mardi 22 juin 2010

DEJA DEUX ANS EN COMPAGNIE DES CREATURES...

Attention, la lecture assidue de ce blog peut rendre Créaturomaniaque !...

"Créatures et imagination" fête son deuxième anniversaire. Créé spontanément le 17 juin 2008 pour rendre un hommage au grand créateur de monstres Stan WINSTON, qui venait juste de disparaître, le site a rapidement élargi sa vocation de manière à présenter un large éventail de sujets susceptibles d'intéresser un public plus étendu, autour de la singularité du vivant, telle que celle-ci se manifeste tant dans la nature qu'au travers de sa célébration par les différentes formes d'imaginaire, comme le laisse entendre l'intitulé qui englobe les êtres fictifs au sein des créatures considérées dans toute leur diversité, entre nature et culture. Cette optique associant la science à l'imaginaire, mais en l'appliquant ici spécifiquement au domaine du vivant, s'inscrit en quelque sorte dans la continuité de l'ancien magazine télévisé "Temps X" des Frères BOGDANOV, des écrits de Roland LEHOUCQ et des périodiques de science-fiction américains comme Amazing Stories et Wonder Stories ainsi que dans la version française de la revue Galaxy qui faisaient alterner d'audacieux récits de fiction scientifique avec des textes de vulgarisation très approfondis décrivant le système solaire, la vie animale des abysses ou encore les espèces reliques qualifiées de fossiles vivants .

Comme l'habitué l'aura certainement déjà perçu, cette approche conduit à faire voisiner des articles relevant essentiellement de la science-fiction ou du fantastique, consacrés aux êtres imaginaires et à leurs créateurs, avec des textes de vulgarisation, ces derniers permettant notamment au lecteur non spécialiste de pouvoir être malgré tout sérieusement informé de certains sujets d'intérêt général touchant au monde vivant, comme la polémique sur l'évolution par l'intermédiaire du débat avec le créationnisme au travers de points concrets ("DARWIN et la controverse sur l'évolution") ou les enjeux environnementaux ("ALLEGRO FORTISSIMO"). D'autres encore orchestrent la rencontre des deux au point de compliquer l'indexation des articles.

Camille FLAMMARION, astronome et écrivain, un des premiers auteurs à s'intéresser conjointement à la science et à l'imaginaire, dont l'un des ouvrages a inspiré le sous-titre de ce site ( le titre quant à lui ayant résulté du choix de trouver des termes identiques en français et en anglais, à l'époque où l'option de la langue retenue n'avait pas été fixée ).

la science-fiction, continuation de la science par d'autres moyens

La logique retenue se fonde sur les recoupements entre les deux domaines, qui sont plus souvent associés qu'on n'est spontanément porté à le considérer.

Des chercheurs sont ainsi assez couramment sollicités par le cinéma, notamment pour les films mettant en scène des Dinosaures, afin que les recréations cinématographiques puissent s'appuyer sur les connaissances les plus récentes dans le domaine. Le paléontologue Dougal DIXON a pratiquement fondé la biologie spéculative et nombre de scientifiques américains - même si ceux-ci regroupent plutôt une majorité de physiciens que de biologistes (voir introduction du blog)- se sont tournés vers la science-fiction pour pouvoir pousser plus loin leurs spéculations.

De l'autre côté, reprenant en cela l'exemple des études anatomiques exécutées par Leonardo di VINCI à la Renaissance, des artistes s'inspirent partiellement de la nature, comme les techniciens d'effets spéciaux de l'équipe de Stan WINSTON ayant œuvré sur le film LEVIATHAN ou celle de Todd MASTERS sur HORRIBILIS, qui ont étudié la texture des animaux marins dans l'intention de conférer davantage de crédibilité à celle de leurs monstres.

L'éclectisme affiché n'empêche pas d'envisager chaque sujet de manière approfondie. Pour autant, on s'efforce ici de ne pas sacrifier la complexité du vivant au nom d'une simplification schématique excessive, s'attachant simplement à rendre compréhensible le sujet pour tout lecteur intéressé ou simplement curieux, sans requérir l'acquisition préalable d'une culture scientifique - malgré l'inévitable utilisation de noms scientifiques pour les espèces n'ayant pas de nom commun, sans lesquelles il n'y a pas de précision satisfaisante. L'exigence de sérieux et le désir d'être complet sont aussi une marque de considération à l'endroit des internautes qui fréquentent ces pages, en ne mésestimant pas leur capacité de compréhension.

Par ailleurs, l'indépendance de ce blog à l'égard des institutionnels, quels qu'ils soient, permet de concourir à l'expression du pluralisme des opinions sur les sujets concernés en exprimant des vues "hérétiques" à une époque ou le conformisme règne souvent en maître.

Il ne s'agit d'ailleurs pas à proprement parler d'un blog, qui consiste d'ordinaire en de courts sujets portant sur les domaines les plus divers, dont la seule raison d'être se rattache à la personnalité du créateur, alternant centres d'intérêts multiples, événements familiaux, etc... mais d'un site d'information et de réflexion autour d'un certain nombre de thèmes connexes.

Raison d'être du site

"Créatures et imagination" s'applique à proposer des angles originaux, des sujets transversaux, afin d'enrichir l'offre présentée par les autres sites; ainsi, on ne trouvait principalement qu'un seul dossier francophone sur le maquilleur Rob BOTTIN - référence qu'on avait d'ailleurs indiquée en lien internet - lorsqu'on a mis en ligne l'article sur le grand maquilleur rendant compte des derniers développements de sa carrière; il en existe depuis deux de plus. Sans vouloir prétendre avoir exercé quelque influence en la matière, on se félicite d'avoir participé à la remise au goût du jour d'un grand nom des effets spéciaux non numériques, dorénavant ignoré par les grands médias, à l'occasion d'un sujet qui mettait en perspective l'arrêt de son site avec le retrait de deux autres concepteurs de monstres du cinéma, Patrick TATOPOULOS et Steve JOHNSON. "Créatures et imagination" a sans doute été aussi le premier site francophone à rendre compte d'un investissement récent de son confrère Carlo RAMBALDI, le concepteur de E.T. L'EXTRATERRESTRE, pourtant lui aussi tombé dans un oubli général, de même qu'il a sans doute été seul à rendre hommage, avec un article détaillé, au grand compositeur Jerry GOLDSMITH pour le cinquième anniversaire de la disparition - elle-même originellement passée pratiquement inaperçue en France - dont les partitions ont servi d'écrin à tant de créatures cinématographiques. Quant au cinquième anniversaire du décès de l'acteur William BOYETT, aucun autre site n'a évoqué cet interprète étonnant qui a incarné de manière mémorable l'hôte d'un parasite extraterrestre dans le film THE HIDDEN, nécessaire évocation de la mémoire d'une personnalité tombée en désuétude, qui a elle seule justifierait la poursuite de cette entreprise, confortant le site dans sa vocation de "contre-programmation". Enfin, "Créatures et imagination, les êtres réels et les êtres imaginaires" ne s'est pas limité à signaler la disparition du producteur de cinéma Charles SCHNEER en mentionnant les titres des films bénéficiant des talents du grand créateur de monstres Ray HARRYHAUSEN qu'il avait produits, mais s'est ingénié à démontrer en quelle mesure son rôle avait été essentiel dans la carrière de ce dernier. Quant aux créatures bien réelles, le site n'entend pas se cantonner à une culture standardisée qui limiterait l'éventail des espèces jugées seules susceptibles d'intéresser le lecteur comme le pratique la muséologie moderne, n'hésitant pas, au contraire, à évoquer sans discrimination aussi bien les énormes Dinosaures si populaires que les minuscules Kinorhynques essentiellement connus des spécialistes, de manière à pouvoir intéresser le public à des espèces qui ne sont jamais montrées hors des publications scientifiques.

