter dans les studios d'effets spéciaux. Le célèbre maquilleur Tom BURMAN, responsable des effets spéciaux de films comme SOUDAIN LES MONSTRES ( FOOD OF THE GODS ) ainsi que de ceux des remakes de L'ÎLE DU DOCTEUR MOREAU ( THE ISLAND OF DR. MOREAU ) de Don TAYLOR et de L'INVASION DES PROFANATEURS ( INVASION OF THE BODY SNATCHERS ) de Philip KAUFMAN, qu'il admirait tout particulièrement, se montre enthousiaste devant ses réalisation et l'engage séance tenante. Il reçoit d'abord la mission d'effectuer des dessins pour un projet personnel de BURMAN portant sur une course de motos. Grâce à l'entremise de Tom BURMAN, il sculpte pour le compte de Stan WINSTON une tête décapitée pour EXTERMINATOR, LE DROIT DE TUER; l'effet est jugé si réaliste que la scène sera finalement écourtée pour tenir compte de la censure. Il œuvre ensuite sur les corps décomposés de DEAD AND BURIED et sur les robots amoureux de HEARTHBEEPS, toujours sous l'égide de Stan WINSTON.

Alors qu'il était demeuré sans contrat durant trois mois, un ami, Henry GOLAS, lui offre la responsabilité principale des effets spéciaux d'un téléfilm, LE MONSTRE DES PROFONDEURS ( THE INTRUDER WITHIN ), de Peter CARTER, avec Chad EVERETT, Joseph BOTTOMS et Linda MASON GREEN, promise à devenir la ravissante héroïne de la série LA GUERRE DES MONDES ( WAR OF THE WORLDS ). L'opportunité ne va cependant pas sans déconvenues. Trois jours avant le début du tournage, les producteurs lui demandent de revoir le concept dans un sens plus commercial, recevant l'ordre de s'inspirer partiellement de l'extraterrestre d'ALIEN ainsi que de la mâchoire du requin des DENTS DE LA MER ( JAWS ). En trois semaines, il doit donc modifier le costume et concevoir toutes les phases de cette créature découverte par les employés d'une plate-forme de forage pétrolière, représentant une espèce ancienne de plusieurs millions d'années, concurrente de l'homme, qui débute sous une forme embryonnaire; si le monstre rappelle effectivement l'allure biomécanique de la créature conçue par GIGER pour le film de Ridley SCOTT, il est cependant loin d'en être la simple décalque. N'étant alors pas encore membre de l'union syndicale des maquilleurs, James CUMMINS n'est pas autorisé à prendre une part active sur le plateau; frustré de devoir laisser une autre personne manipuler ses créations, il quitte finalement le tournage au Canada, sans amertume, estimant que le travail a été correctement effectué.

Le juvénile James CUMMINS avec le buste de la créature adulte du MONSTRE DES PROFONDEURS.

Il a aussi participé à deux films importants au sein de l'équipe de Tom BURMAN.  Sur THE BEAST WITHIN, il réalise le costume de la dernière étape de transformation d'un adolescent en une créature terrifiante, mais le costume s'avère trop lourd à porter pour l'acteur prévu, et une nouvelle version est rapidement créée, ne conservant que les mains et pieds sculptés par CUMMINS. Sur le remake de LA FÉLINE ( CAT PEOPLE ), un autre film traitant de métamorphose, il conçoit une panthère mécanique - représentant le personnage joué par Natassia KINSKI sous une forme animale - mais les atermoiements du réalisateur Paul SCHRADER, qui ont aussi eu pour effet de réduire la scène de la transformation, amènent à n'utiliser cette création que pour un plan, montrant le félin s'élancer dans une rivière. Peu de temps après avoir reçu une proposition d'intégrer l'équipe de Rob BOTTIN pour THE THING de John CARPENTER, Tom BURMAN le contacte de nouveau pour travailler sur des plans additionnels de LA FÉLINE. En dépit de la reconnaissance qu'il éprouve pour le célèbre maquilleur lui ayant offert sa chance, James CUMMINS décide de saisir la possibilité d'intégrer une grande production - sur laquelle est aussi employé de son côté Rob BURMAN, fils de Tom, en tant que "préposé au latex". Cependant, en dépit de la cohérence que s'efforce de faire régner le directeur des effets spéciaux sur le film, Eric JENSEN, CUMMINS se heurte à nouveau aux hésitations quant à ce qu'on attend de son travail, le responsable principal, Rob BOTTIN, trop accaparé par ses responsabilités, et se concentrant principalement sur la sculpture des têtes, ne passant donner son aval qu'une fois la tâche de ses collaborateurs achevée. Au bout de sept mois, il choisit de reprendre sa liberté.

A l'issue d'une période d'oisiveté, il est engagé par Henry GOLAS sur LES ENVAHISSEURS SONT PARMI NOUS ( STRANGE INVADERS ) de Michael LOUGHLIN, pour concevoir des extraterrestres humanoïdes prenant des traits humains afin d'infiltrer une communauté villageoise, au rang de laquelle on compte notamment l'interprète principal de LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE ( THE THING FROM ANOTHER WORLD ), Kenneth TOBEY. On le retrouve sur des films bien connus comme LES DENTS DE LA MER 3 (JAWS 3D ), pour lequel il réalise des modèles miniatures de requin. Il dessine des storyboards ( dessins prévoyant le découpage des scènes ) pour COCOON, travaille comme sculpteur et animateur pour Chris WALAS sur ENEMY MINE et conçoit les créatures du film d'épouvante tragico-comique de HOUSE de Steve MINER, notamment les traits d'un monstre surnommé le "Démon de la guerre", une manifestation inquiétante constituée par l'assemblage de victimes du Vietnam donnant mauvaise conscience à un écrivain ( William KATT ) qui a servi à leurs côtés quelques années plus tôt, peinte par Margaret BESERRA, qui avait également aussi œuvré sur THE THING et LES ENVAHISSEURS SONT PARMI NOUS. On lui doit encore les créatures d'ALIEN PREDATORS, petit film de Deran SARAFIAN, tourné en Espagne, qui imagine les exactions d'un organisme extraterrestre parasite ayant échappé au contrôle de la N.A.S.A, et il fait partie en tant que sculpteur de l'importante équipe - Chris WALAS, Greg NICOTERO, Robert KURTZMAN, etc... ayant donné vie au monstre marin d'une espèce inconnue sévissant dans le film de Sean CUNNINGHAM curieusement intitulé en français M.A.L. MUTANT AQUATIQUE EN LIBERTÉ (DEEP STAR SIX).

James CUMMINS au travail pour une séquence non finalisée des Envahisseurs sont parmi nous (Strange Invaders) dans laquelle apparaissait le corps d’un extraterrestre tué par une fourche, présentant une apparence déformée et inachevée dans le style du cadavre norvégien monstrueux de The Thing de John CARPENTER tel qu’il avait été dépeint dans le premier scénario achevé et dont l’artiste avait d’ailleurs contribué à sculpter la version finale. 

James CUMMINS (à l'extrême droite) sculptant un buste d'extraterrestre des Envahisseurs sont parmi nous pour au côté d'un autre artiste ayant oeuvré sur les effets spéciaux de THE THING de John CARPENTER, Brian WADE.

Tournage du film avec un buste d'extraterrestre, avec Henry GOLAS au premier plan, ami fidèle de James CUMMINS, le maquilleur Stephen DUPUIS (ENEMY MINE, LA MOUCHE, LA MOUCHE 2, LE FESTIN NU), second à partir de la gauche et Margareth BESERRA à l'extrême droite, chargée de la teinte des monstres de THE THING et LA MOUCHE).

L'effrayant Démon de la guerre de HOUSE, conçu par James CUMMINS, qui en a notamment sculpté la partie antérieure, constitué d'un conglomérat de victimes, lequel n'est pas sans rappeler les effrayantes transformations de THE THING. Le maquilleur se montrait particulièrement fier de Big Ben, l'ancien supérieur du héros, un mort-vivant qui l'accuse de désertion, interprété par Richard MOLL, dont le visage était animé par divers mécanismes. La photo provient du blog de l'auteur, échange de bons procédés (voir post-scriptum).

James CUMMINS avait préalablement fait les dessins conceptuels pour les créatures de HOUSE.

Rencontre déplaisante en Espagne: la N.A.S.A. a laissé s'échapper des organismes meurtriers, que CUMMINS a contribué à créer. Avec leur mâchoire gourmande et leurs pattes arachnidiennes, ils rappellent quelque peu le monstre de MUTANT ( plus connu comme FORBIDDEN WORLD ) d'Allan HOLZMAN - ce qui a peut-être incité le distributeur d'ALIEN PREDATORS à proposer parfois le film sous le titre MUTANT II.

Le petit extraterrestre reptilien d'ENEMY MINE sculpté par James CUMMINS.

Cependant, James CUMMINS finit par se lasser de devoir laisser à d'autres le soin de mettre en valeur de manière aléatoire son travail, d'autant qu'adolescent il envisageait déjà, en testant dans le secret de sa chambre ses premiers maquillages, la création de monstres comme une possible étape pour accéder un jour à la mise en scène. Il réalise un film dont il a conçu lui-même les effets spéciaux, THE BONEYARD en 1990, film d'épouvante semi-humoristique se concluant par l'apparition d'un féroce démon à l'aspect de caniche géant.

Un personnage effrayant de THE BONEYARD.

Lors du tournage de son troisième film, DARK: 30, il contracta la scarlatine; l'infection le contraignit à subir deux opérations à cœur ouvert en 2002. Il écrivit et illustra un ouvrage tout public, GOOD THINGS TO SHARE, dont les bénéfices lui permettent de faire un don à des associations d'aide aux enfants malades, afin de remercier l'association nationale d'aide aux malades du cœur. Il avait été secondé dans cette entreprise par le producteur Richard F. BROPHY, supporter de l'Association américaine du cœur, qui fut son associé de longue date, producteur de ses films, et imprésario de ses scénarios; lorsqu'il succomba à un cancer du poumon, James CUMMINS l'assista jusqu'au bout, estimant qu'il avait un partenaire et ami au-delà de ce qu'on pouvait espérer (*).

James CUMMINS faisant la lecture aux enfants d'une école de son livre pour la jeunesse à vocation caritative, en compagnie de son soutien Richard BROPHY, administrateur de haut niveau ayant une formation scientifique, qui se reconvertit par passion dans le cinéma, en tant qu'acteur et producteur.

L'état de santé diminué contraignit James CUMMINS à abandonner la mise en scène, les assurances refusant dorénavant de prendre en charge les tournages. Il se consacra à l'écriture de scénarios en tant qu'auteur aussi bien que consultant et entreprit aussi de proposer sous l'identité de J.T. CUMMINS - afin d'éviter la confusion avec un poète se nommant également James CUMMINS - des histoires à suspens à lire sur livre électronique (Kindle) traitant de sorcellerie et de créatures mythiques, comme THE JITTERS et ses monstres ambigus, et dont l'une, SOFTLY: THE UNIVITED figura parmi les 100 récits d'épouvante à lire sur internet les plus demandés. James CUMINS s'est éteint durant son sommeil le 1er décembre 2010, à l'âge de 51 ans, victime du mauvais état de ses artères. Tristement, le dernier message qu'il avait publié sur son blog ( http://www.jtcummins.com ), écrit quelques heures avant sa disparition, était consacré à l'annonce du Noël qu'il ne connaîtra pas, déplorant son dévoiement consumériste oublieux du caractère sacré qu'il avait connu dans ses jeunes années. Sans enfant, il laisse derrière lui les créatures auxquelles il apporté son concours durant une décennie particulièrement riche.

La créature simiesque de THE JITTERS

PS : James CUMMINS avait semble-t-il apprécié la photo rare que "Créatures et imagination" avait mise sur internet du cadavre norvégien "hamburger" de THE THING qui permet de voir les quatre membres supérieurs de la créature, la commentant sur son blog : "Rob BOTTIN gardait un contrôle fanatique des photos prises durant la création des effets spéciaux de THE THING de John CARPENTER, aussi même de nos jours, il est rare de voir des images de tournage comme celle postée ici. D'après la forme de la photo, c'est un Polaroid pris durant l'application de la peinture. Bien que la création semble molle et charnelle, elle est en fait réalisée en fibre de verre. Les sculpteurs qui ont contribué à la création de cette pièce sont : Rob BOTTIN, moi-même, Brian WADE, Willy WHITTEN, Vincent PRENTICE. Peinture : Margaret BESERRA - devenue épouse PRENTICE".

James CUMMINS, dessinateur, sculpteur, technicien d'effets spéciaux, scénariste, réalisateur, écrivain: une existence écourtée mais bien remplie.

(*On peut voir sur le site facebook de James CUMMINS plusieurs autres photos relatives à l'opération GOOD THINGS TO SHARE, qui ne sont pas dépourvues d'émotion lorsqu'on sait que la rémission de l'auteur n'était que provisoire :

samedi 27 novembre 2010

LE DERNIER DINO S'EST ÉTEINT




Pour une fois, la télévision a fait écho, sommairement il est vrai, à la disparition d'une personnalité qui concerne notre domaine, celle du producteur Dino, né Agostino, de LAURENTIIS, survenue à Los Angeles le 11 novembre 2010 à l'âge de 91 ans. Les producteurs ne suscitent généralement pas le même engouement auprès des cinéphiles que les metteurs en scène, les acteurs et les créateurs d'effets spéciaux, car leur investissement personnel n'apparaît pas directement à l'écran au même titre qu'une prestation artistique. On a cependant rappelé ici, lors de la disparition de Charles SCHNEER (article de mars 2008 ), à quel point l'implication de ce producteur avait été déterminante pour permettre à Ray HARRYHAUSEN de concrétiser ses merveilleux projets. On a aussi évoqué le rôle de Stuart COHEN dans la mise en route de THE THING, à la fois pour initier cette nouvelle adaptation cinématographique de la nouvelle WHO GOES THERE?, et pour finir par imposer John CARPENTER comme metteur en scène, aboutissant au chef d'œuvre à présent reconnu ( "retour annoncé de deux grands monstres", septembre 2009 ). De la même manière, Dino de LAURENTIIS a pu par sa détermination mener à bien différents projets qui ont compté dans l'histoire du cinéma.

Comme pour l'acteur Kevin McCARTHY auquel on a rendu hommage dans l'article précédent, il n'est pas dans notre objet de rendre compte de manière exhaustive d'une carrière florissante, mais de s'attarder davantage sur les contributions au domaine qui nous intéresse plus particulièrement, se rapportant aux créatures fantastiques, voire plus largement à l'imaginaire, lesquelles sont traditionnellement plutôt moins mises en valeur.


Des débuts glorieux

Il n'est pas rare d'entendre qualifier ironiquement les Italiens expatriés de "spaghettis", par référence à leur célèbre cuisine ( et ce jusqu'à un genre de cinéma, le "western-spaghetti", émanant de cinéastes comme Sergio LEONE ). Dans le cas de Dino de LAURENTIIS, l'assimilation ne serait pas totalement incongrue, dans la mesure où, justement, son père était producteur de cet ingrédient typique. Comme son compatriote "Cubby" BROCCOLI, autre italien installé aux USA, dont un parent a donné son nom au légume, et qui est devenu producteur des adaptations des JAMES BOND, Dino de LAURENTIS a préféré s'investir dans le cinéma que poursuivre la tradition familiale dans l'alimentaire. Cessant rapidement de vendre des pâtes, c'est d'abord essentiellement en temps qu'acteur que ce petit homme à l'accent prononcé, qu'il gardera toute sa vie, né le 8 août 1919 à Torre Annunziata, envisage son avenir, tournant dans plusieurs productions nationales de 1938 à 1941. Après des études de cinéma, il s'oriente cependant vers la production.


Il devient au cours des années 1950 une figure incontournable du cinéma italien, notamment dans la veine du "néo-réalisme", produisant les œuvres de Vittorio de SICA, dont il avait été l'admirateur, et de Frederico FELLINI, dont LA STRADA est particulièrement acclamée. Son prénom ("dino" signifie "terrible" en grec) le prédestine à la démesure, et de LAURENTIIS se montrera à la hauteur de cette espérance. En 1954, il produit, avec son associé Carlo PONTI, ULYSSE de Mario CAMERINI, dans lequel Kirk DOUGLAS interprète le héros grec confronté à ses épreuves homériques, en compagnie de Silvana MANGANO - qui a épousé le producteur après avoir tourné pour lui dans RIZ AMER - et Anthony QUINN. La séquence attendue de la confrontation avec le Cyclope géant, interprété par un acteur grimé, tient ses promesses grâce à un montage adroit laissant croire à sa présence conjointe avec l'équipage du héros. En 1956, le producteur se sépare de Carlo PONTI pour fonder sa propre compagnie, Dino de Laurentiis cinematographica, puis, en 1962, fait construire près de Rome de grands studios, "Dinocitta", où se tourneront des fresques internationales comme WATERLOO de Serguei BONDARTCHOUK, LA BIBLE de John HUSTON, et BARABBAS de Richard FLEISCHER, film célèbre qui imagine la destinée du voleur gracié au détriment du Christ, et dont Anthony QUINN exprime la conversion supposée d'un personnage initialement peu recommandable.

Ulysse et ses hommes dans l'antre du monstre.

Polyphème, l'un des plus anciens êtres de fiction, porté à l'écran dans ULYSSE. Une différence d'échelle d'avec les protagonistes humains qui évoque celle au cœur de KING KONG.

Dans les années 1970, les difficultés du cinéma italien conduisent Dino de LAURENTIIS à vendre ses studios - il seront un temps repris dans les années 1980 par le petit producteur américain Charles BAND - et à s'établir sur la côte est des États-Unis, où il connaît un de ses premiers succès américains avec UN JUSTICIER DANS LA VILLE en 1972, qui impose la figure du personnage de Paul Kersey ( interprété par Charles BRONSON ), parti en croisade contre le crime après le drame qui a frappé sa famille.