  Un végétal fantastique ? Un monstre lovecraftien ? Non, un simple ver annelé marin, éblouissant de beauté, loin de l'image dépréciative qu'a généralement de ces animaux le grand public. De quoi, bien loin de la virtualité abstraite, exalter l'imagination de ceux qui s'intéressent à la vie sous toutes ses formes.

"Créatures et imagination" permet aussi de conserver la disponibilité au public de documents qui ont disparu depuis d'internet, émanant par exemple de sites dorénavant fermés de créateurs, telles certaines photos de tournage du studio d'effets spéciaux de Patrick TATOPOULOS ainsi qu'un dessin de production réalisé par celui de Steve JOHNSON pour la série AU-DELÀ DU RÉEL, L'AVENTURE CONTINUE, ou bien encore les commentaires riches et variés d'internautes anglo-saxons exprimés sur un forum de discussion qui a depuis supprimé le sujet et dont l'essentiel peut toujours être lu en exclusivité dans l'article intitulé "Un hommage purement virtuel". D'autres photos rarissimes présentées par Créatures et imagination ont même, en sus des reprises par notre confrère canadien Mario GIGUÈRE, été réutilisées sur d'autres sites, comme deux photos en noir et blanc présentant des monstres de THE THING ou une photo en couleur de l'extraterrestre du fort peu connu téléfilm SHOCK INVADER que j'avais fait numériser à partir d'une cassette en location, laquelle a permis d'illustrer la page d'un site référençant l'œuvre - la source du document n'a pas été citée, mais on ne s'en offusquera pas, n'étant pas détenteur des droits du document. De la même façon, certaines espèces vivantes singulières ne font qu'un passage éphémère sur internet et méritent que leurs photos soient conservées de manière à pouvoir en faire à nouveau profiter les amateurs.

Ceux qui apprécient ce site

La fréquentation de ce site francophone ( au moins 14 000 visites en deux ans - les premiers compteurs installés ayant connu des dysfonctionnements ) témoigne d'un certain intérêt du lectorat, ce qui incite à reconduire l'entreprise pour une durée au moins égale, avec l'espoir de pouvoir proposer de nouveaux éclairages originaux voir surprenants. On pourra par contre exprimer quelque regret sur le nombre étique de commentaires, "Créatures et imagination" gagnerait sans doute à davantage d'interactivité de la part de ceux qui trouvent quelque intérêt à le fréquenter ( cela dit, après tout, une formule populaire postule que : "qui ne dit mot consent" ). Quelques lecteurs et correspondants ont cependant fait connaître spontanément leur adhésion, au moins partielle ( tous ne sont pas aussi catégoriques à l'encontre de l'imagerie virtuelle ), à cette entreprise : "articles intéressants et toujours bien écrits", Mario GIGUÈRE, créateur du site Le Club des monstres (www.clubdesmonstres.com) et de son fameux Bestiaire (http:/www.clubdesmonstres.com/bestiaire.html) tentative titanesque de recenser tout ce qui marche, court, rampe, vole ou nage dans la fiction ( vaste programme, Mon Général... ), lequel, coïncidence, fête également en ce mois de juin son dixième anniversaire d'existence. Avec les compliments de "Créatures et imagination". "Plusieurs articles évoquent ces créatures d'avant les images de synthèse avec une passion pour la vie non circonscrite à notre espèce. Original et inattendu", écrit Jacques HAMON, créateur d'un site remarquablement bien illustré, une véritable référence internationale, sur la littérature de science fiction (http://www.collectorshowcase.fr/index.htm), lequel inclut depuis peu un visuel présentant, simultanément, peut-être pour la première fois, les photographies des principaux illustrateurs de l'Age d'or de la littérature de science-fiction américaine . Il a depuis précisé fort aimablement : "Inutile de vous dire que je suis toujours avec un grand intérêt le développement de votre blog sur les créatures imaginaires. Je pense que votre blog est d'une grande originalité et ne ressemble à rien de déjà vu sur le web". "Un blog utile", Robert SOUBIE, traducteur, spécialiste de Stanley WEINBAUM (http://www.astrosurf.com/soubie/stanley_g__weinbaum.htm, dont l'éditeur se trouve à la page: http://stores.lulu.com/store.php?fAcctID=1040304) "Blog SUPER, très documenté et fort intéressant !!", Nicolas BILLIOTEL, artiste à la large palette de talents (http://nbilliotel.blogspot.com).

Qu'ils soient ici chaleureusement remerciés pour leur soutien et leur encouragement.
Ajoutons une petite pensée pour les deux personnes qui m'ont soutenu dans ma marche à reculons vers l'informatisation, sans lesquelles le blog n'aurait peut-être pas vu le jour, ainsi naturellement qu'une certaine gratitude pour l'hébergeur qui donne la liberté de présenter ces articles sans qu'il soit nécessaire de faire appel aux dons des lecteurs.

Un regret, cependant, le manque d'intérêt d'éditeurs jusqu'à ce jour, lesquels fréquentent paraît-il les blogs en quête d'inédits, alors que ce site pourrait servir de tremplin à certaines parutions. Que ceux-ci ne craignent pas de vaincre leur timidité naturelle, certains textes, consacrés à l'imaginaire, sont tout à leur disposition. Beaucoup de critiques affirment que les éditeurs publient n'importe quoi, doit-on alors se laisser aller à penser que si l'on n'est pas publié, c'est précisément qu'on n'écrit pas "n'importe quoi"?

 
Les êtres imaginaires promus ambassadeurs des créatures réelles ?

L'éclectisme de ce site peut dans une certaine mesure paraître un peu inhabituel au lecteur francophone. Il s'approche cependant d'une tradition plus répandue dans le monde anglo-saxon; cela dit, même une revue de science-fiction française comme la revue "Fiction" consacrait à une certaine époque quelques pages à de la vulgarisation scientifique en complément des nouvelles qu'elle proposait aux lecteurs. Notons d'ailleurs aussi, à l'inverse, que les auteurs scientifiques anglo-saxons rechignent moins à évoquer les œuvres de fiction pour illustrer leur réflexion - alors que les œuvres d'imagination sont souvent perçues comme un sujet indigne d'intérêt dans nos contrées par les chercheurs "sérieux" - et que la biologie spéculative est pratiquement devenue une discipline à part entière dans cet univers culturel.