Un succès contesté

Le film auquel le nom de de LAURENTIIS demeure sans doute le plus attaché est probablement le remake de KING KONG. Porté par l'engouement pour le spectaculaire des années 1970 au travers des films catastrophes ( le réalisateur John GUILLERMIN a à son actif LA TOUR INFERNALE ), les studios Universal et Paramount se saisissent du projet. Le second, qui sera autorisé à réaliser le remake après une action en justice, requiert le concours du producteur italien qui accepte le défi et souhaite lui donner une tonalité de comédie, avec un humanoïde préhistorique de type néanderthalien. Il fait appel pour les effets spéciaux à Carlo RAMBALDI, qui lui avait apporté précédemment sa collaboration en créant un lion factice pour LA BIBLE et quelques trucages pour BARBARELLA, et lui demande de travailler en partenariat avec le maquilleur américain Rick BAKER, passionné par les Gorilles, qui avait déjà conçu le costume de l'anthropoïde de SCHLOCK de John LANDIS, l'Italien se concentrant plus particulièrement sur la partie mécanique du costume. Le producteur donne aussi à Carlo RAMBALDI son aval pour la construction d'une version mécanique grandeur nature du monstre en collaboration avec l'équipe du vétéran Glen ROBINSON, mais celle-ci, que beaucoup suspectent d'avoir été principalement conçue à des fins publicitaires, se révèle peu maniable et n'est principalement utilisée que pour quelques plans du film lors de la présentation de la Bête à la foule de New-York - Carlo RAMBALDI estimera avoir pâti du manque de temps pour perfectionner sa création. Les partisans de l'animation image par image, au rang desquels Ray HARRYHAUSEN, ne pardonnent pas à de LAURENTIIS d'avoir usé d'une autre technique que celle employée pour l'original - ceux-ci se montreront pourtant plus compréhensifs devant le King Kong purement virtuel du second remake de Peter JACKSON - et à l'époque l'animateur Jim DANFORTH démissionne même de l'Académie des Oscars pour protester contre celui qui est décerné aux effets spéciaux du film, qui laisse accroire que la gigantesque mécanique de RAMBALDI aurait à son actif l'ensemble des apparitions du monstre. Le tournage ne se fit pas sans difficultés, notamment en raison des problèmes de compréhension entre les équipes parlant deux langues différentes, ainsi que des intempéries ayant compliqué le tournage à Hawaï, et le public parvint même à dérober un des gigantesques doigts, une dent et un œil du monstre entre deux prises alors qu'il gisait au sein de la foule, au pied du World Trade center.


Dino de LAURENTIIS posant devant son monstre


Cette production emblématique de Dino de LAURENTIIS est loin d'être aussi mauvaise que nombre de critiques l'affirment, mais s'inscrit en réalité dans une tradition s'écartant sensiblement de celle de l'original. L'île n'est plus un monde fabuleux peuplé de Dinosaures, mais juste une île isolée sur laquelle vit une espèce géante, Kong étant d'ailleurs présenté moins comme un monstre brutal et maudit dans la tradition du cinéma expressionniste, que comme un Gorille auquel sa taille confère un caractère exceptionnel; cette conception plus naturaliste est confortée par la présence du personnage de Jack Prescott ( interprété par Jeff BRIDGES ), spécialiste des grands singes qui livre son analyse du comportement de l'animal avec la légitimité que lui confère son expérience. Ce "désenchantement du monde", cette vision réaliste et utilitariste en rupture avec l'emphase du pur fantastique, se traduit aussi par les motivations des personnages. Dans le KING KONG d'Ernest SCHOEDSACK et Merian COOPER de 1933, les Occidentaux découvrant Skull Island étaient une équipe de cinéastes cherchant à divertir les spectateurs en leur offrant le spectacle de l’exotisme, renvoyant à l'esprit de découverte des explorateurs - les deux réalisateurs étant eux-mêmes réellement des aventuriers ayant parcouru le monde avec leur caméra. Dans le remake de GUILLERMIN, le souci de rentabilité est le ressort essentiel, selon une vision du monde utilitaire et lucrative : c'est la recherche du profit qui décide le représentant d'une compagnie pétrolière à capturer le terrifiant dieu des indigènes - dont la cosmogonie s'écroule ainsi - en vue d'en faire une mascotte publicitaire, à défaut d'avoir pu découvrir le gisement d'hydrocarbures attendu, situation exacerbant le contraste entre le milieu sauvage et un environnement humain très technique (en l'occurrence le super-pétrolier), au sein duquel les individus sont principalement définis par leur fonction ( le dirigeant de la compagnie pétrolière, le géologue, le commandant du navire, le chef d’équipage), qui augure de la matrice de bien des films ultérieurs, comme ALIEN et LEVIATHAN - l'ouvrier noir qui estime être trop peu payé pour risquer sa vie pour une "petite blanche à moitié dingue", bien loin de la solidarité spontanée et chevaleresque des hommes du premier film autour de l'actrice enlevée, annonce les récriminations quant à leur salaire des deux techniciens du film de Ridley SCOTT, rechignant à leur mission d'exploration imprévue. L'ironie de cette vision satirique, qui se sert de l'intrigue pour faire réfléchir, comme nombre de films des années 1970, sur la destruction des milieux naturels et ses conséquences - Prescott parie ainsi que, privés de l'incarnation de la nature sauvage et menaçante que représentait Kong, les insulaires, qui vont s'ouvrir à la civilisation, seront tous devenus alcooliques dans dix ans - est que le pétrolier géant qui a été loué par la production pour le tournage de quelques séquences a pratiqué un dégazage clandestin en haute mer pour s'épargner la perte de temps d'un retour au port... Remarquons encore que la touche de comédie réminiscente présente au travers des paroles qu'adresse Dawn ( Jessica LANGE ) à Kong en tentant de l'amadouer, lesquelles paraissent futiles, comme lorsqu'elle s'enquiert du signe zodiacal de la créature géante, renvoie au milieu artificiel dans lequel baigne le mannequin; face au danger, la jeune femme tente spontanément de tromper sa frayeur en se raccrochant à ses propres repères, tels que les horoscopes de la presse liée à l'émancipation féminine et féministe des années 1970. Il faut encore noter au crédit du film la qualité et la force de la partition musicale de John BARRY, qui souligne mélodieusement les moments forts, à l'exception du dénouement, lequel n'oppose à la dureté des dernières scènes qu'un silence glacial, dépouillement laissant le spectateur seul face à l'émotion brute ( on a déjà consacré quelques lignes à cette composition à l'occasion de l'article sur Jerry GOLDSMITH en juillet 2009 ). A l'opposé du KING KONG de 1933 qui a porté le monstre anthropoïde à la hauteur d'un archétype fantasmatique quasi-onirique, le remake de 1976 a humanisé le Gorille géant; Dino de LAURENTIIS a réussi son pari consistant à rendre très émouvante la mort du personnage littéralement tombé de son piédestal au bas des deux tours jumelles après avoir été capturé dans son île et être devenu malgré lui la vedette de New-York.


Un acteur qui maîtrise parfaitement la communication non verbale... Certains ont déploré que la plupart du temps, Kong n'était "qu'un homme dans un costume" - c'est toujours plus qu'un singe numérique...

La révolte de Jack Prescott devant l’exécution programmée de la Bête.

Le succès commercial du remake incite de LAURENTIIS à produire d'autres films mettant en scène des animaux gigantesques. LE BISON BLANC, bien avant l'Australien RAZORBACK, transpose l'histoire de MOBY DICK sur la terre ferme, en confrontant un énorme bison albinos à deux chasseurs, un blanc - Charles BRONSON - et un Amérindien - Will SAMPSON, vu dans VOL AU-DESSUS D'UN NID DE COUCOU. RAMBALDI construit le modèle de l'irascible animal. Le sujet d'ORCA, dirigé par Michael ANDERSON qui avait réalisé L'AGE DE CRISTAL l'année précédente, avait été suggéré à Dino de LAURENTIIS par le succès commercial des DENTS DE LA MER. Le film se montre finalement assez original, en inversant en quelque sorte le sujet de MOBY DICK; cette fois, c'est le Cétacé qui poursuit de sa vindicte un chasseur, lequel a tué sa femelle en gestation en tentant de la capturer pour un parc d'attraction marin. Le chasseur joué par Richard HARRIS reconnaît ses torts et accepte finalement le défi de l'animal qui, à l'instar de la Créature du roman FRANKENSTEIN, l'entraîne dans les glaces boréales pour un duel sans merci loin de la civilisation. On y retrouve dans le rôle d'un Inuit Will SAMPSON ( dont l'un des derniers rôles sera en 1986 celui du chaman de POLTERGEIST 2 ). Les effets spéciaux irréprochables ne permettent pas, à la manière des grands singes réalisés par Rick BAKER pour GORILLES DANS LA BRUME, de distinguer le faux Orque épaulard mécanique des animaux dressés. La scène de l'avortement est particulièrement traumatisante - le soin apporté aux trucages peut d'ailleurs aussi être constaté à travers le détail, le fœtus d'Orque présentant bien les ébauches de membres postérieurs appelées à disparaître au cours du développement, qui manifestent l'origine terrestre de la lignée des Cétacés ( voir l'article "Darwin et la controverse sur l'évolution" ).


Il surgit dans la nuit au galop... c'est le Bison blanc, apparition spectrale mais non dénuée d'une redoutable puissance.


heroïc-fantasy et fantastique


De LAURENTIIS donne au Boa géant contre lequel se battait en KING KONG un héritier, un constrictor titanesque en lequel s'est changé un redoutable sorcier au cours d'une des épreuves qui attendent le héros éponyme de CONAN LE BARBARE, premier film inspiré par le personnage du Cimmérien inventé par l'écrivain Robert HOWARD. Voleur, puis guerrier solitaire, le personnage de Conan, qui fait connaître Arnold SCHWARZENEGGER en lui offrant son premier vrai rôle, combat pour sa survie dans un monde livré à la sorcellerie et prépare sa vengeance contre le diabolique assassin de sa famille, Thulsa Doom (James Earl JONES), devenu démiurge et grand prêtre d’un culte primitif zoolâtre. Le film de MILIUS, qui se concentre essentiellement sur la mystique nietzschéenne s'attachant au héros monolithique et la consécration de l'épée comme émanation suprême de la volonté capable de défier jusqu'aux sortilèges de la magie noire, accuse certaines longueursmais la beauté de la photographie, et surtout la musique sublime et extrêmement variée, composée par Basil POLEDOURIS - qui écrira aussi celle de ROBOCOP réalisé par VERHOEVEN, autre illustration de l'affirmation du héros vengeur, apporte par moment une réelle émotion à la vision du réalisateur, notamment lorsque Conan immole le corps de sa promise morte, Valéria, ou qu'il éradique le culte impie dans l'épilogue, faisant du film un véritable opéra instrumental, alternant le baroque, l'héroïque, le romantique et le mystique.



Même dans le monde antique et nitzschéen du Cimmérien, le Serpent est l'incarnation du Mal.


En 1984, POLEDOURIS apporte de nouveau son concours à la deuxième aventure du Cimmérien, CONAN LE DESTRUCTEURdirigée avec énergie par Richard FLEISHER, qui avait déjà tourné BARABBAS pour de LAURENTIIS. Le film se présente cette fois comme une aventure fantastique assez attrayante. La magie y est plus omniprésente, notamment au travers du superbe Château des songes qui se dresse au milieu d'un lac, et de Dagoth, un être surnaturel et malfaisant qui est appelé sur Terre par les séides de la reine Shadizar avide de pouvoir interprétée par Sarah Douglas ( qui a perdu sa candeur depuis LE CONTINENT OUBLIÉ ), projetant de sacrifier sa propre nièce vierge ( Olivia d'ABO ) à une monstrueuse divinité, créée par Carlo RAMBALDI. Le personnage de Conan s’humanise davantage, héros brave et intègre mais que son amour inconsolable pour sa défunte bien-aimée rend manipulable par de cyniques bonimenteurs lui promettant la résurrection de Valéria. Quant à la partition de POLEDOURIS, elle se montre assez envoûtante, notamment au terme de l'aventure, à la fois mélancolique et mystérieuse.
Restant dans la veine de l'héroic fantasy, de LAURENTIIS produit RED SONJA, toujours réalisé par FLEISCHER, avec en vedette une sculpturale inconnue, Brigit NIELSEN. Mais si CONAN a véritablement lancé la carrière de SCHWARZENEGGER, cette resucée n' a pas le même effet pour son homologue féminine et Dino de LAURENTIIS ne tarde pas à réaliser que le film est promis à un échec commercial certain. Il manifeste une nouvelle fois son caractère affirmé, en demandant à l'interprète de Conan de le rejoindre au plus vite. L'acteur, reconnaissant au producteur de lui avoir donné sa chance, se plie à sa demande, et celui-ci lui demande alors, sans lui donner d'explication, de réaliser des bouts d'essais durant quelques jours, le faisant monter à cheval et manier l'épée, avant de lui rendre simplement sa liberté. SCHARZENEGGER découvrira plus tard que l'intégralité des séquences tournées a été intégrée au film et que celui-ci a été rebaptisé KALIDOR, le nom du personnage auquel sa prestation a été attachée se substituant à celui de l'interprète féminine sur les affiches... Le montage fait des miracles, relatant en parallèle les aventures des deux personnages avant que ceux-ci ne se rencontrent enfin. Cependant KALIDOR, LA LEGENDE DU TALISMAN, demeure un assez terne pastiche de CONAN, et le plaisant anachronisme d'un automate en forme de monstre aquatique, ainsi que la présence d'une Araignée géante assez placide tenant compagnie à la Reine Gedren incarnée par Sandahl BERGMAN ( la Valéria de CONAN ), pas plus que la partition d'Ennio MORRICONE, moins marquante que celles de POLEDOURIS dans les volets précédents, ni même le final assez impressionnant avec l'ouverture de la terre engloutissant la machiavélique sorcière victime de son arme de destruction magique, ne suffisent réellement à soulever l'enthousiasme.
- Dino te remercie pour ta participation, Arnold! - Je cache ma joie, dit l'acteur qui promet qu'on ne l'y reprendra plus.
De LAURENTIIS associe son nom à des franchises de films d'épouvante célèbres. AMITYVILLE 2, au lieu d'une suite au film de Stuart ROSENBERG, AMITYVILLE LA MAISON DU DIABLE, s'intéresse au drame initial qui a définitivement ancré la demeure dans la mythologie des lieux maudits, à savoir à la dérive homicide du fils aîné de la famille, massacre que celui-ci a prétendu lors de son procès avoir perpétré sous l'influence de forces occultes diaboliques*. Le film réalisé par Damiano DAMIANI montre d'abord la séduction qu'il s'ingénie à exercer sur sa sœur adolescente au point que celle-là est prête à s'offrir à lui, mais cette corruption n'est pour lui qu'une étape de sa marche vers le Mal, le conduisant à décimer les siens, avant qu'un ecclésiastique, qui suspecte le pire, n'ait eu le temps d'intervenir. Le film adopte la thèse de l'assassin, la fin présentant celui-là en proie à une horrifiante transformation, ses traits se modifiant pour devenir littéralement ceux d'un démon, créé par le maquilleur John CAGLIONE. Le film baigne dans une ambiance malsaine soigneusement entretenue, jusqu'au basculement final dans le fantastique.
La séduction de la sœur dans AMITYVILLE 2, prélude à un basculement dans l'horreur absolue.
Dans les films fantastiques, la noirceur finit souvent par se concrétiser sous une forme hideuse.
L'abomination se manifeste à nouveau à l'occasion du final d' AMITYVILLE 3 de Richard FLEISCHER, à la suite d'autres manifestations inquiétantes qui ont signalé la permanence du Mal dans la célèbre demeure. Cinéaste accompli, assisté du célèbre directeur de la photographie Jack CARDIFF ( voir hommage de mai 2009 ), FLEISCHER permet à AMITYVILLE 3 de se hisser au-dessus des produits formatés exécutés dans le sillage d'un succès. La traque d'un poltergeist, lueur mauve fluorescente, jusqu'à la cave, lieu où s'ouvre la brèche menant à l'au-delà, est particulièrement marquante, baignant dans un climat d'étrangeté surréelle inquiétante.
Une apparition indique aux occupants de la maison un chemin, à ne suivre qu'avec précaution. Bougre d'ectoplasme !

Le film était destiné à être vu en relief.