Par ailleurs, même s'il n'apparaît pas d'emblée que les amateurs de fantastique et les naturalistes aient des intérêts liés, "Créatures et imagination, les êtres réels et les êtres imaginaires", continuera à illustrer les recoupements qui peuvent s'opérer entre les êtres réels et la fiction. N'y aurait-il pas, d'ailleurs, quelque paradoxe, à ce que ceux qui sont fascinés par les Loups-garous se désintéressent totalement du devenir des animaux qui ont inspiré ces êtres légendaires, ou que les passionnés de science-fiction qui portent toute leur attention sur la quête de la découverte d'une vie extraterrestre soient indifférents à la disparition de la diversité biologique qui nous entoure encore - dans les revues anglo-saxonnes consacrées à l'imaginaire, il n'est d'ailleurs pas exceptionnel que celles-ci intègrent des encarts en faveur d'associations de protection des espèces menacées, sans parler des publicités occasionnelles pour des ouvrages ou illustrations sur la vie préhistoriques. Il ne paraît en fin de compte pas complètement illogique que ceux qui se passionnent pour les représentations fantasmatiques ou conjecturelles des êtres vivants ne soient pas totalement insensibles à la disparition des créatures bien réelles, dont la beauté et la variété composent un fantastique héritage qu'il serait vraiment regrettable de laisser anéantir.
Le Gollumjapyx ( en haut ) est un Insecte primitif sans ailes ( et non un "mille-pattes" comme un spécialiste l'indiquait récemment à la télévision française en montrant un animal similaire ) vivant sous terre et capturant ses proies avec sa pince terminale. Son nom vient de la combinaison de Japyx, un genre voisin déjà connu, et du nom Gollum ( modèle en résine, au-dessous ), celui d'un personnage inventé par l'écrivain J.R.R. TOLKIEN, devenu blafard à force de vivre dans une grotte. Il symbolise ainsi la convergence d'intérêt entre histoire naturelle et fiction; pour davantage d'informations sur ce thème, lire l'article "la peoplisation du monde vivant" d'octobre 2009.

Comme on l'avait déjà proclamé dans l'introduction, les espèces animales, méprisées par les tenants anthropocentristes de la culture, sont souvent aussi belles et merveilleuses que les tableaux de la Renaissance et, bien que non créées par l'homme, méritent autant d'être protégées. Quant aux êtres imaginaires, ils sont justement une émanation de sa culture, et l'accompagnent depuis l'aube de son histoire. Par conséquent, formes vivantes comme créatures inventées par l'homme méritent d'êtres reconnues; on continuera à affirmer ici que toutes ces créatures les plus diverses font aussi partie de notre culture.

PS : Pour permettre aux lecteurs réguliers de s'y retrouver plus facilement dans l'historique, un index des principaux sujets, mis à jour régulièrement, sera dorénavant proposé, ainsi qu'un sommaire.

samedi 22 mai 2010

L'ENGOUEMENT POUR LES DINOSAURES GRANDEUR NATURE NE FAIBLIT PAS


Paris, capitale du Mésozoïque

On signalait récemment l'exposition sur les Dinosaures avec des modèles animés, "La faim des Dinosaures" qui se tient dans la capitale française, au Grand Palais (pour plus d'informations, voir notule du 18 février 2010). Prévue jusqu'en juin, celle-ci se prolongera en fait jusqu'au 1er septembre 2010.

Avec une aussi impressionnante gueule, ce Tyrannosaure était un candidat idéal pour "La Faim des Dinosaures".

En dépit de sa crête, il ne s'agit pas d'un Casoar mais d'un Oviraptor.

Euoplocephalus, Dinosaure cuirassé parent du Crichtonsaurus déjà évoqué.

Une seconde exposition, "Le temps des Dinosaures", a lieu Porte de Versailles à Paris. Conçue initialement pour son jeune fils par un Argentin nommé Aquiles SOJO, elle ne comporte dorénavant pas moins de 51 Dinosaures présentés chronologiquement, depuis le petit Scelidosaure qui ressemble à un agneau épineux jusqu'à d'effrayants Carnosaures géants comme un fort réussi Tyrannosaure, galerie incluant aussi l'Ampélosaure, un Sauropode récemment découvert dans le sud de la France. On admirera également deux Ornithopodes notables, un gigantesque Lambéosaure, et un Edmontosaurus qui passe alternativement de la position quadrupède à la bipédie. "Le temps des Dinosaures" est visible jusqu'au 31 juillet 2010.

En dépit de son allure gracieuse, ce Gallimimus présente une taille qui impose le respect.

Les Prosauropodes, gros animaux bipèdes de la fin du Trias, sont les ancêtres des géants comme le Brontosaure et le Diplodocus.

Le Pachycéphalosaure a la tête dure.

Lui aussi très armé contre la voracité des carnivores, un ankylosauridé d'une autre espèce est proposé aux visiteurs dans la seconde exposition.

Les créateurs de JURASSIC PARK avaient demandé à l'équipe du créateur d'effets spéciaux Stan WINSTON de concevoir un Dilophosaure de taille menue. Le véritable animal était plus grand et plus impressionnant.

Aquiles SOJO, concepteur et créateur de l'exposition "Le temps des Dinosaures", devant un Dinosaure à plumes.

Il ne manque plus que des expositions sur les Mammifères disparus, comme aux Etats-Unis, (même si le Mammouth a récemment été mis à l'honneur).


AVIS AUX LECTEURS :

Ce blog fêtera fin juin ses deux années d'existence ; faîtes connaître votre sentiment au sujet de Créatures et imagination, les êtres réels et les êtres imaginaires : comment vous l'avez découvert, si vous le consultez à l'occasion ou si le suivez régulièrement, si vous le parcourez brièvement ou si vous lisez les articles attentivement - ou même si quelqu'un les a tous lus (à part peut-être Mario, fidèle de la première heure), si vous trouvez pertinente la proximité d'articles sur l'imaginaire avec de la vulgarisation, etc... Et évidemment si vous souhaitez que l'expérience se poursuive, ou si celui-ci n'est pour vous qu'un site parmi beaucoup d'autres auquel vous n'êtes pas particulièrement attaché... et bien sûr les sujets que vous souhaiteriez voir aborder prochainement.

lundi 17 mai 2010

LE MAITRE DES MARIONNETTES

Jim HENSON et un Skeksès de THE DARK CRYSTAL.

    Jim HENSON disparaissait subitement il y'a vingt ans d'une pneumonie, le 16 mai 1990, à l'âge de 53 ans. L'homme est mondialement connu pour avoir créé le MUPPET SHOW, spectacle échevelé à base de marionnettes autour de la figure emblématique de Kermit la grenouille, regorgeant de personnages pittoresques tels Scooter, le stagiaire maladroit et arriviste, le délirant cuisinier suédois, Sam l'Aigle américain, toujours sentencieux et exagérément solennel ou encore les personnages des deux grincheux aux saillies particulièrement réjouissantes. On lui devait également une autre série pour le jeune public, 1 RUE SESAME. Jim HENSON a cependant aussi été impliqué dans la création de créatures d'aspect plus réaliste.