Dino de LAURENTIIS a également produit HALLOWEEN 2 de Rick ROSENTHAL, rééditant en plus explicite les exactions du tueur masqué de la série, initialement mis en scène par John CARPENTER, ainsi qu'HALLOWEEN 3, premier film de Tommy Lee WALLACE, collaborateur habituel de CARPENTER et scénariste d'AMITYVILLE 2. Initialement basé sur un scénario de Nigel KNEALE, réécrit par le metteur en scène de manière à rendre l'horreur plus visuelle, le film tourne autour d'un fabricant de jouets, Cochran, qui s'avère être un sorcier résolu à rendre à Halloween - originellement Samhain - devenu un évènement commercial toute son épouvante métaphysique, ses masques étant pourvus d'un petit émetteur relié à un cristal prélevé sur le site magique de Stonehenge, devant déclencher une horreur effroyable sur ceux qui les porteront le soir fatidique. La représentation allégorique du mal au travers du tueur inhumain des deux films précédents devient dans HALLOWEEN 3 métaphorique: le visage d'un enfant porteur d'un des masques, utilisé comme cobaye par Cochran, explose pour révéler une myriade de serpents et d'araignées; John CARPENTER, qui a supervisé le film de Tommy Lee WALLACE, utilisera en 1988 de manière similaire pour PRINCE DES TÉNÈBRES l'image de grouillements de lombrics sur les vitres et de transformation d'un personnage en nuées de cafards pour illustrer la corruption satanique qui investit une vieille église. Le héros alcoolique joué par Tom ATKINS - qui réitère son rôle dans LA NUIT DES EXTRA-SANGSUES (NIGHT OF THE CREEPS) - tente de s'opposer à la manigance de Cochran, interprété avec une froideur glaçante par l'Irlandais Daniel O'HERLIHY - figure de la série de films ROBOCOP - qui lance à sa poursuite des automates meurtriers, depuis son usine de Santa Mira ( localité qui évoquera certainement quelque chose aux lecteurs ayant lu l'article précédent ). Dino de LAURENTIIS a eu l'intelligence de permettre aux créateurs d'HALLOWEEN 3 de porter à son terme un projet s'écartant considérablement du modèle de la série, aboutissant à un film assez original baignant dans une musique envoûtante composée par John CARPENTER, qui augure en partie de celle qu'il composera peu après pour CHRISTINE.
"Laissez venir à moi les petits enfants..." Cochran, un personnage redoutable, combinant la magie la plus effroyable avec la technologie de pointe et les techniques du marketing.
Les succès commerciaux des romans de Stephen KING ont incité le producteur à entamer une série d'adaptations de ses œuvres. CHARLIE (FIRESTARTER) de Mark LESTER met en scène une petite fille ( Drew BARRYMORE ) capable de déclencher des incendies à volonté, dont le pouvoir, comme dans FURIE, suscite la convoitise d'une inquiétante organisation. CAT'S EYE est composé de trois sketchs; les deux premiers mettent en scène des personnages très cyniques, le troisième un troll maléfique créé par Carlo RAMBALDI menaçant une petite fille (interprétée par Drew BARRYMORE), épisode qui a nécessité la construction de décors surdimensionnés de sa chambre pour créer l'illusion de sa petite taille. Stephen KING a lui-même réalisé MAXIMUM OVERDRIVE, qui dépeint le siège d'habitants cernés par des objets soudain animés d'impulsions meurtrières; l'écrivain, qui se montrait très critique à l'endroit des adaptations précédentes, s'est déclaré peu satisfait du résultat et n'a plus par la suite tenté de revenir à la mise en scène. Stephen KING a conçu un scénario original pour PEUR BLEUE ( SILVER BULLET) de Daniel ATTIAS, qui dépeint la recherche, dans une atmosphère assez oppressante, de l'identité humaine d'un loup-garou qui a commis plusieurs meurtres; c'est toujours Carlo RAMBALDI qui s'est chargé des effets spéciaux, mais le producteur les a quant à lui estimés décevants.
LES DÉMONS DU PASSÉ de Tom McLOUGHLIN est un téléfilm dans lequel on retrouve deux des thèmes principaux de Stephen KING, la malfaisance ordinaire et la nostalgie parfois douloureuse de l'enfance. Un enseignant affecté dans la commune dans laquelle il a grandi s'aperçoit que trois de ses élèves qui ont été assassinés sont remplacés par de nouveaux lycéens qui ressemblent en tous points à trois voyous décédés qui avaient causé autrefois la mort de son frère. Ceux-ci sont revenus de l'au-delà pour le tourmenter à nouveau et s'en prendre à son jeune fils. Après s'être heurté à l'incrédulité de ses proches, il s'efforce de leur résister, cherchant de l'aide auprès du dernier représentant de la bande en vie, rongé par sa culpabilité ( William SANDERSON, le J.F. SEBASTIAN de BLADE RUNNER ), et obtenant finalement le secours de son petit frère revenu à son tour de la mort pour éviter un nouveau crime. Le dénouement parvient parfaitement à susciter l'émotion devant la simplicité de ces éphémères retrouvailles, même si d'aucuns ont estimé que les effets dramatiques étaient un peu trop appuyés.
Le héros des DÉMONS DU PASSÉ, interprété par Tim MATHESON, confronté à un passé qui ne passe pas.
Un des revenants apparaît sous une forme qui traduit sa vraie nature diabolique.
Un frère qui n'est revenu que le temps d'un adieu.
Le film relatif à Stephen KING qui, parmi les productions de LAURENTIIS, a été le plus favorablement accueilli est THE DEAD ZONE réalisé en 1983 par David CRONENBERG, qui avait déjà abordé le thème des pouvoirs paranormaux en 1980 avec SCANNERS, un affrontement entre télépathes œuvrant pour des organisations rivales. Christopher WALKEN ( vu dans BRAINSTORM ) y joue le rôle de Johnny Smith, un accidenté de la route plongé dans un long coma qui, à son réveil, réalise qu'il est doté de la capacité de voir l'avenir sous forme de flashs incontrôlables qui envahissent soudain son esprit et épuisent ses forces vives ( dans le roman, c'est l'addition de deux traumatismes qui cause la survenue de son pouvoir ). Devenu malgré lui une vedette après avoir permis le sauvetage d'une petite fille prise dans un incendie, Johnny vit en reclus pour éviter les innombrables sollicitations, et se sent d'autant plus solitaire que son ancienne petite amie s'est mariée durant son long séjour à l'hôpital. C'est avec réticence qu'il aide la police à résoudre une série de crimes sadiques, s'efforce de préserver la vie d'un enfant dont le père veut l'envoyer patiner sur un lac gelé qui va s'effondrer et, finalement, décide d'abattre un politicien, Greg Stillson, dont la mégalomanie causerait la troisième guerre mondiale une fois installé à la Maison blanche; il n'échouera qu'en apparence, son acte ayant permis de mettre à jour la véritable nature du personnage. THE DEAD ZONE émeut par sa simplicité sans fioriture, histoire touchante d'un homme ordinaire dont le destin lui échappe et qui se trouve contraint de remplir une mission qui le dépasse. Le style de CRONENBERG se fait tout en retenue, à l'image du médecin juif de Johnny Smith - incarné par Herbert LOM, qui avait notamment interprété le Capitaine Nemo dans L'ILE MYSTERIEUSE version Ray HARRYHAUSEN - qui, apprenant trop tardivement que sa mère a survécu à la seconde guerre mondiale, renonce finalement à lui révéler la vérité. Les acteurs donnent une vraie intensité à leur personnage, notamment WALKEN dans le rôle du visionnaire tourmenté, Anthony ZERBE ( mémorable dans l'épisode LA NUIT DU COMPLOT des MYSTÈRES DE L'OUEST ) en père intransigeant du petit garçon, ne réalisant que trop tard sa vanité, et Martin SHEEN, vu notamment dans NIMITZ, RETOUR VERS L'ENFER, en politicien charismatique, faussement chaleureux et dépourvu de tout scrupule.
Le tunnel hautement symbolique vu dans DEAD ZONE ( repris sur l'affiche du film ), auquel les éclats de lumière confèrent l'apparence d'une toile d'araignée; mène-t-il à la vérité ou à la mort?