    Une multitude de personnages exubérants

    Né le 24 septembre 1936, Jim HENSON a grandi dans le Mississipi, avant que sa famille n'emménage dans le Maryland, non loin de Washington. Influencé par les émissions de son enfance à base de ventriloques et de marionnettes, comme KUKLA, FRAN AND OLLIE, il crée en 1955, par le biais du module universitaire auquel il s'est inscrit, un programme pour enfants à base de marionnettes, SAM AND FRIENDS, pour la chaîne WRC-TV, lequel succède à une première initiative similaire pour WTOP-TV conduite l'année précédente alors qu'il était encore au lycée. Jim HENSON s'attache à obtenir le meilleur parti de son art, en utilisant judicieusement le cadrage pour dissimuler les animateurs, et en dotant ses personnages de vraies articulations ainsi que d'une bouche capable de simuler la parole. Il prend comme assistante marionnettiste sa camarade d'université Jane NEBEL, qu'il épouse.

    Ayant eu rapidement une famille à nourrir, Jim HENSON, qui a obtenu un diplôme d'économie, investit sa propension à la créativité dans le domaine de la publicité, doutant que sa passion pour les marionnettes, qui l'a conduit à se rendre plusieurs mois en Europe pour y rencontrer ceux qui participent de cette longue tradition, lui assure un revenu suffisant. Cependant, l'envie de réaliser du pur divertissement ainsi que la notoriété des marionnettes de SAM AND FRIENDS apparues notamment dans nombre de publicités, l'incitent à lancer la Compagnie des Muppets, qu'il fonde à New-York avec son épouse en 1963. Il ne tarde pas à engager son vieil ami Frank OZ pour que celui-ci remplace sa partenaire appelée à pourvoir à l'éducation des enfants du couple. Il établit finalement - comme Ray HARRYHAUSEN, un autre Américain - son quartier général en Angleterre en 1976, ce qui engendrera parfois un sentiment de désaffection pour les représentants de la branche demeurée aux USA, chargée de la diffusion des réalisations sur le continent nord-américain.


Décor de la série THE LAND OF GORCH, première esquisse d'un monde fantastique.

    Après une série de films expérimentaux remarqués, comme CUBE dans lequel un homme ne peut mystérieusement sortir d'une pièce exiguë, à l'inverse des visiteurs qui peuvent aller et venir normalement, Jim HENSON conçoit les deux grands shows qui feront sa notoriété, mêlant des acteurs à des marionnettes ainsi qu'à des personnages interprétés par des comédiens costumés, 1 RUE SESAME en 1968 et le MUPPET SHOW, qui dure de 1976 à 1981 et associe des sketchs à des numéros musicaux, lequel a tant de succès qu'une parodie moquant l'actualité politique voit le jour en France, le BÊBÊTE SHOW. Les personnages saugrenus du MUPPET SHOW reviennent par la suite à l'occasion de plusieurs films et de programmes télévisés spéciaux, ainsi que d'un succédané pour les tous petits, les "Muppets babies", montrant les versions des personnages dans leur très jeune âge.


    Néanmoins, Jim HENSON avait toujours eu à cœur de se renouveler et proposa de nouvelles séries comme FRAGGLE ROCK (1983-1987) , qui mettait en perspective notre monde, représenté par un acteur ( Michel ROBIN dans la version française ) et son chien ( une marionnette réaliste ), avec d'autres mondes coexistants, l'un peuplé par un genre de lutins vivant sous terre, rappelant les Muppets, voisinant avec celui de Lilliputiens assimilés à des insectes sociaux, ainsi qu'un dernier habité par des ogres velus, comme ceux du MUPPET SHOW. Bien que principalement destiné au jeune public, l'univers humoristique de FRAGGLE ROCK n'est pas dépourvu de poésie, et approche quelquefois la philosophie. Son projet DINOSAURES, vision satirique de la famille et du monde contemporain à travers une famille de Dinosaures humanoïdes truculents vivant dans une société très semblable à la nôtre, ne verra le jour qu'après sa disparition, en 1991.


Faz FAZAKAS, un des principaux techniciens de l'équipe de Jim HENSON, ici à l'œuvre sur les Dozers de FRAGGLE ROCK.

    Jim HENSON refusa par contre, à l'instar de la Compagnie Disney, de s'associer avec le marionnettiste Paul FUSCO qui avait proposé l'idée de la série ALF, contant les facéties d'un extraterrestre velu et blagueur interprété par une marionnette, dont le style et l'humour, non dénué de profondeur, étaient pourtant voisins des siens, craignant que cela ne porte préjudice à ses propres projets, et s'avérant d'autant plus réticent que les deux hommes avaient le même agent en commun, Bernie BRILLSTEIN. Par la suite, HENSON fut conquis par la série et devint ami avec Paul FUSCO.



Scred, vu dans LAND OF GORCH, un des premiers êtres d'allure fantastique créé par Jim HENSON.

    Le créateur du MUPPET SHOW parvint à communiquer sa passion à nombre de collaborateurs qui l'accompagnèrent durant des années dans ses divers projets. Il considérait que divertir la jeunesse, dans un monde souvent difficile, était une entreprise tout à fait estimable; ce père de famille de cinq enfants était aussi désireux d'utiliser son art pour suppléer à l'éducation des plus petits, en particulier ceux des familles défavorisées, en s'associant à des projets les initiant aux rudiments de la lecture, ainsi qu'en les sensibilisant à la défense de l'environnement; il estimait aussi que, si ce type de programme pouvait inciter à propager certaines valeurs comme le respect d'autrui et la protection de la nature, il convenait en revanche de le préserver de la politisation.


    Un autre monde, un autre temps, à l'âge du fantastique

    L'ambition artistique de Jim HENSON donna toute sa mesure avec un projet cinématographique incroyable, THE DARK CRYSTAL. Le concepteur du MUPPET SHOW réfléchissait depuis longtemps à une fresque qui mettrait en scène des créatures grotesques, d'allure reptilienne, revêtues de costumes saugrenus. Il avait créé en 1979 l'atelier Jim Henson's Creature Shop, de manière à disposer d'un lieu voué spécifiquement à l'élaboration des personnages, permettant à une équipe de perfectionner constamment les techniques pour rendre les marionnettes plus vivantes et maniables. En 1981, il avait délégué son assistant Frank OZ sur le film L'EMPIRE CONTRE-ATTAQUE pour l'animation du personnage du maître Jedi nommé Yoda, marionnette amenée à effectuer une prestation convaincante auprès d'un acteur réel. Cette expérience et les possibilités de l'atelier l'incitèrent à penser qu'il pourrait mener à bien le projet d'un long métrage entièrement interprété par des créatures fantastiques crédibles. On pourrait aussi trouver quelque filiation entre DARK CRYSTAL et THE LAND OF GORCH, une séquence de l'émission SATURDAY NIGHT LIVE avec un décor fantastique, dont l'un des personnages, Scred, ressemble beaucoup à un précurseur des Skeksès, même si sa tête évoque davantage le dragon que le vautour.

Un être contemplatif issu de l'univers de THE DARK CRYSTAL.

    DARK CRYSTAL reprend le principe des émissions de marionnettes conçues par Jim HENSON, mais sur une grande échelle : un plateau surélevé recouvert de panneaux mobiles dissimule au regard des spectateurs les animateurs, qui se contorsionnent pour donner vie aux différents personnages. Des acrobates sont recrutés pour explorer toutes les potentialités du corps humain afin de de donner vie aux morphologies les plus variées, le cas sans doute le plus spectaculaire étant probablement celui des montures des Gelflings, les Echassiers du vent bien nommés, interprétés par des équilibristes dont chaque membre est prolongé par une échasse. Le célèbre maquilleur Stan WINSTON sera si impressionné par le résultat qu'il demandera à rencontrer Jim HENSON et à être autorisé à s'inspirer de ses techniques pour ses propres créations; les animations ingénieuses de la Reine d'ALIENS et des "Drones" de la troupe de choc de L'INVASION VIENT DE MARS en sont en quelque sorte les héritiers ( voir l'article de juin 2008 "Un magicien des effets spéciaux s'en est allé" ). Pour s'assurer de la qualité de l'univers de DARK CRYSTAL, Jim HENSON, qui s'est pour l'occasion associé à un producteur de L'EMPIRE CONTRE-ATTAQUE, Gary KURTZ, recrute l'illustrateur Brian FROUD, un spécialiste du monde féérique celtique. Celui-ci invente avec un luxe de détails l'ensemble des éléments visuels, des créatures aux différentes architectures en passant par les animaux de la forêt, les ustensiles et les ornements. Le résultat est éblouissant, et la partition de Trevor JONES apporte le supplément d'émotion nécessaire pour faire de cette fable intemporelle sur le bien et le mal une réussite complète susceptible de plaire à tous les publics ayant gardé le goût du merveilleux.

Un des plateaux de tournage surélevé, constitué de plaques coulissantes, de THE DARK CRYSTAL, en l'occurrence l'observatoire astronomique d'Aughra.


Un animateur s'entraîne à incarner dans une position périlleuse un Échassier du vent.


Un arbre ambulant de THE DARK CRYSTAL.

Une autre créature de THE DARK CRYSTAL, tenant à la fois du végétal et de l'animal.

    Jim HENSON réédite quelques années plus tard l'expérience avec un peut-être un peu moins de succès au travers de LABYRINTH, alors qu'aux cruels Skeksès roulant des yeux en piaillant, aux allures d'oiseaux de proie dépenaillés, à la fois grotesques et inquiétants, succède dans l'emploi du personnage maléfique le chanteur David BOWIE, serti dans un costume évoquant quelque peu une vedette de l'époque du "disco". Alors que DARK CRYSTAL avait son univers spécifique, ce nouveau long métrage qui reprend partiellement le format du Muppet Show avec ses séquences chantées par la vedette invitée déconcerte un peu les admirateurs du premier film. Jennifer CONNELLY y interprète une adolescente candide qui tente d'arracher au sorcier maléfique son petit frère, en compagnie de personnages extravagants dans le style de ceux de la nouvelle version du MAGICIEN D' OZ réalisée par Walter MUNCH pour les studios Disney.


Jim HENSON sur le tournage de LABYRINTH, dirigeant Jennifer CONNELLY face à Ludo, imposant personnage fantastique.
Si les murs ont parfois des oreilles, ceux de LABYRINTH sont aussi pourvus d'yeux. Remerciement à Christophe pour cette photo rare de ce surprenant buisson.

    En 1987, Jim HENSON élabore, dans la lignée de son adaptation des Animaux de Brème, une série télévisée sans égal, MONSTRES ET MERVEILLES ( THE STORYTELLER ) qui donne toute sa dimension au merveilleux à la télévision. Un narrateur ( John HURT grimé ), en compagnie d'un chien selon la formule éprouvée de FRAGGLE ROCK, raconte des histoires fabuleuses issues de contes européens. L'esthétique soignée et la qualité des effets spéciaux participent d'un climat très particulier, mettant en valeur une histoire dont les brillants atours servent une réflexion morale. Une seconde série moins connue, THE STORYTELLER: GREEK MYTHS (LEGENDES GRECQUES), s'attachant à la mythologie gréco-romaine, voit le jour deux ans plus tard sur le même modèle, malgré un ton plus sombre, illustrant les mythes éternels du vol d'Icare, de la mésaventure d'Orphée, de Thésée face au Minotaure ainsi que du combat de Persée contre les Gorgones. Malheureusement, ces deux séries ne rassemblent à elles deux qu'un nombre fort limité d'épisodes. Une autre série connaîtra une fin prématurée, tout aussi triste. THE JIM HENSON HOUR, en 1989, met en scène le fameux animateur lui-même, autour de son univers, incluant aussi bien les Muppets renommés que les créatures les plus variées apparaissant dans des fictions au ton plus réaliste; il n'hésite pas également à montrer les coulisses des effets spéciaux et de l'animation des Muppets, tel un magicien au sommet de sa gloire prêt à révéler au spectateur certains de ses secrets. Pourtant, les derniers épisodes ne sont même pas diffusés par les chaînes de télévision.

Les protagonistes d'un épisode de MONSTRES ET MERVEILLES; un réalisme onirique bien loin du monde factice du dernier film de Tim BURTON adaptant Lewis CAROLL.

Une des créatures fabuleuses de MONSTRES ET MERVEILLES.

Un Griffon qui force au respect.

Après Ray HARRYHAUSEN, Jim HENSON s'est attaché à retranscrire le mythe de Persée et de la Gorgone ( effets spéciaux de Nigel BOOTH ).
Saisissant Minotaure issu de la même série.


      Un atelier d'effets spéciaux reconnu

    A partir de l'aventure de THE DARK CRYSTAL, la création d'êtres réalistes devient une activité à part entière au sein de l'atelier Creature Shop, indépendamment de la fabrication et de l'entretien des Muppets. Frank FAZAKAS, notamment, s'ingénia durant des années à perfectionner et miniaturiser les sytèmes radiocommandés, permettant d'animer les minuscules personnages de FRAGGLE ROCK, les Dozers, ainsi que d'obtenir une gamme plus riche d'expressions faciales pour les divers personnages. Des créateurs d'effets spéciaux appelés à une certaine notoriété y ont fait leurs preuves, comme Bob KEEN, qui se fera un nom sur les maquillages très morbides des écorchés de la série de films HELLRAISER tirés de l'œuvre de l'écrivain Clive BARKER, ou Lyle CONWAY qui poursuit de manière autonome sa carrière avec des films comme le remake du MAGICIEN D'OZ de Walter MURCH et celui de THE BLOB réalisé par Chuck RUSSELL, avant d'assister Rob BOTTIN sur UN CRI DANS L'OCEAN, jusqu'à ce que la vogue des trucages informatisés ait pour effet de les évincer tous deux du tournage en même temps que de mettre brutalement fin à leur activité ( comme évoqué dans l'article "les derniers grands créateurs déclarent forfait", mai 2009 ).