Un certain découragement
Si L'ANNÉE DU DRAGON, enquête policière à Chinatown, a été unaniment acclamée, tout comme THE DEAD ZONE, d'autres productions ambitieuses de Dino de LAURENTIIS ne suscitent pas le même engouement.
Dino de LAURENTIIS était un des derniers producteurs à l'ancienne, un géant du cinéma que les critiques n'ont pas toujours ménagé ( illustration originale ).
Beaucoup de critiques trouvent très fade sa nouvelle version du BOUNTY réalisée par Roger DONALDSON (futur réalisateur de LA MUTANTE), en dépit de la composition musicale marquante de VANGELIS. Ce film historique ne manque cependant pas d'intérêt, s'écartant de la vision traditionnelle, sans doute schématique. CHRISTIAN et le capitaine BLIGH y sont présentés initialement comme des amis, et ce dernier n'est plus la brute sadique incarnée par Charles LAUGHTON dans la première version, ni un supérieur odieux et inhumain tel que représenté par Trevor HOWARD dans la suivante, mais simplement un Britannique un peu guindé cependant capable d'inspirer partiellement la sympathie, au travers d'Anthony HOPKINS qui lui prête vie. L'épilogue rompt quelque peu cette vision plus nuancée du drame ; il suggère bien la déréliction qui va frapper les mutins confrontés aux conséquences de leurs actes, mais, à l'inverse de la version précédente dans laquelle l'amirauté, tout en confortant l'autorité hiérarchique, blâmait l'officier pour son intransigeance et son inhumanité en lui faisant valoir que celles-la n'étaient pas pour rien dans la révolte de ses hommes, il délivre sans ambiguïté un satisfecit au Capitaine BLIGH pour avoir ramené en vie la majeure partie des bannis du Bounty qui partageaient sa chaloupe, en omettant les torts dont il a pu faire montre antérieurement à la mutinerie et qui ont suscité celle-ci ; l'acteur jouant CHRISTIAN, Mel GIBSON, trouve même pour sa part que le film aurait dû prendre davantage partie pour l'officier renversé.
L'adaptation du roman de science-fiction mystique de Frank HERBERT, DUNE, était une entreprise audacieuse, ayant conduit à plusieurs tentatives précédentes avortées, d'abord en 1971 à l'initiative d'Edgar P. JACOBS, producteur de LA PLANÈTE DES SINGES, décédé avant que le projet ait abouti. Un second essai sans lendemain est initié en 1974 par une maison de production française, prévoyant de confier la mise en scène au chilien Alejandro JODOROWSKY, le rôle de l'Empereur à l'extravagant peintre Salvador DALI, et faisant appel aux services d'artistes, Chris FOSS, Jean GIRAUD-MOEBIUS et H.R.GIGER, qui œuvreront ultérieurement sur ALIEN à l'issue de l'échec. Dino de LAURENTIIS acquiert à son tour les droits en 1979 et engage Ridley SCOTT pour le diriger, mais, à nouveau, le scénario n'est pas jugé satisfaisant, en dépit de l'implication du romancier, et le metteur en scène britannique déclare forfait. De LAURENTIIS ne se décourage pas, renégociant, à l'expiration des droits d'adaptation, le contrat, en acquérant de surcroît ceux des suites du roman initial. En 1983, après six mois de réécriture avec le metteur en scène David LYNCH, un scénario suffisamment concis voit enfin le jour.
Dino et sa fille Rafaëlla, associés sur la production de DUNE.
L'hostilité quasi générale à l'encontre du film, accusé de trahir le roman, paraît très excessive, car si le synopsis condense l'intrigue, notamment la fuite dans le désert de Paul Atreides ( Kyle McLachlan ), suite à la tentative de massacre de la famille princière commanditée par le Baron Harkonnen, celui-ci est pour l'essentiel fidèle au roman, avec de surcroît l'apparition, dès le prologue, des Navigateurs de la Guilde, qui intervenaient dans la suite du livre, mais qui s'avèrent avoir un rôle essentiel dans les sphères de pouvoir initiateurs de la conspiration. Le film relate comment, vers l'an 10 000, Paul devient un véritable messie sur la planète des sables Arrakis après avoir échappé à la mort et renverse, avec l'aide d'une armée d'insoumis appelés les Fremen, l'Empereur de la galaxie et son allié Harkonnen, dont les intrigues visent à préserver l'approvisionnement en Épice, une substance engendrant des pouvoirs surnaturels qui est produite par les vers géants indigènes. David LYNCH lui-même estimera que sa créativité a été étouffée par la superproduction. Cependant, en dépit de son caractère mystique et grandiloquent - bien que Kyle McLachlan ait moins de charisme que Jürgen PROCHNOW qui interprète son père, le réalisateur a pu inclure dans DUNE les éléments thématiques réminiscents de ses deux premiers films, ERASERHEAD et THE ELEPHANT MAN. Au sexe présenté de manière dégradante dans ERASERHEAD ( la versatilité de la voisine d'Henry et le rire concupiscent et vulgaire de son partenaire d'un soir ) et THE ELEPHANT MAN ( le baiser forcé entre l' "Homme-Éléphant" et les prostituées au milieu des ricanements narquois ) qui combine sensualité détournée, désir d'avilir et violence, correspond dans DUNE le vampirisme abject du baron Harkonnen ( Kenneth McMILLAN, qui interprète le chef de gare dans RUNAWAY TRAIN ) sur de jeunes éphèbes sacrifiés qui a tout du viol. Le thème de la répulsion suscitée par la réalité organique du corps ( poulet rôti baveux parcouru de spasmes, fœtus immature, fragments interminables de cordon ombilical qui se changent en vers dans ERASERHEAD, difformités semblant le sceau injuste du destin dans THE ELEPHANT MAN ) est présent dans DUNE au travers des verrues dégoulinantes de pus du baron Harkonnen et des mutants inquiétants à l'aspect d'embryons démesurés créés par Carlo RAMBALDI ( les Navigateurs de la Guilde aux allures de limaces, transformés par L'Épice ), autant de représentations dérangeantes de la corporalité, perçue dans son altérité au travers de ses altérations dans une perspective suggérant un rapprochement avec les obsessions cronenbergiennes. Cette vision du corps envisagé dans sa matérialité la plus brute fait écho à un environnement presque organique lui aussi, suintant, empli de jets de vapeur, de canalisations intestinales moites, de bruits sourds de machineries, qui évoquent les soubresauts de la digestion effectuée par un gigantesque organisme, éléments omniprésents dans ERASERHEAD, évocateurs de la révolution industrielle dans THE ELEPHANT MAN, ou encore constituants technologiques du futur baroque de DUNE. La médiocre réception du film n'empêchera pas de LAURENTIIS de produire l'œuvre suivante de David LYNCH, BLUE VELVET, description, sans doute quelque peu surestimée, de la perversion ordinaire.
Encore un animal géant dû à l'initiative de Dino de LAURENTIIS, cette fois extraterrestre, un Ver géant de DUNE, malheureusement vu plus fugacement dans le film.
Dino de LAURENTIIS a aussi mis en chantier TOTAL RECALL, adaptation d'une nouvelle de Philip K. DICK sur le trouble de la personnalité d'un agent double, dont les scénaristes Dan O'BANNON et Ronald SHUSETT ont tiré un scénario échevelé. David CRONENBERG, à la suite de THE DEAD ZONE, devait en assurer la réalisation, mais celui-ci n'apprécia pas la direction que le traitement donnait à l'histoire et la réécrit à sa manière. Dino de LAURENTIIS soutint SHUSETT, qui estimait, paradoxalement, la version de CRONENBERG trop fidèle à la vision de l'écrivain, et le réalisateur décida alors de quitter le projet. Le producteur finira à son tour par déclarer forfait, découragé par l'échec commercial de DUNE, et seule la persévérance de l'acteur SCHWARZENEGGER désireux d'obtenir le rôle permet finalement au film de voir le jour avec de nouveaux producteurs, Carolco, spécialistes de films d'action. TOTAL RECALL, sous la direction de Paul VERHOEVEN, est une aventure trépidante qui entraîne le héros dans les tréfonds de Mars fraîchement colonisé, mais il est vrai que l'action préémine souvent sur l'atmosphère psychologique que CRONENBERG souhaitait pour sa part développer en confiant le rôle principal à William HURT, un acteur au jeu plus introspectif.