    La réputation du studio d'effets spéciaux de Jim HENSON lui vaut d'être engagé sur d'autres productions. C'est le cas de DREAMCHILD, film dans lequel Ian HOLM incarne le Révérend Charles DOGDSON, plus connu sous le nom de plume de Lewis CAROLL, racontant à la petite Alice ses célèbres fantasmagories. Lyle CONWAY, encore membre de Creature shop à l'époque, supervise les effets spéciaux donnant vie à des créatures à l'étrange réalisme, notamment aux personnages de la Chenille fumeuse de calumet, d'un grotesque réjouissant, et à celui de la "Fausse tortue" saisissante au point d'en être dérangeante; l'équipe de CONWAY œuvre ensuite sur le monstre végétal du remake de LA PETITE BOUTIQUE DES HORREURS réalisé par Frank OZ, qui demeure la plus enjouée des plantes carnivores vues à l'écran.


Un Lapin surréel sorti de DREAMCHILD face à la petite Alice.

La "Fausse Tortue" de DREAMCHILD, objet de notre première photo-mystère.

    Malheureusement, le dernier projet bien connu auquel le nom de Jim HENSON fut associé de son vivant est l'adaptation cinématographique du manga LES TORTUES NINJA, considéré par beaucoup - malgré les prénoms des protagonistes inspirés de ceux de peintres italiens de la Renaissance - comme le symbole d'une certaine sous-culture triviale à déconseiller à la jeunesse ( le technicien Frank FAZAKAS, dont le nom aurait inspiré celui du personnage de Fozzie l'ours du MUPPET SHOW, avait ironisé à leur sujet en disant qu'à l'instar des politiciens, elles étaient complètement humaines, à l'exception de la tête ). Jim HENSON n'avait lui-même apporté sa contribution qu'avec réticence, craignant que le contenu violent n'influence négativement le jeune public.

    Le studio d'effets spéciaux prit part au troisième volet de L'HISTOIRE SANS FIN, qui n'était plus l'adaptation de l'œuvre de l'écrivain allemand Michael ENDE contrairement aux deux films précédents, mais une fantaisie s'en inspirant, laquelle propulse des personnages fantasmagoriques dans le monde réel, les pérégrinations d'un bébé "Mangeur de pierre" gaffeur et d'un arbre ambulant générant des situations cocasses. On y retrouve notamment le dragon Falkor, qui ressemble encore davantage à un chien, et est remarquablement bien animé. Creature Shop conçoit les animaux préhistoriques délirants de l'adaptation cinématographique du célèbre dessin animé LES PIERREAFEU, dont les héros sont interprétés par le truculent John GOODMAN et le maladroit Rick MORANIS (CHERIE J'AI RETRECI LES GOSSES) . Il construit le monstre animatronique impressionnant du PACTE DES LOUPS, qui manqua de blesser la vedette, mais fut cependant remplacé dans le montage final par sa doublure virtuelle. Il réussit aussi le prodige de donner littéralement la vie au pantin en bois de PINOCCHIO face à Geppetto interprété par Martin LANDAU, dans l'adaptation de 1996 du conte de COLLODI, confortant les vues de Jim HENSON aspirant à faire de marionnettes de vrais personnages.


L'Arbre ambulant de L'HISTOIRE SANS FIN 3, encore un étrange végétal dû à l'équipe de Jim HENSON.


    La fin d'une tradition

    Malheureusement, l'atelier fondé par Jim HENSON se convertit de plus en plus à la mode pour le virtuel, à l'instar de l'animateur image par image Phil TIPPETT ou du maquilleur Greg CANNOM. Si le film LOCH NESS dans lequel Ian HOLM incarne avec conviction un mystique défenseur de la tradition celte, antithèse de son personnage de scientiste d'ALIEN, comporte, outre quelques plans généraux en image de synthèse alors qu'un d'un petit modèle animé aurait été bien plus satisfaisant, une tête mécanique remarquable de réalisme de Plésiosaure, nombre des contributions récentes accordent une écrasante prédominance aux effets conçus par ordinateur. A côté de ses extraterrestres baroques de la série FARSCAPE produite par la société de Jim HENSON ou des humanoïdes patauds, évocation satirique des bureaucrates, du GUIDE DU RETOUR GALACTIQUE, réalisés selon des méthodes traditionnelles, Creature shop a conçu les manifestations surnaturelles du remake télévisé de JASON ET LES ARGONAUTES, pauvres succédanés immatériels des extraordinaires créatures de Ray HARRYHAUSEN, préfigurant tristement le remake du CHOC DES TITANS et autres PERCY JACKSON LE VOLEUR DE FOUDRE. Pour la série DINOTOPIA, à l'exception d'un bébé Tricératops, toutes les espèces de Dinosaures sont en images de synthèse. Dans LOST IN SPACE, les "araignées tripèdes" n'ont aucune réalité matérielle et les mutations du personnage interprété par Gary OLDMAN contaminé par les créatures sont simplement ridicules, comme si ses évolutions réitéraient celles du COBAYE ( film sur la réalité virtuelle ) au lieu d'être la traduction de transformations biologiques. Même pour l'adaptation cinématographique de MAX ET LES MAXIMONSTRES, dont les fameux monstres s'apparentent d'ailleurs à certaines créatures géantes du MUPPET SHOW ainsi qu'aux ogres de FRAGGLE ROCK, l' atelier d'effets spéciaux de Jim HENSON a réalisé des costumes pour les acteurs qui les interprètent, mais concession à l'air du temps et à la facilité, les expressions faciales ont été recréées informatiquement au lieu de procéder de mécanismes radiocommandés comme pour LABYRINTH. 

L'essentiel des effets spéciaux réalistes conçus par la compagnie concerne à présent des doublures animalières pour des publicités ou pour le cinéma, comme précédemment pour L'OURS de Jean-Jacques ANNAUD et BABE, LE COCHON DEVENU BERGER, ou plus récemment l'adaptation cinématographique des 101 DALMATIENS. Ces animaux extrêmement réalistes démontrent bien l'inanité du discours dominant prétendant que la plupart des trucages effectuées par des images numériques seraient irréalisables par d'autres procédés plus "conventionnels". Lorsqu'on constate à quel point ces créations sont indistinguables des vrais animaux avec lesquels elles voisinent, on ne peut que se désoler que les créatures imaginaires ne bénéficient plus au cinéma d'un semblable souci de réalisme.


La magnifique tête mécanique du monstre de LOCH NESS réalisée par Mak WILSON et Jeremy HUNT.


Ce superbe Protoceratops n'existe que sous forme de maquette conceptuelle : pour l'adaptation télévisée de DINOTOPIA, le personnage de Bix a été entièrement numérisé ( image trouvée sur le blog http://www.gurneyjourney.blogspot.com ).

Hérissons pourvus de masques à gaz fustigeant la pollution automobile dans un spot télévisé.