Dessin de production pour la version inaboutie de TOTAL RECALL montrant une foreuse se dirigeant vers le Sphinx de Mars.
Ne rechignant néanmoins pas devant les difficultés, Dino de LAURENTIIS se lance dans une nouvelle aventure quelque peu risquée : donner une suite à KING KONG, en espérant renouer avec l'engouement populaire du film de 1976, faisant même appel au réalisateur du premier volet, John GUILLERMIN, de même à nouveau qu' à Carlo RAMBALDI pour les effets spéciaux. Si la disparition soudaine du gorille géant, tombé du World Trade Center - bâtiment détruit depuis par des terroristes - pouvait à l'issue de la projection inciter les spectateurs à souhaiter déraisonnablement un miracle permettant de rendre la vie au monstre, ce serait pour autant beaucoup s'avancer que de prétendre que son retour sur les écrans, après une période de dix ans, était particulièrement attendu. KING KONG LIVES débute sur des images spectaculaires de l'énorme animal, maintenu dans le coma artificiel depuis un an, surplombé par des passerelles sur lesquelles circule le personnel médical. L'équipe entreprend de greffer à Kong un cœur artificiel à sa mesure, mais il s'avère nécessiter une transfusion - par chance, une congénère femelle est découverte et ramenée aux États-Unis. Le monstre, de manière prévisible, s'arrache bientôt à ses entraves afin de retrouver la femelle dont il a détecté la présence, avant que les deux énormes animaux ne gagnent des zones moins peuplées. Le film peut difficilement rivaliser avec son modèle et sa scénographie parfaite commandée par le synopsis original. D'autres atouts de la version de 1976 font défaut : la partition de John SCOTT se fait très discrète, tandis que les péripéties, de par le cadre rural, sont moins spectaculaires; il faut cependant souligner le soin apporté aux décors, notamment aux arbres qui rendent l'effet d'échelle, alors que le gigantisme des deux Anthropoïdes n'est plus mis en valeur spontanément par le cadre urbain. Les effets spéciaux relatifs aux monstres eux-mêmes sont acceptables, mais le rendu est inégal d'un plan à l'autre. Plus gênantes sans doute sont certaines incohérences: passons sur la subite conversion du chasseur traqué par le Gorille géant femelle en protecteur inconditionnel d'une capture vendue sans état d'âme, mais l'absence de cicatrice pectorale au sortir de l'opération à cœur ouvert de King Kong est déconcertante, sans parler de la gestation éclair de la femelle, qui paraît donner naissance au petit au bout de seulement quelques jours - mépris des lois élémentaires de la biologie contrastant avec la consultation par les promoteurs du film d'un spécialiste de la chirurgie cardiaque, afin de rendre crédible l'opération sur laquelle repose le principe de la suite; il aurait été tout à fait concevable de ne révéler au spectateur l'existence du rejeton au côté de sa mère rendue à la jungle que lors de l'épilogue, concluant le film sur une touche d'émotion inattendue, mais les auteurs ont préféré verser dans le mélodrame, l'actrice Linda HAMILTON incitant avec insistance Kong mourant à regarder sa progéniture avant de s'éteindre. Par ailleurs, le premier rôle masculin parvient à inspirer la sympathie, mais ne possède probablement pas le même charisme que son devancier Jeff BRIDGES. John ASHTON - le shérif timide de TOMMYNOCKERS, L'INVASION COMMENCE - rend quant à lui fort justement le militaire obstiné; sa mort, alors qu'il est filmé de trois quart, couvert de sang, n'a malgré tout pas la force de celle du troisième rôle du film de 1976, Charles GRODIN, incarnant l'entrepreneur Fred Wilson réalisant brutalement qu'il va être écrasé par celui qu'il percevait comme sa propriété.
On n'impose pas durablement la discipline à King Kong, même convalescent... Un décor combinant le médical et l'industriel, dont on retrouvera l'esthétique peu après dans LA MOUCHE 2, la suite du film de CRONENBERG, qui fait découvrir le complexe de Bartok industries, juste évoqué dans le volet initial.
La femelle ne goûte pas davantage la captivité. Les (très) grands singes ont droit au respect...
Les grands acteurs font souvent un rappel avant de sortir de scène; King Kong nous rejoue pour le plaisir la scène de sa mort.
Les aléas du succès mènent en 1988 à la faillite le Laurentiis Entertainment Group. Le producteur crée une nouvelle compagnie en 1990, Dino de Laurentiis Company, mais celle-ci se fera relativement discrète. Alors que son neveu Agostino de LAURENTIIS avait produit LEVIATHAN, Dino apporta officieusement son concours à une autre aventure sous-marine de science-fiction comportant des monstres, L'ABÎME (THE RIFT) de l'Espagnol Juan PIQUER, produit par sa fille Francesca après LA MORT VISQUEUSE (SLUGS) du même réalisateur portant sur une invasion de limaces devenues  carnivores - elle-même étant mariée au producteur espagnol José Antonio ESCRIVA. En matière de fantastique, la Dino de Laurentiis Company se contentera de produire EVIL DEAD 3 de Sam RAIMI, qui confronte l'acteur Bruce CAMPBELL à une armée de morts-vivants dans un style grand-guignolesque. De LAURENTIIS produira un film avec Sylvester STALLONE, ASSASSINS, et des adaptations du romancier Thomas HARRIS, avec LE SIXIEME SENS, puis les films réalisés à la suite du SILENCE DES AGNEAUX, autour de la figure d'un assassin sadique et d'une certaine fascination pour l'atroce.
 
Dino de LAURENTIIS s'impliqua suffisamment dans la production du film L'ABÎME (THE RIFT) pour se rendre dans les coulisses, aux côtés d'un technicien tenant l'une des "créatures-cerveau".
De LAURENTIIS avait finalement prévu de revenir à la science-fiction, en produisant avec sa troisième épouse Martha une adaptation du roman SWARM de Frank SCHATZING, intrigue à tonalité écologique décrivant les attaques d'animaux marins contrôlés par une forme de vie unicellulaire pourvue d'une intelligence collective, qui tente de se débarrasser de l'humanité en raison des périls que son développement fait courir aux milieux marins.
Le producteur laisse cinq filles; son unique fils Frederico a été tué en 1981 lors d'un accident d'avion survenu tandis qu'il réalisait un documentaire sur la pêche au saumon; il aspirait à devenir photographe professionnel. Il s'était investi dans le remake de KING KONG de 1976, et l'une des nombreuses photos de gorilles qu'il avait prises au zoo de Los Angeles avait servi de modèle pour la sculpture du masque du singe géant.
Dino de LAURENTIIS a été un producteur éclectique qui a simultanément travaillé avec des réalisateurs prestigieux comme Ingmar BERGMAN ( L'ŒUF DU SERPENT ), et produit les adaptations assez déconcertantes de bandes dessinées, DANGER DIABOLIK, BARBARELLA et FLASH GORDON, si bien que le terme "kitsch" paraît avoir été inventé pour les qualifier. Ce dernier film, sorte "d'opéra-rock", a malgré tout, pour ce qui nous concerne, pour intérêt de nous permettre d'entrevoir deux créatures relativement réussies, le monstre tapi dans le sous-bois qui se saisit de Flash, et la petite créature pourvue d'un dard venimeux dont se servent les hommes de Barin à l'encontre de leurs captifs.
Traîtreusement embusquée sous un tapis de feuilles mortes, cette créature gloutonne attend l'imprudent dans le film FLASH GORDON ( 1980 ).
Cette difficulté à cataloguer dans un registre précis ce producteur se fiant à ses propres goûts, et sa propension à monter des productions démesurées, lui ont valu une image contrastée, voire même souvent dépréciative, d'un pourvoyeur de films dispendieux et artistiquement discutables. Pourtant, il a, par sa détermination, donné corps à bien des œuvres dont beaucoup sont estimables, et il s'est vu finalement attribuer en 2001 le prix Irvin Thalberg, qui récompense les producteurs éminents et qui atteste qu'il aura laissé sa marque dans le 7 ème art.

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Le 5 octobre 2010 a disparu à l'âge de 93 ans Roy Ward BAKER, metteur en scène britannique qui était entré dans le monde du cinéma tout en bas de l'échelle, et, dans le domaine du fantastique, avait notamment tourné pour la Hammer un certain nombre de films ayant le vampirisme pour objet, dont l'improbable rencontre orchestrée sous l'égide du fameux acteur Peter CUSHING entre le vampirisme de la Hammer et le kung-fu, LES 7 VAMPIRES D'OR (1974), et un film à sketchs, LE CLUB DES MONSTRES en 1980 - un titre qui ne peut laisser indifférent notre ami Mario GIGUÈRE !** - lequel, en dépit de la défection de CUSHING et de Christopher LEE, mettait en scène Vincent PRICE présentant trois sketchs : les deux premiers, l'histoire d'un personnage d'une grande laideur séduit par une femme qui n'en veut qu'à son argent, et la traque d'un vampire avec Donald PLEASANCE dans une séquence échevelée et burlesque, sont assez plaisants tandis que le troisième est plus effrayant, menant un producteur de films d'épouvante en repérage dans un hameau peuplé d'authentiques goules. Le réalisateur avait aussi réalisé la troisième adaptation sur grand écran des aventures du professeur Quatermass inventées par Nigel KNEALE, LES MONSTRES DE L'ESPACE (QUATERMASS AND THE PIT), dans lequel le scientifique, interprété par Andrew KEIR - le prêtre vigoureux de DRACULA, PRINCE DES TÉNÈBRES - découvre que des extraterrestres ont tenté de manipuler l'humanité pour servir leurs desseins, en contrôlant leur évolution. Le film marquera John CARPENTER, qui donnera à la localité maléfique de L'ANTRE DE LA FOLIE le nom de Hobb's end en référence au nom de la station de métro où la découverte est effectuée. Si, en raison du style posé de BAKER, LES MONSTRES DE L'ESPACE n'a peut-être pas le charisme des deux films réalisés par Val GUEST qui l'ont précédé, il n'en demeure pas moins un classique du cinéma de science-fiction.
Un homme d'allure discrète et réservée, dont la carrière comporte néanmoins nombre de films d'horreur, et qui ne rechigne pas à traiter de sexualité de manière sulfureuse - à noter la disparition le 23 novembre 2010 d'une actrice de la Hammer, Ingrid PITT, qui avait notamment incarné un vampire lesbien dans un de ses films, THE VAMPIRE LOVERS.


QUATERMASS ( à droite ) perplexe devant un étonnant fossile.

On renverra pour une filmographie plus détaillée de ce cinéaste qui a notamment fait tourner Marilyn MONROE et Mylène DEMONGEOT à ces pages:



On recommandera aussi cette rubrique nécrologique aux lecteurs pratiquant l'anglais :


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Un autre réalisateur, Irvin KERSHNER, est décédé le 27 novembre 2010 à 87 ans d'un cancer du poumon. Il était notamment connu pour le thriller LES YEUX DE LAURA MARS ( 1978 ), adaptation d'un scénario de John CARPENTER avec Faye DUNAWAY et Rene AUBERJONOIS ( le géologue ironique du remake de KING KONG ), dont le sujet, la connection avec les yeux d'un assassin, préfigure l'épisode LES YEUX DE LA PEUR d'AU-DELA DU REEL, L'AVENTURE CONTINUE, ainsi que pour L'EMPIRE CONTRE-ATTAQUE ( 1980 ), second volet de la trilogie initiale de LA GUERRE DES ETOILES que lui avait confié George LUCAS, son ancien élève. L'EMPIRE CONTRE-ATTAQUE débute par la grandiose attaque de la base rebelle sur la planète des glaces, nommée antinomiquement "Hoth", par les forces maléfiques de l'Empire, puis le film se concentre sur l'initiation du jeune héros aux pouvoirs magiques de la Force, sous la direction d'un petit personnage humanoïde animé par Frank OZ. Le film se conclue sur l'affrontement entre le jeune homme et le cruel Dark Vador, qui devient un conflit personnel lorsque ce dernier révèle qu'il est le père de son adversaire. La mise en scène de KERSHNER confère une grande intensité shakespearienne à cet épisode, qui a souvent été considéré comme le plus réussi de la trilogie.