    Le fils aîné de Jim HENSON, qui a pris la succession, affirme que son père, ayant toujours été attentif à utiliser de nouvelles techniques, aurait été très certainement partisan de l'utilisation de l'imagerie générée par ordinateur. Brian HENSON a évidemment une légitimité certaine pour se faire l'interprète du disparu; cependant, il n'est pas totalement interdit d'être plus dubitatif: en dépit de la variété des techniques, de la marionnette à l'animatronique radiocommandé, Jim HENSON à toujours maintenu un lien entre une créature concrète et des animateurs, ce qui n'a plus rien à voir avec un dessin animé généré par des infographistes. Certes, le créateur du Muppet Show avait mis en scène dans une attraction, MUPPETS 3-D, conçue pour un parc d'attraction Disney, un personnage numérique protéiforme nommé Waldo C. Graphic, mais celui-ci était bien présenté pour ce qu'il était, un être virtuel généré par ordinateur. Cela paraît bien différent de la tentative plus récente de numériser la totalité des personnages du MUPPET SHOW, les rapprochant de l'univers du dessin animé alors qu'aussi fantaisistes soient-ils, ceux-là évoluaient originellement dans des décors élaborés, ce qui contribuait à leur spécificité. Il semblerait que l'éviction de Creature shop, qui avait travaillé sur le projet du film CŒUR DE DRAGON, au profit d'une version numérisée du monstre légendaire, ait contribué à la reconversion de la compagnie dans cette voie.

    On sait bien que les contes de fée ne durent qu'un temps; en dépit de son enthousiasme communicatif, Jim HENSON, on l'a mentionné plus haut, connut quelques désagréments avec les chaînes de télévision, qui déplaçaient sans ménagement certaines de ses émissions d'une tranche horaire à une autre, puis décrétaient alors que celles-là ne trouvaient pas leur public. La séparation d'avec sa compagne de toujours, mère de ses cinq enfants, l'a par ailleurs plongé dans la dépression. Un jour que son ex-conjointe lui rendait visite, celle-la le trouva particulièrement affaibli. Jim HENSON eut la prescience que son heure était arrivée. Il se laissa finalement convaincre d'être conduit à l'hôpital, mais son état se détériora en quelques heures de manière irrémédiable, succombant à une pneumonie qu'un examen précédent, réalisé alors qu'il était déjà souffrant, n'avait pas détectée.


Une statue de Jim HENSON et de sa plus célèbre création dans l'université du Maryland dans laquelle il a effectué ses études, érigée en hommage en 2003.

    Conformément à ses volontés, son enterrement fut à l'image de sa vie, une fantaisie colorée et joyeuse dont le noir était banni, avec des participants ayant revêtu le costume de certaines de ses créations. Sa compagnie lui a survécu, de même que l'atelier d'effets spéciaux, dorénavant établi à Los Angeles - après ses expériences décevantes récentes à la télévision, Jim HENSON aspirait à se rapprocher d'Hollywood. Les personnages les plus emblématiques, les Muppets, ont quant à eux été rachetés par les studios Walt Disney, conformément au souhait de Jim HENSON désireux de pouvoir se concentrer davantage sur la part artistique en cédant ses droits d'exploitation de la marque. Le nom de Jim HENSON survit aussi au travers de sa fondation, qui continue de promouvoir l'art de la marionnetterie en appuyant différents projets. Enfin, sa notoriété se prolonge à travers internet, une branche spécifique de l'encyclopédie en ligne Wikipedia ayant vu le jour exclusivement dans le dessein de célébrer ses créations, celle-ci ayant été nommée de manière explicite Muppet.wikia
(
http://muppet.wikia.com). En dépit de ses doutes initiaux, et malgré son existence écourtée, Jim HENSON a incontestablement réussi son pari de rendre viable durant de nombreuses années un empire fondé sur la marionnetterie.

"Tu crois que Jim HENSON pourrait être oublié? Cela m'étonnerait beaucoup." (photo de John HURT incarnant le narrateur de MONSTRES ET MERVEILLES conversant avec son chien ).

Pour ceux qui souhaitent lire d'autres articles sur le sujet : hommage pour le 19ème anniversaire de sa disparition :
http://720lignes.com/2010/07/jim-henson-le-premier-des-muppeteers/comment-page-1
le site officiel de la compagnie : http://www.henson.com
le site officiel de Creatures shop : http://www.creatureshop.com

On peut voir certaines créatures animatroniques assez récentes de Creatures shop dans la vidéo:
http://www.youtube.com/watch?v=m1dsFdjXgro&feature=related

Enfin, le site promouvant l'art des marionnettes dans la culture, créé par Jim HENSON :


mardi 20 avril 2010

LE CHOC DES TITANS : EXIGEZ L'ORIGINAL !

L'animation par Ray HARRYHAUSEN du monstre océanique, à la fois reptilien et tentaculaire, du CHOC DES TITANS ( 1981 ), qu'il a substitué au dragon marin de la légende originelle de Persée.

On lit souvent ces derniers temps, sous la plume de critiques de cinéma, un argumentaire établissant une opposition entre AVATAR et le remake du CHOC DES TITANS, au motif que ce dernier a été tourné en pleine nature de même que dans des décors recréés en studio. Néanmoins, si le cadre servant à la mise en scène a bien, en effet, une existence concrète, à l'instar des films traditionnels, les êtres fantastiques n'y ont en revanche pas davantage de réalité, ce qui atténue beaucoup la dichotomie alléguée. Les créatures fabuleuses constituant l'élément central du film, il est pour le moins peu compréhensible que celles-ci ne fassent pas l'objet d'un même souci de crédibilité que le cadre dans lequel évoluent les personnages.

On a déjà évoqué ce remake dans l'article "Un hommage purement virtuel" ( novembre 2009 ), en déplorant l'existence contestable de ce film remplaçant les remarquables trucages de Ray HARRYHAUSEN par l'infographie alors même qu'on refusa à ce dernier la mise en chantier d'un troisième film mythologique - l'article ayant été également l'occasion d'aborder les raisons de fond qui conduisent les cinéphiles exigeants à rejeter les effets spéciaux virtuels au nom du "naturalisme" dont la logique commanderait de récréer à l'identique les caractéristiques du vivant. On renvoie à cet article les lecteurs intéressés. Il va de soi que Créatures et imagination, les êtres réels et les êtres imaginaires, reste fidèle à la version initiale du merveilleux magicien des effets spéciaux et propose pour la célébrer quelques photographies des monstres qui la peuplent.

Les deux "titans" du film de Desmond DAVIS de 1981, à l'incroyable présence. Difficile d'imaginer Gorgone plus terrifiante (en haut) que celle créée par Ray HARRYHAUSEN. En dessous, gros plan sur un colossal monstre marin, le Kraken.

Un critique anglo-saxon rejoint la présente analyse, même si l'acception prêtée à la notion de "réalisme" n'est pas la même que celle définie ici, et qu'il faut par ailleurs relever que l'auteur crédite à tort Ray HARRYHAUSEN des trucages de JACK LE TUEUR DE GÉANTS (qui devrait lui-même faire l'objet d'un remake par Bryan SINGER ), lesquels sont en fait imputables à Jim DANFORTH qui s'était inspiré de ses techniques et qui seconda son modèle sur LE CHOC DES TITANS. L'auteur pose la question essentielle : "pourquoi refaire un film en éradiquant ce qu'il avait de plus excitant ?" Les anglophones peuvent lire l'article et voir la scène avec Medusa à cette adresse : http://www.scene-stealers.com/blogs/clash-of-the-titans-1981-vs-2010-are-we-sacrificing-fun-for-realism/

Les Grands Anciens sont toujours là...

Evincé du cinéma depuis trente ans ( voir l'hommage à Charles SCHNEER de mars 2008), Ray HARRYHAUSEN continue d'honorer de sa présence nombre de conventions de science-fiction. Il a même créé une fondation destinée à protéger les reliques des films d'animation image par image : http://www.rayharryhausen.com/the_foundation.php .