Qu'il s'agisse du méchant Dark Vador ( au-dessus à droite ) dissimulé par un masque ou d'une marionnette humanoïde à travers Yoda ( au-dessous ), KERSHNER parvient à donner une vraie densité aux personnages de L'EMPIRE CONTRE-ATTAQUE.

Une gigantesque créature guettant les imprudents dans un cratère d'astéroïde, une péripétie de L'EMPIRE CONTE-ATTAQUE.

Le bilan sera plus mitigé avec un autre second volet, ROBOCOP 2 ( 1989 ). Le personnage de Robocop est conditionné pour ne pas nuire aux manigances du cartel OCP qui contrôle la police sous l'égide du "Vieux"( Daniel O' HERLIHY ) très vénal, tandis que la psychologue Juliet Faxx cherche d'autres sujets plus faciles à manipuler pour en faire des cyborgs. Son choix se porte sur un dealer, Caïn, dont elle hâte la fin pour récupérer son cerveau, tandis que le premier Robocop soumis à une pitoyable et humiliante déchéance s'efforce de recouvrer la pleine possession de ses moyens, tout en se résignant par grandeur d'âme à repousser les attentions de sa femme, laquelle est à juste titre persuadée que ce qui subsiste de son mari est toujours en vie sous l'armure de métal, au cours d'une scène émouvante, avant de défier le nouveau Robocop maléfique, dans un affrontement assez grotesque qui rappelle le combat des films de science-fiction japonais. Tom NOONAN ( LE SIXIÈME SENS ), dans le rôle de Caïn, paraît un peu terne, semblant plus à l'aise dans un rôle plus nuancé comme celui du chômeur suicidaire du pilote de DEMAIN A LA UNE. KERSHNER livre un film assez hétéroclite, se focalisant surtout sur la violence dont il est fait un étalage plutôt complaisant, comme si le metteur en scène était tombé dans le travers dénoncé dans LES YEUX DE LAURA MARS. Si on veut chercher une unité au film, il faudrait y voir, comme dans le premier ROBOCOP et dans LA MOUCHE 2, la peinture d'un monde sans scrupules, gangrené par l'ambition, où pratiquement tous les personnages sont antipathiques. Les femmes y sont tout autant que les hommes carriéristes et dépourvues de sensibilité, comme l'infirmière de LA MOUCHE 2 aussi étrangère à la compassion qu'au sentiment maternel, et ne laissent paraître leur féminité qu'à l'occasion d'une stratégie de séduction destinée à s'attirer les faveurs d'un supérieur à des fins d'avancement, en l’occurrence la psychologue de ROBOCOP 2, peinture aussi éloignée que possible des douces héroïnes des films de science-fiction des années 1950.



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Autre disparition récente, celle de l'acteur canadien Leslie NIELSEN( son frère a été vice-premier ministre du Canada ), disparu le 28 novembre 2010 des suites de complications pulmonaires à l'âge de 84 ans. Il était surtout connu des amateurs de science-fiction pour le rôle principal de PLANÈTE INTERDITE, le classique de Fred Leo MCWILCOX de 1956, inspiré par une pièce de SHAKESPEARE, LA TEMPÊTE. Il y interprète le commandant d'un navire venu secourir une expédition sur la planète Altaïr IV, sur laquelle ne subsistent que deux survivants, le Docteur Morbius ( Walter PIDGEON ) et sa fille ( Anne FRANCIS ), servis par leur robot omniprésent, bénéficiant de la technologie d'une civilisation disparue, celle des Krells. L'équipage est bientôt victime d'un être maléfique invisible au cours de scènes très angoissantes, lequel s'avérera avoir été engendré à partir de la formidable source d'énergie extraterrestre par l'inconscient de Moebius, père très possessif. L'atmosphère très dépaysante et souvent même poétique sert ce film métaphysique, en lequel on pourrait déceler l'écho de la montée de l'inquiétude à l'endroit de la puissance de l'atome alors émergente.


Des paresseux géants sur Altaïr ? Le Commandant Adams ( à gauche ) interrogatif devant le moulage d'une trace révélant la griffe d'un être invisible effrayant.

En 1966, on le retrouve à la une d'un film fantastique - initialement destiné à être le pilote d'une série - intitulé LA CRÉATURE DES TÉNÈBRES ( DARK INTRUDER ), réalisé par Harvey HART. Leslie NIELSEN y joue un inspecteur qui enquête sur des meurtres, en fait commis par son propre frère, une créature diabolique. Le film, angoissant et bien mené, baigne dans une atmosphère se rapprochant de celle des grands classiques littéraires du XIXème siècle, bien qu'une allusion à la divinité maléfique Azathoth renvoie à l'œuvre plus récente de Lovecraft. L'acteur tournera dans plusieurs épisodes de la série fantastique NIGHT GALLERY, dans un épisode de VOYAGE AU FOND DES MERS et dans diverses séries policières, gratifiant ALFRED HITCHCOCK PRESENTS, CANNON et COLUMBO de plusieurs apparitions.

Leslie NIELSEN marqué physiquement à l'issue d'un contact avec le surnaturel.

Avec un tel faciès difforme, difficile de dire si cet inquiétant visiteur rit sous cape (LA CRÉATURE DES TÉNÈBRES ).

Au cinéma, il incarne un mari vengeur dans un sketch du film d'épouvante CREEPSHOW ( 1982 ) de George ROMERO, et un capitaine en compagnie de Patrick McNEE ( CHAPEAU MELON ET BOTTES DE CUIR ) face à un extraterrestre pas totalement inoffensif, comme l'indique le titre, dans THE CREATURE WASN'T NICE de Bruce KIMMEL( 1983 ), parodie des classiques de science-fiction. Ces deux films versant dans l'humour manifestent la nouvelle orientation de la carrière de Leslie NIELSEN, désormais ouvertement tournée vers la comédie.

C'est grave docteur? L'extraterrestre de CREATURE WASN'T NICE paraît directement réminiscent de la production américano-japonaise BATAILLE AU-DELÀ DES ETOILES - en anglais, THE GREEN SLIME.

Après avoir incarné, au sein d'une galerie de personnages farfelus, le médecin pince sans-rire de Y'A-T-IL UN PILOTE DANS L'AVION? (1980) de Jim ABRAHAMS et des frères ZUCKER, les auteurs font de cet admirateur de Charlie CHAPLIN leur interprète favori. Si son personnage n'apparaît pas dans la suite, Y'A-T-IL ENFIN UN PILOTE DANS L'AVION?, il est la vedette de la série de films Y'A-T-IL UN FLIC... initiés par une série télévisée, au travers de son personnage de Frank Drebin, policier maladroit et gaffeur parvenant à mener à bien ses missions de manière inattendue et souvent involontaire. Il réitère ce type de prestation dans LE DÉTONATEUR, dans DRACULA, MORT ET HEUREUX DE L'ÊTRE, de Mel BROOKS, AGENT ZÉRO ZÉRO, etc... Ces comédies, généralement considérées comme consternantes par les critiques, n'ont pas d'autre prétention que de divertir. Truffées d'allusions à des films à succès, elles reposent sur un comique loufoque à la manière de l'humour des Frères MARX et des MONTHY PYTHON. La sympathie qu'inspire NIELSEN au travers de son personnage pris dans des situations improbables et ridicules, à la manière de l'acteur anglais John CLEESE, leur permet de ne pas être une simple addition répétitive de scènes rocambolesques. Les rediffusions permettront sans doute encore longtemps de distraire un large public.



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(* AMITYVILLE 2 est une histoire fantastique formée autour d'un mythe populaire inspiré de faits réels; il va de soi qu'on se dissociera de ceux, critiques et distributeurs, qui considèrent avec un certain cynisme que la réalité d'un fait divers sanglant, dans ce film comme dans MASSACRE A LA TRONÇONNEUSE - lequel n'est d'ailleurs pas un film fantastique, faute d'élément surnaturel - constitue un piment supplémentaire du spectacle, la politique de ce site étant, notamment, de se mettre au service de l'imaginaire, non de verser dans un certain voyeurisme morbide ).

(** on renverra le lecteur distrait aux liens vers les sites amis)

- Nota : le texte fait partiellement l'objet d'un dépôt légal -