Ray HARRHYAUSEN toujours aussi passionné.

Le grand maquilleur Rob BOTIN, évoqué quant à lui dans l'article "Les derniers grands créateurs déclarent forfait" de mars 2009, n'aurait pas, malgré la fermeture de son site dont on a rendu compte immédiatement en ces pages - s'il s'agissait bien réellement de lui, renoncé à apporter sa contribution au cinéma, bien qu'étrangement, son nom n'ait pas été évoqué par les initiateurs de la préquelle inspirée par le chef d'œuvre de John CARPENTER, THE THING, sur lequel il avait œuvré à la tête d'une importante équipe. Son confrère Vincent PRENTICE a confié en janvier 2010 que Rob BOTTIN s'attellerait de manière imminente à un mystérieux projet qui pourrait de nouveau faire parler de lui ( l'article original peut être lue à la page suivante: http://www.famousmonstersoffilmland.com/tag/joe-dante). Souhaitons ardemment que ce prodige des effets spéciaux puisse de nouveau être en mesure d'enchanter les cinéphiles.

vendredi 16 avril 2010

PHOTO-MYSTERE n°1


Créatures et imagination propose à la curiosité des lecteurs son premier postulant à la photo-mystère.

Quelle est donc cette étrange créature? Un animal transgénique, une espèce de mammifère récemment découverte dans une forêt tropicale, ou bien encore un monstre vu dans une série télévisée ?

Toutes les propositions sont les bienvenues pour restituer son identité à notre invité du jour.

ponse:
Non, ce n'est pas l'Écureuil de la Caisse d'Épargne, les yeux rougis pour cause de crise économique. Il semblerait que les lecteurs soient restés perplexes quant à l'identité de notre bel inconnu. Il s'agit de la "Fausse tortue" du film DREAMCHILD, conçue pour une adaptation d'ALICE AU PAYS DES MERVEILLES par l'équipe de Jim HENSON, qui s'impose par sa présence très physique alors que la nouvelle version de Tim BURTON se contente de créatures virtuelles. "Créatures et imagination" vous propose à partir du 16 mai 2010 un hommage au célèbre marionnettiste créateur d'un grand studio d'effets spéciaux pour le vingtième anniversaire de sa disparition.

samedi 3 avril 2010

N'EN DÉGOUTEZ PAS LES AUTRES, MONSIEUR BESSON !

Décidément, ces derniers temps, l'offensive finale contre les "vrais effets spéciaux" ayant généré tant de superbes créatures paraît déclenchée. Comme si l'adulation médiatique unanime pour les "extraordinaires effets d'AVATAR" ne suffisait pas, voilà que le cinéaste Luc BESSON, évoquant le Ptérodactyle virtuel de son adaptation cinématographique de la fameuse bande dessinée de TARDI, LES AVENTURES D'ADÈLE BLANC-SEC, affirme avec forfanterie que grâce à "l'évolution des effets spéciaux", celui-ci n'est pas "en carton-pâte" ( à la différence comprend-t-on sans peine de ceux qui ont précédé ). Toujours ce même dédain pour tout ce qui a été fait auparavant, cette outrecuidance des zélateurs du virtuel ( il fallait par exemple entendre leurs concepteurs se vanter de la création des entités du téléfilm LES LANGOLIERS, à peine plus réels pourtant que les "Pacmans" des jeux vidéos ), pour lesquels rien de valable n'avait encore été fait jusqu'à ce qu'ils interviennent, comme si les plus grands créateurs qui ont œuvré jusque là n'avaient jamais existé.

L'étau se resserre sur l'ultime rescapé


Disciple de Dick SMITH et mentor de Rob BOTTIN, le maquilleur Rick BAKER qui, après avoir connu la consécration, est aujourd'hui relégué au rang de supplétif par les promoteurs du virtuel. Spécialiste des singes, on lui devait la majeure part des effets spéciaux du remake de KING KONG en 1976, mais il avait aussi conçu certains des extraterrestres des MEN IN BLACK.

Ces propos ne sont pas anodins, s'inscrivant dans une volonté sans cesse réaffirmée d'éradication totale des effets spéciaux physiques - révélatrice d'un fantastique allant au plus facile. On a rendu compte dans l'article de mars 2009 "Les derniers grands créateurs déclarent forfait" du découragement de très grands noms des effets spéciaux - dont le Français Patrick TATOPOULOS qui a sans doute compris que son atelier n'aurait pas davantage sa place dans la cité du cinéma que crée Luc BESSON, qu'à Hollywood à présent. On ajoutait que Rick BAKER était le dernier des créateurs de monstres prestigieux à poursuivre apparemment son activité, malgré l'hostilité et la condescendance actuelles pour les maquillages spéciaux. Or voilà que cet artiste, dont chacun s'accorde à reconnaître la modestie et la réserve, avoue sa déception, la seule véritable scène de transformation lycanthropique de WOLFMAN, film de Joe JOHNSTON auquel il a apporté récemment sa contribution, ayant été effectuée par des infographistes au détriment des trucages qu'avait agencés le grand maquilleur, pourtant auteur du Loup-garou le plus impressionnant de toute l'histoire du cinéma ( LE LOUP-GAROU DE LONDRES ). Ainsi donc, aucun des génies des effets spéciaux n'est finalement épargné par la désaffection pour les vrais effets spéciaux en trois dimensions. Ce n'est sans doute plus qu'une question de temps pour que Rick BAKER, qui s'était déjà fait volontairement plus rare ces derniers temps, n'écourte à son tour définitivement sa merveilleuse carrière, dans l'indifférence générale.

Rick BAKER terrassé à l'issue de sa collaboration à WOLFMAN - une attaque plus redoutable qu'il ne l'imaginait.

C'était la dernière séance...

Ce blog se sera ainsi fait le témoin de la dernière phase de la mort programmée des trucages de cinéma qui n'étaient pas réductibles à une simple addition de pixels assemblés par un programme informatique. Pour notre part, nous persistons à défendre les tours-de-force de ceux qui nous faisaient rêver, nous permettant de croire RÉELLEMENT, le temps de la projection, à des créations tangibles. Monsieur BESSON, vous pouvez dévaloriser les "monstres en carton-pâte" ( quelle méconnaissance de la variété des matériaux utilisés, à croire qu'il n'est pas allé au cinéma depuis 35 ans ), ici, nous les aimons passionnément - il conviendrait peut-être de fonder une société protectrice des monstres ( faits de mousse de latex et de plastiline, à défaut de chair et de sang ) ! - et, en attendant un hommage prochain à une autre sommité du genre, nous gardons, bien volontiers, pour notre part, notre "Ptérodactyle en carton-pâte", celui du CONTINENT OUBLIÉ, une bien belle bête ( ci-dessous ) semblant surgie directement d'une époque ancienne, ce qu'elle est malheureusement à double titre.

Mâchoire aux dents aiguisées et œil vicieux, un Reptile volant trop curieux agresse un biplan dans LE CONTINENT OUBLIÉ de Kevin CONNOR ( 1977 ).